« Summer Mélodie » de David Nicholls

Je vous parle aujourd’hui d’un livre dont le résumé et la couverture m’ont immédiatement tapé dans l’œil :

Résumé de l’éditeur :   

On n’oublie jamais son premier amour… Dans la veine du magnifique Un jour, David Nicholls signe son grand retour avec un délicieux roman d’apprentissage, de passion, d’amitié et de nostalgie, sur fond de brit pop 90’s.

Jusqu’à présent, la vie de Charlie Baxter, seize ans, était, au mieux, banale, au pire morne, avec un horizon réduit aux copains bruyants du lycée, à la miteuse station-service où il travaille la semaine et aux week-ends passés à essayer de distraire son dépressif de père. 

Mais ça, c’était avant. 

Avant de rencontrer la grâce, la fougue et le théâtre shakespearien. Il aura suffi d’un moment fugace avec Fran Fisher, incandescente créature renversante de beauté, jusque-là inaccessible, même dans ses rêves les plus fous, pour que s’ouvre soudain un nouveau champ des possibles. Et l’espoir d’une love story. 

En cet été 1997, les frères Gallagher chantent encore ensemble, Lady Di vit ses derniers jours et Charlie Baxter, lui, va voir sa vie changer à jamais… 

Ce que j’en pense :

Été 1997. Charlie a seize ans, et tout autour de lui n’est que tristesse : son père disquaire, passionné de jazz a fait faillite, sa mère, au terme de multiples disputes est partie avec un autre homme, emmenant sa sœur Billie avec elle et le laissant seul avec son père, sous prétexte qu’ils s’entendent bien !

Mais le père sombre dans l’alcool, la dépression (il ne faut surtout pas prononcer ce mot, tabou !) c’est Charlie qui est obligé d’inverser les rôles et de le prendre en charge, car il ne fait plus rien à part la télévision… Ce n’est pas son rôle , mais il ne veut en parler à personne et, rongé par la crainte de le trouver un jour avec une overdose d’alcool plus médicaments, il ne fait plus rien en cours et se retrouve en échec scolaire.

Cet été, synonyme de plaisirs pour les autres, il décide de rester le moins possible à la maison et de s’adonner à la lecture, partant en bicyclette pour aller lire en plein champ. Il rencontre Fran, qui fait partie d’une troupe de théâtre qui travaille « Roméo et Juliette » et pour elle il va intégrer la « troupe » alors qu’il s’estime dénué de tout talent.

« Pendant six semaines, on a juste l’impression d’être au mauvais endroit avec les mauvaises personnes et de passer à côté de tout. C’est pour ça que l’été est si triste – parce qu’il faudrait qu’on soit si heureux.« 

Pour Fran, il fait des efforts, apprend son texte, répète avec elle, fuyant de plus en plus la maison et la bande de copains pas toujours très nets. Au début, il désire juste un rendez-vous, pour lui offrir un café ou autre chose:

« Le thé était insipide et platonique, tandis que le café était une boisson plus ténébreuse, plus enivrante.« 

David Nicholls nous offre une très histoire, étudiant au passage, tous les aspects de l’amour : parental, ou amical, avec ses copains sous fond de beuveries, plus ou moins toxique, le premier amour, avec la découverte de la sensualité, et une autre forme : la relation particulière qui les unit pendant les répétitions…

En parallèle, il décrit les doutes de l’adolescence, le manque de confiance en soi, le regard critique sur les parents qui ne pensent trop souvent qu’à eux, et la limite proche qui existe entre l’amour pour le père et la détestation pour ce qu’il doit subir, le tout dans une visite de la pièce de Shakespeare et son côté actuel malgré une langue quelque peu désuète.

C’est un peu long au démarrage, mais une fois le rythme de lecture trouvé, c’est un régal, on s’attache à ce héros très discret, trop discret, celui dont on dit qu’il est noyé dans la photo de classe, à tel point qu’on ne se souvient plus de lui des années plus tard.

C’est le premier livre de David Nicholls que je lis et il m’a vraiment beaucoup plu, auteur à suivre donc. Il nous propose à la fin une playlist que l’on peut télécharger : de Gloria Gaynor « I will survive », à Madness, Whitney Houston, George Michael… et même les Spice Girls….

Un grand merci à NetGalley et aux éditions Belfond qui m’ont permis de découvrir ce roman plein de sensibilité et la belle plume de son auteur.

