« Le serpent majuscule » de Pierre Lemaître

Quand je suis allée récupérer « Chaleur humaine » à la médiathèque, une fidèle lectrice rendait ce roman de Pierre Lemaître qu’elle avait beaucoup aimé, confirmé par la bibliothécaire, alors je suis partie avec les deux livres…

Cramponnée au volant de sa R25, Mathilde trépigne car elle est coincée dans les embouteillages, elle râle, insulte tout le monde même Ludo, le dalmatien, en prend pour son grade. Mathilde est pressée, elle a un contrat à exécuter. Si, si, un contrat, comme la mafia : un mystérieux ami, Henri, alias le commandant, qu’elle a connu dans la Résistance lui a désigné une victime à abattre.

Ce sera chose faite, en pleine rue, alors que l’industriel promène son Teckel, deux balles dans les testicules pour le fun et une dans la tête pour finir, et pendant qu’elle y est, autant trucider le Teckel, que deviendrait-il sans son maître….

Mathilde fut une belle femme autrefois, mais en 1985, elle s’est empâtée, trente kilos au moins, mais garde un certain charme.

Elle a réussi sa mission, malgré les petits arrangements dans le mode d’exécution, et devrait se débarrasser de son arme car on lui en fournit une différente chaque fois pour ne pas éveiller les soupçons. Mais parfois, elle les garde et les range dans un carton à chaussures. Mais, en saut lieu on s’inquiète : pourquoi avoir visé les testicules ? Même Henri essaie de comprendre et l’appelle le lendemain mais elle trouve une explication…

Entre deux contrats, Mathilde a une vie ordinaire, elle a épousé un médecin aujourd’hui décédé, un peu par dépit car elle était amoureuse d’Henri, qui avait aussi un béguin pour elle, mais la manière cruelle dont elle a exécuté un officier allemand pendant la guerre, sans éprouver la moindre émotion lui a fait prendre un autre chemin. Dangereuse, Mathilde !

On va suivre Mathilde au fur et à mesure des contrats qu’on lui confie, mais on commence à se demander si Alzheimer n’est pas entrée en contact avec son cerveau, car elle commence à avoir envie de trucider tout le monde, le voisin qui lui apporte des légumes, une jeune femme dont elle a noté l’adresse sans se souvenir du pourquoi et du comment : dommage collatéral…

J’ai littéralement dévoré ce roman, les ruminations de Mathilde qui parle avec Henri dans sa tête, le pauvre Ludo, le chien, qu’elle malmène sans vergogne… c’est jouissif pour le lecteur de la suivre au fil des contrats et de ses délires, même si on ne voudrait en aucun cas l’avoir comme voisine,  avec un final en apothéose… On ne meurt que d’une chose durant cette lecture, c’est de rire…

J’ai découvert Pierre Lemaître avec « Au revoir là-haut » et depuis je dévore : la saga, la suite avec « Le Grand Monde », mon préféré, mais je connaissais très peu l’auteur de polars n’ayant lu que « Robe de marié » qui m’a beaucoup plus et je suis conquise. Il a sorti ce roman, écrit dans les années quatre-vingts et non publié, d’un tiroir et a décidé de le publier sans modifier le texte sinon, cela aurait été un autre livre explique-t-il.  

8/10

Mathilde conduit très près du volant parce qu’elle a les bras courts. Elle a soixante-trois ans, elle est petite large et lourde. En regardant son visage, on devine qu’elle a été belle. Très belle même. Sur quelques photos remontant à la guerre, c’est une jeune fille d’une grâce étonnante, silhouette souple, cheveux blonds encadrant un visage rieur et d’une grande sensualité. Aujourd’hui, bien sûr, tout a doublé, le menton, la poitrine, le derrière, mais elle conserve ces yeux bleus, ces lèvres minces et ce quelque chose d’harmonieux dan le visage qui demeure la trace de son ancienne beauté…

« Les parias » : Arnaldur Indridason

Aujourd’hui, je vous emmène en Islande avec le dernier opus d’un de mes auteurs de polars préférés :

Une veuve trouve un vieux pistolet dans les affaires de son mari et l’apporte à la police. Une vérification montre qu’il a été utilisé pour un meurtre non résolu depuis de nombreuses années. Konrad, un détective à la retraite, s’y intéresse car son père a eu une arme similaire… 

Konrad nous apparaît ici dans toute son ambiguïté morale, aux prises avec les démons de son enfance auprès de ce père malhonnête, dangereux et assassiné par un inconnu. La soif de vengeance le domine, mais il résout les crimes restés sans réponses claires dans le passé. Il regrette un certain nombre de ses actes et essaye de s’amender. Ce faisant, il nous révèle la dureté de la société islandaise à l’égard de tous les déviants.

Un roman noir pur et dur, de beaux personnages pour lesquels le lecteur éprouve de l’empathie, de vrais méchants, aussi. Un de ces romans addictifs dont Indridason a le secret et qui restent dans le cœur des lecteurs bien à l’abri des tempêtes hivernales.

Lorsqu’une veuve trouve un vieux pistolet caché dans les affaires de son mari qui vient de décédé, elle décide de l’apporter à la police ce qui va faire remonter à la surface de vieilles affaires criminelles non élucidées, et notre ami Konrad, détective à la retraite va se lancer à la quête de la vérité, car cette arme l’inquiète, il est sûr de l’avoir vue entre les mains de son père…

En effet, son père a été assassiné à coups de couteau et il s’agissait d’une personne dépourvue de morale et violent avec Konrad qui était très en colère juste avant ce meurtre jamais élucidé, car il venait d’apprendre que son cher père avait été incestueux avec sa sœur. Konrad a longtemps redouté que le crime soit dû à sa mère (ou peut-être à lui-même, car il garde peu de souvenirs de cette soirée)

Dans ce roman noir, vraiment très noir, l’auteur explore, au fil des enquêtes non résolues (cold case sonne mieux alors que je préfère utiliser des mots français à l’instar des Canadiens), différents thèmes sordides, mettant en lumière la société islandaise en fonction des époques : les enfants abusés par des pervers pédophiles dans une structure d’accueil, la chasse aux homosexuels, la violence intrafamiliale, les malversations de certains policiers, les aveux extorqués, etc.

On peut ainsi approfondir l’enfance, l’adolescence de Konrad, la manière dont il a pu exercer son métier et l’opiniâtreté qu’il met à tenter d’élucider les anciennes enquêtes en dépit des injonctions de son ancienne équipe, les erreurs qu’il a pu faire et la manière dont il les analyse et tente de les réparer. J’ai eu l’impression en refermant le livre qu’il n’y aurait peut-être pas d’autre enquêtes de Konrad…

Ce roman m’a permis de retrouver la plume de Arnaldur Indridason que j’aime beaucoup, et j’avoue que j’ai dû m’accrocher un peu, parfois, tant la noirceur était omniprésente. Il faut dire que j’ai moins d’atomes crochus avec Konrad qu’avec l’inspecteur Erlendur, ceci explique peut-être cela.

Un grand merci à NetGalley et aux éditions Metailié qui m’ont permis de découvrir ce roman et de retrouver la plume de son auteur

#LesParias #NetGalleyFrance !

8/10

Le jour de ses neuf ans, le père de Konrad lui avait une fois encore reproché ses questions idiotes. L’enfant avait eu le temps de comprendre bien des choses pendant sa courte vie. Certaines étaient plutôt simples à assimiler, d’autres lui avaient été inculquées par l’expérience.

La journée ne s’était accompagnée d’aucune réjouissance. Son père n’avait rien fait pour la célébrer. C’était un jour comme les autres. Seppi avait oublié l’anniversaire de son fils. A croire qu’il n’en avait jamais connu la date…

« Bleu » de Koz

Intermède thriller pour souffler un peu ! eh oui, j’ai encore besoin de respirer car les lectures s’accumulent et le retard dans les chroniques également et il est plus facile de parler d’un roman noir que d’un roman passionnant de cette rentrée qui nécessite une attention particulière et de la délicatesse, en un mot de peaufiner :

Résumé de l’éditeur :

Alors qu’une violente tempête se prépare près de Nantes, les météorologues redoutent la conjonction de ce phénomène avec la grande marée d’équinoxe, promesse de crues exceptionnelles. Rapidement, leurs prédictions se révèlent justes et la montée conjuguée des eaux maritimes et de la Loire devient totalement incontrôlable. Mais, plus inquiétant encore, les hôpitaux de la région se retrouvent subitement submergés par des cas d’encéphalite fulgurante qui poussent les malades au suicide. Une situation aussi dramatique qu’inexplicable…

Hugo Kezer et Anne Gilardini, commandants en charge de la cellule Nouvelles Menaces, se rendent alors sur place. Embarqués par leur collègue nantais, le lieutenant Fabrice Le Troadec, ils vont tenter, malgré les inondations et l’évacuation de la ville, de faire la lumière sur cette pandémie suicidaire sans précédent et de l’endiguer.