#Davidnicholls #NetGalleyFrance

8/10

L’auteur :

Né en 1966, David Nicholls a d’abord envisagé une carrière d’acteur avant de se tourner vers l’écriture. Il a été scénariste pour la télévision, signant notamment les adaptations BBC de Beaucoup de bruit pour rien et de Tess d’Urberville et, pour le cinéma, de la pièce de Sam Shepard, Simpatico, et des Grandes espérances de Charles Dickens. Récemment, il a remporté un BAFTA pour Patrick Melrose, une mini-série inspirée des romans de Edward St Aubyn, qui lui a également valu une nomination aux Emmy Awards.

Il est l’auteur de Pourquoi pas ?(2012), Pour une fois (2013), et de Nous (2015). Son troisième roman, Un jour (2011) a reçu un très bel accueil lors de sa sortie et s’est vendu en France à plus de 400 000 exemplaires. Il a également fait l’objet d’une adaptation cinématographique à succès, avec Anne Hathaway dans l’un des rôles principaux.

Extraits :

On était une matière plastique, malléable, et on avait encore le temps de tester et revoir notre écriture, nos convictions politiques, notre façon de rire, de marcher ou de nous asseoir, avant de durcir et de nous figer.

Ma grande occupation cet été-là serait d’éviter mon père. J’avais appris à évaluer son état d’esprit au bruit qu’il faisait et à le pister à la manière d’un chasseur.

L’ennui était un état naturel pour nous, mais la solitude était taboue, et tout en pédalant sans les mains, je tentais d’afficher un air mystérieux et solitaire, l’air d’un franc-tireur qui n’a besoin de personne. Sauf, que chercher à ne pas paraître seul, quand vous l’êtes, cela exige un grand effort ou, à l’inverse, de paraître heureux quand vous ne l’êtes pas.

Mon désœuvrement m’avait poussé, pour la première fois de ma vie à me réfugier dans la lecture.

Ces romans que je transportais chaque jour dans mon sac sont bientôt devenus mon rempart contre l’ennui et mon alibi pour rester seul.

Lorsqu’on raconte de telles histoires – des histoires d’amour – il est difficile de ne pas donner un sens et un caractère inéluctable à des évènements en réalité innocents et fortuits. De les repeindre aux couleurs du romantisme.

Ce n’était pas juste l’amour qui s’enfuyait entre eux, c’était aussi le respect et la compréhension, et on ne pouvait rien y faire.

J’aurais parfois aimé qu’il se montre plus joyeux, qu’il fasse cet effort pour moi. La tristesse et l’angoisse sont contagieuses, et, à seize ans, j’avais assez de soucis comme ça.

Le plus grand mensonge véhiculé sur la jeunesse est qu’elle serait totalement insouciante. Bon sang, personne ne se souvient-il de rien ?

La musique, les livres, les films, et même l’art semblaient avoir un pouvoir accru à notre âge. Comme une amitié, ils pouvaient changer votre vie, et quand j’avais le temps… quand j’aurais le temps, je m’ouvrirais à de nouvelles choses.

Il m’effrayait, et quand je n’étais pas effrayé, j’étais tout simplement furieux. Furieux qu’il me prive de ma tranquillité d’esprit et de mon pouvoir de concentration à l’heure où ils m’étaient le plus nécessaires…

Je n’étais donc pas un garde-malade. Plutôt un garde-rancune. Le terme existait-il ? « Garde-rancune à domicile ».

A côté de moi se trouvait la fille la plus intelligente, la plus géniale, la plus éblouissante que j’aie jamais rencontrée, l’antidote à tout ce qu’il y avait de pourri dans mon existence.

Mais l’amour est barbant. C’est quelque chose de déjà vu, de banal pour un observateur extérieur. Idem avec le premier amour, qui n’est qu’une version brouillonne et boutonneuse. Shakespeare devait le savoir…

Lu en juin 2020

« Émile et Mado, enfants dans la Résistance » de Sophie de Mullenheim

Ah, les nuits de la pleine lune et leur cortège d’insomnies !!! quitte à ne pas fermer l’œil autant en profiter pour lire ! le roman dont je vous parle aujourd’hui a été mon compagnon durant ces heures qui n’en finissaient pas et je l’ai dévoré…

Résumé de l’éditeur :

Paris, printemps 1942.

Depuis l’emprisonnement de son père par les Allemands dès le début de la guerre, Émile, 12 ans, vit seul avec sa maman et leur chien Puce. Les conditions de vie sont difficiles à cause de l’occupation et du rationnement. La mère d’Émile qui est infirmière doit travailler double. Mais ce soir – ou plutôt cette nuit – Émile est inquiet. Il est deux heures du matin et sa mère n’est toujours pas rentrée.