Ce que j’en pense :

J’ai choisi ce titre pour souffler (je me répète, Alzheimer sors de ce corps !) le dernier volume d’une trilogie, après « Noir » et « Rouge » que je n’ai pas lus, mais j’ai quand même pu suivre, même s’il me manquait des éléments de la vie et des drames des protagonistes.

L’action se situe à Nantes, où une violente tempête est annoncée avec risque de crue historique. Les météorologues sont sur le pied de guerre, leurs prévisions très sombres pas forcément prises au sérieux : tout le système fonctionne à la perfection, on détectera sûrement à temps et selon les autorités, on est prêts…

Sur ce fond déjà apocalyptique, se greffent une vague de suicides inexpliqués : des migrants se sont jetés dans le vide, un enfant a tenté de sauter d’un étage élevé du CHU, et sur ce tableau déjà compliqué, une des personnes chargées de surveiller les normes de chlore, la détection de microbes dans l’eau potable s’écroule lors d’une vérification, alors que tous les paramètres étaient au vert. Sabotage ? Mauvaise appréciation des conditions ?

Pourquoi diligenter une enquête alors qu’il s’agit de suicides ? On comprend très vite que c’est beaucoup plus complexe surtout quand tomberont les premiers résultats : encéphalite. A l’équipe de police de Nantes, sous les ordres de Fabrice Le Troadec, va se joindre Hugo Kezer et Anne Gilardini, commandants en charge de la cellule Nouvelles Menaces… et un éminent professeur de l’institut de Lyon va s’inviter sur l’enquête.

L’enquête en elle-même m’a plu, elle est originale, bien dans l’actualité du dérèglement climatique, et rondement menée. Cependant je n’ai pas été convaincue car certaines ficelles sont grosses, en faisant intervenir des mouvements extrémistes comme « Mouvement pour l’extinction volontaire de l’humanité » ou encore la secte appelée « Church of Euthanasia », (fondée en 1992 aux USA par Chris Korda) pour lesquelles il est urgent de débarrasser la Planète des humains, alors quoi de plus efficace qu’une pandémie ???

Autre petite déception : j’ai compris très vite le rôle du Professeur et pourquoi il était concerné. Dans une enquête sur fond de pandémie j’ai de loin préféré « Pandemia » de Franck Thilliez mais on passe un bon moment car la lecture devient vite addictive, sans toutefois emporter. En refermant ce livre, je n’ai pas envie de me précipiter sur les deux premiers opus. Il faut dire que depuis deux ans on a tellement entendu parler du Covid, des vaccins, de confinements gestes barrière que s’y retrouver plongé, même en période de vacances, ce n’est pas forcément tentant.

Un grand merci à NetGalley et aux éditions du Fleuve qui m’ont permis de découvrir ce roman et son mystérieux auteur.

#Bleu #NetGalleyFrance !

7,5/10

Extraits :

Tel est l’enjeu principal de leur job : sans cesse pondérer les prévisions et les risques avérés, distinguer le possible du probable, privilégier la raison des chiffres sur la peur de l’homme.

Depuis que le centre-ville de Nantes avait été « nettoyé » de leur présence, les vagues successives de réfugiés se fixaient là où elles le pouvaient en périphérie, de préférence loin des zones habitées et près d’un point d’eau. Les options envisageables n’étaient pas légion…

L’indifférence blasée des techniciens de l’Identité Judiciaire, volontiers saupoudrée d’un humour macabre, le mettait toujours mal à l’aise. Pour Fabrice Le Troadec, le respect dû aux victimes n’était pas un vulgaire voyant qui s’éteignait en même temps que leur électrocardiogramme.

Des supermarchés où l’on se battrait jusqu’au sang pour une bouteille d’eau minérale. Il se représentait des « émeutes de la soif » comme on parlait d’émeutes de la faim dans certains pays du Tiers-Monde. Un chaos cauchemardesque qu’il n’aurait jamais pensé voir ailleurs qu’au cinéma.

Il songea qu’on mettait ses convictions et son existence entière au service de l’ordre. Et puis un jour, un sale jour, on découvrait qu’on ne servait à rien d’autre qu’à accompagner le pire…

Débrancher, délester… On se serait davantage cru dans une gare ou un entrepôt que dans un hôpital. Dès leur admission, les malades se transformaient en vulgaires paquets à gérer.

Vous avez déjà entendu parler du VHEMT ? … Volontary Human Extinction Movement. En français : « Mouvement pour l’extinction volontaire de l’humanité » 

Lu en août 2022

« Insoluble » de James Patterson & Ellis David

Intermède thriller, pour respirer entre deux romans de la rentrée que j’ai particulièrement appréciés, (patience, les chroniques tardent à venir mais elles vont finir par arriver !) avec le livre dont je vous parle aujourd’hui :

Résumé de l’éditeur :

Depuis l’assassinat de sa sœur (Invisible, L’Archipel, 2016), Emmy Dockery, analyste au FBI, ne cesse d’identifier des crimes impunis là où ses collègues concluent à des morts accidentelles.

À travers le pays, des sans-abris ou les personnes qui leur viennent en aide meurent sans que personne ne s’émeuve. Sauf Emmy, persuadée qu’un tueur est aux manettes. Un homme qui, selon son enquête, se déplace en fauteuil roulant.

Pendant ce temps, Citizen David défraie la chronique. Ce justicier fait sauter le siège d’entreprises qu’il estime manquer d’éthique. Ne laissant aucun mort derrière lui, il s’attire les faveurs du public. Jusqu’au jour où il fait exploser, à Chicago, un centre d’accueil pour SDF. Bilan : près de deux cents morts.

Parallèlement, l’ex-agent Harrison Bookman est chargé par une huile du FBI de surveiller Emmy, son ancienne petite amie, suspectée d’être la taupe qui livre des informations confidentielles à la presse au sujet de Citizen David. Mais quelqu’un d’autre surveille Emmy. L’observe, l’épie… Et attend le moment opportun pour frapper !

Ce que j’en pense :

Emmy Dockery, analyste chevronnée au FBI travaille d’arrache-pied sur la piste d’un nouveau tueur en série qui s’en prend aux sans- et aux personnes qui leur viennent en aide dans l’indifférence générale. Toutes ces morts ont été classées comme accidentelles donc aucune enquête en vue officiellement.

Emmy a été violemment agressée lors de sa précédente enquête (sa sœur ayant été assassinée) n’a pas repris son poste de travail, mais travaille chez elle sur ses ordinateurs personnels en rendant des comptes à ses supérieurs pas forcément bienveillants (résoudre une enquête, en ayant été torturée cela crée des tensions, des jalousies !) qui n’hésitent pas à mettre en doute ses capacités mentales.

En parallèle, des attentats sont commis sans jamais faire de victimes, le but étant de créer des dégâts matériels pour tenter de réveiller les consciences sur la cause animale, les banques qui n’accordent pas de crédit aux personnes de couleur etc. et évidemment c’est l’enquête jugée la plus importante… il faut absolument mettre la main sur celui que l’on finit par désigner sous le nom de Citizen David. Mais un jour, (piratage oblige) un attentat est commis minutieusement contre une agence de crédit au-dessus de laquelle se trouve un centre d’accueil pour des sans-abris. Deux cents morts ! et même si le motus operandi diffère de celui du « justicier », mais ne divulgâchons point !

J’ai aimé la manière dont les auteurs nous entraînent sur de fausses pistes, multipliant les coupables possibles, sur fond de vétérans atteints de SSPT, en fauteuil roulant pour attirer la sympathie, de trumpistes convaincus que l’assistanat et médicare révulsent, de génies de l’informatique, pirate de courriels, d’adresse IP, d’usurpation d’identité réelle ou virtuelle.

On a toutes les failles et forces du FBI et autres enquêteurs, la taupe qui renseigne les journalistes, les petites (et grandes) magouilles en haut lieu… Et évidemment qui est suspectée d’être la taupe ? Emmy bien sûr, qui se retrouve sous la surveillance d’un ex-agent reconverti en libraire, Harrison Bookman qui n’est autre que l’ex petit ami d’Emmy.

Je n’ai pas lu « Invisible » le roman précédent des auteurs qui raconte l’enquête qui a failli coûter la vie à Emmy, mais ce n’est pas gênant pour comprendre les tenants et les aboutissants de l’enquête et les liens des personnages entre eux, leur histoire personnelle, (mais cela donne évidemment envie de réparer cet écueil !).

J’ai aimé les thèmes étudiés au cours de l’enquête, la société étasuniennes et ses dérives, (car les auteurs ne sont pas tendres) autant que l’intrigue elle-même et j’ai littéralement dévoré ce thriller au rythme haletant, impossible à lâcher… et je vais me procurer « Invisible » c’est évident.

Un grand merci à NetGalley et aux éditions de L’Archipel qui m’ont permis de découvrir ce roman et ses auteurs

#Insoluble #NetGalleyFrance !

8/10

Extraits :

Je ne suis ni le Mal incarné, ni un fou. Je ne suis pas ignare, je ne suis pas pauvre, et je ne suis pas le produit d’une éducation violente. Ce que je fais, je le fais pour une raison et une seule raison.