« Si un soir, je ne reviens pas, l’a prévenu sa maman, tu dois quitter immédiatement Paris et aller chez ma sœur Jeanne à Chartres. Prends Puce avec toi et quelques bagages que tu glisseras dans la sacoche de ton père. Il y tient beaucoup. J’aimerais qu’il la retrouve à son retour. Ensuite, va. Et ne te retourne pas. »

Fidèle à sa promesse, Émile prend la route de Chartres. En chemin, il rencontre Mado – Madeleine de son vrai nom –, 12 ans elle aussi qui tente de passer en zone libre.
Les deux enfants sympathisent et font la route ensemble. A deux, il est plus facile d’affronter de multiples dangers…

Ce que j’en pense :

Il fait nuit, Émile entend des bruits bizarres dans le couloir, c’est Puce sa chienne qui l’a réveillé par ses grognements. Et sa mère, infirmière de nuit, qui n’est pas rentrée ! que se passe-t-il ? La peur monte, il a les yeux rivés sur la pendule, les heures défilent et elle ne rentre toujours pas… Ils vivent tous les deux dans ce petit appartement sous les combles, son père, officier a été fait prisonnier en 1940. Il se répète les consignes de sa mère : il doit fuir en emmenant le strict nécessaire dans la sacoche en cuir de son père et aller à Chartres retrouver la sœur de sa mère.

En même temps, Madeleine s’apprête aussi à prendre le train pour Chartres car ses parents ont été arrêtés, dénoncés par une voisine trop polie pour être honnête ! une autre voisine, toujours discrète a pu la recueillir et lui procurer des papiers. Elle récite sans arrêt sa nouvelle identité.

Sur le quai de la gare, le couple qui devait venir la chercher n’est pas là. Elle attend jusqu’à la dernière minute mais panique en apercevant des soldats allemands, lâche sa valise qui se renverse. Au même moment, Émile se fait refouler car les chiens ne sont pas autorisés dans les trains. Ils partent à pied, longeant la Seine, mais Chartres est plus loin qu’Émile ne le pensait.

On va suivre ces deux enfants, âgés de douze ans à peine, dans leur périple tandis que les miliciens cherchent à tout prix à récupérer des documents appartenant à la mère d’Émile, mettant tout à sac sur leur passage, y compris chez le propriétaire de l’appartement, Monsieur Carbonnet qui leur tient tête du haut de ses quatre-vingt et quelques années.

Ce roman raconte l’histoire d’une belle amitié qui s’installe entre deux enfants qui fuient Paris, pour se mettre à l’abri, alors que résonnent les bottes des Allemands et celles des collabos pas toujours très futés mais avides de promotion… on découvre aussi la vie sous l’Occupation, les tickets d’alimentation, le marché noir, la difficulté de faire confiance quand on a été trahi, la méfiance qui s’installe…

Sophie de Mullenheim décrit très bien cette époque, ses bassesses mais aussi les belles rencontres, la Résistance qui s’organise à tous les niveaux (comme le colibri cher à Pierre Rabhi, certains font leur part comme la mère d’Émile, sa tante alors que d’autres trahissent.

C’est une histoire assez courte qui s’adresse à un public jeune pour lui faire comprendre tout ce qui s’est passé à l’époque, et en tant qu’adulte d’âge mur, elle m’a bien plu. L’écriture est belle, l’auteure ne nous noie pas dans des détails qui pourraient distraire son public, mais reste constamment dans l’action et l’émotion. La couverture est splendide.

Un grand merci à NetGalley et aux éditions Fleurus qui m’ont permis de découvrir ce roman et de faire la connaissance de la plume de Sophie de Mullenheim que je ne connaissais pas et j’ai bien envie de me plonger dans ses livres dont le nombre est impressionnant…

#ÉmileetMadoenfantsdanslarésistance #NetGalleyFrance

9/10

L’auteure :

Sophie de Mullenheim écrit des livres pour enfants : des livres de jeux, puis des livres documentaires, des contes, pour arriver au roman avec « FBI et les neuf vies du chat » en 2007.

On lui doit, « Rosa Parks, la femme qui osa dire non », « Sissi impératrice rebelle », des collections comme « Les sœurs Espérance » ou « Les demoiselles chéries » et tant d’autres. Sa bibliographie est impressionnante.