Et qu’on ne me parle pas de cruauté ou de pitié. L’homme réfléchi n’a ni sentiments, ni préjugés ; seulement un cœur de pierre. Je suis tel qu’on m’a fait. Le résultat des lois de la nature, pas des lois conçues par je ne sais quel groupe d’humains ineptes.

Les meilleurs perceurs de coffres et cambrioleurs du monde travaillent pour le FBI.

Le processus de consultation et de recoupement n’est pas aussi rapide qu’on peut le voir dans certaines séries télé – quand une déesse de l’informatique tape deux ou trois mots sur son écran, presse quelques boutons sur son clavier avant d’annoncer le nom d’un méchant. Dans la réalité, l’opération peut dure longtemps.

Tous ceux que j’ai frappé l’ont bien cherché. Les banques qui refusent des prêts à des personnes de couleur ? Qu’elles aillent se faire foutre. Et franchement, tu plains ces chaînes de fast-food qui torturent des animaux ? Ce pays va droit en enfer, quelqu’un doit se lever pour prendre la défense des plus faibles…

Lu en août 2022

« L’invité(e) de trop » de Lucy Foley

Je vous propose aujourd’hui un intermède polar pour me remettre de ma précédent lecture avec ce livre :

Résumé de l’éditeur :

Un mariage sélect. Treize invités. Un cadavre.

RSVP… À vos risques et périls !

Un mariage au large de l’Irlande, sur une île belle et sauvage. Julia, à la tête d’un magazine, est déterminée et ambitieuse ; Will une étoile montante de la télé-réalité. La fête se doit d’être à l’image de leur insolente réussite : tenues de créateur, décor somptueux et hôtes triés sur le volet. Le réseau mobile est peut-être capricieux et la mer agitée, pourtant chaque détail a été planifié d’une main experte par la wedding planner.

Mais la perfection est toute théorique, les invités bien trop humains. Au fur et à mesure que le champagne coule, le ressentiment et l’envie remplacent la joie et les vœux de bonheur. Et après un black-out, voilà qu’on crie au meurtre…

Enfin publié en France, L’Invité(e) de trop s’est déjà vendu à plus d’un million d’exemplaires au Royaume-Uni, et est en cours de traduction dans 39 pays. 

Ce que j’en pense :

Bienvenue sur Inis an Amphora, alias l’île du Cormoran, où l’on s’apprête à célébrer le mariage de Julia qui règne sur un magazine, et Will qui s’est fait connaître grâce à une émission de téléréalité. Tous les deux sont beaux et riches, on l’aura compris vue l’ampleur des festivités et le lieu choisi. Le décor est somptueux mais la tempête se lève, accompagnée de coupures d’électricité, des crispations, car les témoins du marié ont fêté l’enterrement de la vie de garçon quelques jours auparavant de manière étrange.

On fait ainsi la connaissance de Johnno, le témoin de Will, Femi, Angus, Duncan et Peter, avec l’alcool qui coule à flots. Et du côté de la mariée, Olivia, sa demi-sœur, Charlie son « meilleur ami » et son épouse Hannah…

Les garçons se sont, pour la plupart rencontrés dans un collège où ils étaient internes, collège dirigé d’une main de fer par le père de Will. On comprend très vite qu’il s’est passé quelque chose de grave à l’époque que cela pourrait bien exploser à tout moment. Mais qu’est ce qui peut bien réunir toutes ces personnes différentes ?

Certains personnages m’ont plus comme, Aoife, la wedding planner, ça sonne plus exotique qu’organisatrice de mariage, mais pas d’anglicisme et son époux qui fait office de cuisinier, ou encore Olivia, la demi-sœur de Julia, traumatisée par une rupture sentimentale ainsi que Hannah, mariée très jeune à Charlie cet ami si proche (trop ?) de Julia … j’ai adoré en haïr d’autres, notamment Will bien sûr, mais Julia également trop parfaite, trop sûre d’elle, qui écrase tout le monde et qui veut tout le monde à ses pieds.. Et cette île magique m’attire beaucoup par son côté sauvage imprégné de mystères et de légendes.

J’ai aimé la manière de présenter l’histoire, avec alternance passé récent ou ancien et présent, découvrir peu à peu la personnalité de chacun, mais j’aurais aimé plus de suspense…

Très bon moment de lecture donc, qui tombait à pic après avoir refermé « Real life », mais j’aurais aimé une fin plus grandiose, du style « Le crime de l’Orient Express » d’Agatha Christie.

Un grand merci à NetGalley et aux éditions Presses de la Cité qui m’ont permis de découvrir ce roman et son auteure

#Linvitéedetrop #NetGalleyFrance !

7/10

Autrefois éditrice de fiction, Lucy Foley vit désormais de sa plume à Londres. Auteure de romans historiques et de thrillers, elle enchaîne les best-sellers. L’Invité(e) de trop est le premier à être publié en France et a été traduit dans 39 pays.

Extraits :

Les lumières s’éteignent. En un clin d’œil, tout est plongé dans le noir. La musique s’arrête. Sous le barnum, les invités poussent des cris et s’agrippent les uns aux autres… Impossible de voir et d’entendre quoi que ce soit ; le vent s’emporte et rugit en couvrant les voix.

Dans ce métier, aucun secret ne nous échappe. On voit ce à quoi personne d’autre n’a accès – les convives seraient sans doute prêts à tuer pour de tels ragots. Lorsque l’on organise un mariage, on ne peut pas se permettre d’ignorer quoi que ce soit. Je dois composer avec les plus petits détails, guetter sous la surface les plus infimes remous, ceux qui pourraient se changer en tourbillons et emporter mes préparatifs si je n’y prends pas garde.

Un mariage est une portion de temps, soigneusement découpée, dont je peux faire quelque chose d’abouti, de parfait, un souvenir à chérir une vie durant, une perle conservée d’un collier brisé.

Inis an Amphora, ou l’île du Cormoran, s’étend sur 3 kilomètres, plus longue que large. Elle est constituée d’un bloc de granit émergeant « majestueusement » de l’Atlantique, à quelques kilomètres des côtes du Connemara. Elle est presque entièrement recouverte de tourbe…

Mais ainsi va la nostalgie ; ainsi nous tyrannisent ces souvenirs d’enfance, si parfaits dans leur halo doré.

En levant les yeux, je l’aperçois : un gros cormoran perché au sommet de la chapelle en ruine, ses ailes noires ouvertes pour sécher, comme un parapluie cassé. Un cormoran sur la flèche d’une église : mauvais présage. L’oiseau du diable c’est comme ça qu’on l’appelle, par ici. Cailleach dhubh, « la sombre mégère », le porteur de mort. Espérons que les mariés ne sont pas au courant… ou qu’ils ne sont pas du genre superstitieux.

Lu en août 2022

« Le dernier vol » de Julie Clark

Petit intermède thriller avec le livre dont je vous parle aujourd’hui :

Résumé de l’éditeur :

Claire avait tout planifié pour fuir Rory, homme politique charismatique doublé d’un mari tyrannique.

Mais, à la dernière minute, la mécanique s’enraye. Son chemin croise alors celui d’Eva à l’aéroport JFK. Elle aussi a de bonnes raisons de vouloir changer de vie.

Et si chacune prenait la place de l’autre ? Les deux jeunes femmes décident d’échanger leurs billets d’avion.

Claire s’envole donc pour Oakland au lieu de Porto Rico, où elle apprend, horrifiée, que le vol qu’elle aurait dû prendre s’est abîmé en mer.

Claire est désormais Eva aux yeux de tous. Mais la nouvelle vie dont elle rêvait pourrait se révéler pire que celle qu’elle a laissée derrière elle.

Eva avait des secrets ; Claire en a hérité. Des menaces pèsent à présent sur elle…

Ce que j’en pense :

Claire est une femme victime de maltraitance aussi bien physique que psychologique de la part de son époux, Rory Cook qui appartient à une famille riche et puissante. Elle est le faire valoir de son époux qui envisage de se présenter au Sénat. Elle a tout prévu avec son amie Petra pour fuir vers le Canada, lors d’un voyage programmé.  Mais, au dernier moment, Rory change d’avis, et l’envoie à Porto-Rico, la prévenant à la dernière seconde.

Grosse panique à bord, il faut changer les plans. A l’aéroport JFK, Claire est abordée par Eva James qui lui raconte qu’elle doit fuir car accusée d’avoir « mis un terme aux souffrances » de son époux atteint d’un cancer en phase terminale. Claire ne se rend pas compte qu’Eva joue la comédie mais accepte de changer d’identité avec elle : changement de sac, de papiers d’identité, de carte d’embarquement.

Claire s’envole vers la Californie, l’appartement d’Eva mais l’avion de celle-ci s’est écrasé en vol. Claire est donc considérée comme morte. Elle va vite se rendre compte qu’Eva fuyait, elle-aussi, une situation sans issue.

L’auteure va jouer avec nous : pourquoi l’avion s’est-il écrasé ? Rory y est-il pour quelque chose, car sa première compagne est décédée de manière mystérieuse ? Eva était-elle dans l’avion ?

La personnalité de Rory, pervers narcissique, est bien abordée par l’auteure avec une scène intéressante sur la préparation de l’oraison funèbre de Claire qui vaut le détour, tant sa peine est immense !

Les deux femmes ont beaucoup de points communs : la mère et la sœur de Claire sont mortes dans un accident, Eva a été abandonnée par une mère toxicomane. Chacune va réagir à sa manière.

Julie Clark alterne les récits, avec brio : l’histoire présente pour Claire, les évènements des derniers mois précédant sa fuite pour Eva.

J’ai lu ce livre d’une traite, car ces deux femmes sont attachantes, la vie n’ayant fait de cadeaux ni à l’une ni à l’autre. Alors que je m’attendais à éprouver de l’empathie pour Claire, car c’est la maltraitance au sein du couple qui m’avait conduite à choisir cette lecture, mais très vite je me suis attachée à Eva, trahie elle aussi par les hommes mais qui lutte.

Eva a été abandonnée par sa mère toxicomane, et par ses grands-parents et confiée à des religieuses, après une tentative de placement en famille d’accueil. Mais dès qu’il a été question d’adoption possible son comportement a changé, elle a tout fait pour se faire rejeter. Ella arrive à décrocher une bourse, est admise à l’université de Berkeley où ses talents de chimiste fait des envieux. De désillusions en manipulations, elle se retrouve à fabriquer de la drogue chez elle, mais en prise à des mafieux.

C’est le deuxième roman de Julie Clark (le premier paru en France, il me semble !), et il est assez réussi ; une fois le livre entamé, on ne le lâche plus. Les personnages dits secondaires sont très intéressants aussi, des amitiés se nouent quand même, pour l’une comme pour l’autre, même si la méfiance est omniprésente car de rigueur pour rester anonyme.

Un grand merci à NetGalley et aux éditions l’Archipel qui m’ont permis de découvrir ce roman et son auteure.

#LEDERNIERVOL #NetGalleyFrance !

8/10

Née à Santa Monica, en Californie, Julie Clark est une enseignante et romancière. Après des études à l’Université du Pacifique (Californie) et un bref passage au département des sports de l’Université de Californie à Berkeley, elle est retournée à Santa Monica où elle est devenue enseignante.

Extraits :

Dans ce monde, l’argent et le pouvoir sont garants d’immunité.

Au cours de l’année suivante, Petra et moi avons mis au point un plan visant à chorégraphier ma disparition avec plus de minutie qu’un ballet. Un enchaînement d’évènements organisé à la minute près, qui ne souffrait pas la moindre erreur, et me voilà maintenant à quelques heures de son exécution.

Raconter notre histoire, c’est nous la réapproprier.

Comme beaucoup de femmes dans la même situation, j’étais prise dans une spirale de violence. J’avais peur de le mettre en colère, tout comme j’avais peur que personne ne me croit si je parlais. C’est le genre de vie qui vous ronge, qui bouleverse votre rapport à la vérité.

Il m’a coupée de toutes les personnes à qui j’aurais pu demander de l’aide. J’ai déjà essayé de le quitter, de dire la vérité sur mon couple. Seulement les hommes puissants constituent des ennemis puissants… La seule façon d’éviter un scandale public ou une procédure judiciaire interminable, c’était de disparaître.

Il y a tout un système qui tend à nous faire croire que nous ne sommes qu’accessoires. Que notre parole ne vaut rien face à celle d’un homme.

Lu en juillet 2022

« Dans la brume de Capelans » d’Olivier Norek

Intermède thriller avec le livre dont je vous parle aujourd’hui, l’avalanche de critiques enthousiastes, le plaisir de retrouver la plume de l’auteur, tout était tentant et j’ai dû attendre qu’il soit disponible à la bibliothèque :

Quatrième de couverture :

Une île de l’Atlantique, battue par les vents, le brouillard et la neige.

Un flic qui a disparu depuis six ans et dont les nouvelles missions sont classées secret défense.

Sa résidence surveillée, forteresse imprenable protégée par des vitres pare-balles.

Une jeune femme qu’il y garde enfermée. Et le monstre qui les traque.

Dans les brumes de Capelans, la nouvelle aventure du capitaine Coste se fera à l’aveugle.

Ce que j’en pense :

Le capitaine Coste est affecté à Saint Pierre, (l’archipel Saint Pierre et Miquelon) en mission secret défense : dans sa maison, isolée, aux vitres pare-balles, il « héberge » des détenus repentis, dont il tire le maximum de renseignements, avant qu’on leur attribue une nouvelle identité, récompense des services rendus. Le dernier d’entre eux étant un génie informatique.

Victor Coste se plaît dans cet isolement, qui lui a permis de quitter le 93 à la suite d’une tragédie. Tellement cabossé, qu’il est parti, sans prévenir personne. Officiellement il s’occupe des douanes et a peu de liens avec son équipe, dont les membres ne connaissent pas la réalité de son travail. Il a un seul ami, un flic en fin de vie, qui héberge sa petite-fille.

Pendant ce temps, sur le Continent, un « monstre » s’en prend à des adolescentes depuis plusieurs années en toute impunité, insaisissable car très malin. Un jour pourtant, il est moins prudent que d’habitude et une de ses cachettes est découverte : on retrouve, à côté d’une victime morte, une jeune femme de vingt-quatre ans, qui semble être la première disparue. Pourquoi l’a-t-il gardé en vie ? Elle se prénomme Anna et ne prononce pratiquement aucune parole.

On va proposer à Victor de la faire parler, l’apprivoiser… Victime? Manipulatrice? Mais ne divulgâchons pas!

J’aime bien les flics cabossés, car leur parcours est intéressant, leur psychologie également, donc le capitaine Coste ne pouvait que me plaire. La personnalité d’Anna est forte, mystérieuse, permettant de tout imaginer, car la méfiance du lecteur est toujours là, même tapie dans l’ombre, ce qui rend l’enquête passionnante. L’auteur parle très bien de la dureté du métier, des traumatismes, des addictions, dépressions ou tentatives de suicides.

Ce roman se lit de manière addictive, tant le scenario est passionnant, les rebondissements nombreux, l’auteur se plaisant à nous envoyer sans cesse, sur de nouvelles pistes avec brio, mêlant des enquêtes locales à l’enquête principale, car Saint Pierre est peut-être un endroit perdu, loin du monde, elle a son lot d’actes de délinquance. Saint Pierre qui est, elle-même, un personnage à part entière du roman, avec les éléments qui se déchaînent.

C’est le troisième roman d’Olivier Norek que je lis : j’ai beaucoup aimé « Entre deux mondes », un peu moins « Impact » et j’ai eu beaucoup de plaisir à retrouver sa plume. Je n’ai pas lu les trois premières aventures de Victor Coste, mais cela ne m’a pas gênée, Olivier Norek nous donne suffisamment d’éléments pour que l’on ne se perde pas. Par contre, mon esprit étant alléché, j’ai envie de découvrir les trois premiers volumes qui sont dans ma PAL depuis assez longtemps, tant les critiques sur mon site préféré Babelio sont enthousiastes.

9/10

Extraits :

Même repenti, rien n’efface les actes d’un sale type. Si l’un des ex-pensionnaires du flic venait à y rester, abattu, noyé, pendu… Qu’en dire ? N’est-ce pas le destin possible de ceux qui ont choisi la criminalité comme gagne-pain.

On les voudrait hideux, les monstres. Dans les villes, dans les foules, leurs démons sont invisibles. Ils nous frôlent sans que l’on frémisse. Leurs sourires ressemblent aux nôtres. On les côtoie, on les voisine, on les invite. Ils nous charment ou nous indifférent car ils sont bien normaux, les monstres.

Pour celui qui sait écouter, ce sont les premières notes de la respiration du suroît qui vous conseillent d’aller vous abriter. A la suite de cet avertissement, d’immenses nuages obscurs et menaçants apparurent au fond du ciel, poussés par le souffle de la tempête qui les menait au-devant de la scène, formant un million de petits rouleaux blancs qui parcouraient la surface de l’eau en une armée d’écume resserrant ses rangs…

(Des brumes) De Capelans. Le courant chaud du Gulf Stream rencontre le courant froid du Labrador et, une fois par an, pendant trois semaines, les brumes tombent sur l’archipel et le font disparaître littéralement de la carte. Tout devient… Disons… Mystique.

Pour certains peuples, le ciel est une digue retenant des rivières de lumières et, lorsque la digue cède, s’échappe un torrent de couleurs. Longtemps inexplicables, les aurores boréales ont forcé les hommes à leur créer des légendes. Âmes dansantes des défunts, reflet des armures des Walkyries ou pont vers l’au-delà, les habitants des terres qu’elles éclairent leur ont toutes trouvé une histoire.

Là, dans cet ancien sanatorium devenu refuge, posé au milieu des quatre-vingts hectares de verdure, des flics, comme des maisons en ruine, hommes et femmes en lambeaux, étaient accueillis, le temps d’y sevrer une addiction, d’y apaiser une dépression, d’y oublier l’accumulation d’évènements traumatiques qui font une carrière, même courte…

Lu en juillet 2022