Extraits

Madeleine ferme les yeux et récite une nouvelle fois tout bas : « Je m’appelle Madeleine Germain. Je suis née le12 mars 1931 à Juvisy-sur-Orge dans l’Essonne. Je m’appelle Madeleine Sarb… » la jeune fille s’arrête, se mord la langue puis recommence…

Alors, Émile descend sans faire de bruit l’escalier de service que personne n’emprunte jamais hormis sa mère et lui. En passant devant la porte de la cuisine de l’appartement de monsieur Carbonnet, il hésite un instant. Il aimerait tant dire au revoir au vieil homme et voir une dernière fois son visage si couvert de rides qu’il ressemble à une carte du monde. Mais le garçon sait que sa mère ne voudrait pas qu’il s’arrête. Elle lui a dit de partir sans se retourner. Monsieur Carbonnet risquerait de le retenir et de le convaincre de ne pas y aller. Quand Émile ouvre la porte qui donne sur la rue, celle-ci lui paraît inhospitalière tout-à-coup. Jamais il ne s’est trouvé ainsi livré à lui-même…

La perspective de se retrouver si loin de chez elle terrifie Madeleine mais elle ne peut pas rester à Paris. Pas après ce qui est arrivé à ses parents.

La jeune fille scrute une dernière fois la gare, à la recherche du couple qui doit s’occuper d’elle. Au lieu de cela, son regard accroche un groupe de soldats allemands qui patrouillent avec un chien. Ils cherchent certainement quelqu’un. Madeleine s’affole…

Monsieur Carbonnet regrette juste de n’avoir pas résisté davantage aux Allemands et à leurs collaborateurs. Il a trouvé savoureux tout à l’heure de leur faire monter à pied les six étages…

Madeleine lui emboite le pas sans poser de question. A deux, ce sera plus facile, a-t-il dit. Il a raison. Sans lui, de toute façon, elle n’a plus rien. Elle est toute seule et cette pensée la terrorise. Au moins, Émile a l’air gentil et sa chienne aussi.

Lu en juin 2020

« Le libraire de Cologne » de Catherine Ganz-Muller

Je vous parle aujourd’hui d’un livre que j’ai eu la chance de recevoir via une opération masse critique spéciale de Babelio et dont la couverture est splendide :

Quatrième de couverture :

Quand l’amour des livres et plus fort du la haine…

Cologne, Allemagne, 1934.

Poussé à l’exil par les lois anti-juives, le libraire Alexander Mendel est obligé de partir vivre en France avec sa famille. Il confie se Librairie à son jeune employé : Hans Schreiber.

Par fidélité à son mentor et par haine du régime nazi, Hans décide de se battre pour que la Librairie survive dans cette période tragique, malgré les menaces et les bombes.

Le combat d’un libraire, héros d’un pays où règnent la haine et la terreur, qui tente de faire triompher les livres… et la liberté.

Ce que j’en pense :

Nous sommes le trente-et-un décembre 1933 à Cologne. Ludwig Brodski arrive en retard au réveillon chez son oncle Alexander Mendel et sa tante Clara. Il doit y retrouver tous les membres de la famille, sa mère Martha, la sœur d’Alexander comme tous les ans. Mais cette année, l’ambiance n’est pas à la fête, même si Clara a mitonné un bon repas.

Hitler a été nommé chancelier, son parti étant arrivé en tête (42% des voix) et la propagande nazie bat son plein via son ministre Goebbels et l’antisémitisme aussi.

La discussion s’installe : doit-on rester en Allemagne et résister, ou se résoudre à l’exil, Paris, la Palestine, l’Amérique… une chose est sûre, chacun sent bien que c’est le dernier réveillon en famille.

Alexandre finit par vendre sa Librairie à son employé, Hans Schreiber, à qui il a enseigné depuis des années, la littérature : il lui a fait connaître toutes sortes de livres, et partagé son amour des auteurs de tous les pays, de l’Antiquité à ce jour. Dans sa Librairie, il avait installé une partie bibliothèque, une collection de livres anciens protégée sous clés. Tout avait été conçu pour que tout le monde puisse lire…

Il sait que Hans fera tout son possible pour préserver la Librairie. Celui-ci les accompagne jusqu’au train qui les emmène vers la France, le pays des droits de l’homme et de la liberté… Leur fille Liese va entretenir une relation épistolaire avec lui, afin de ne pas perdre le lien précieux qui les unit.

Mais, même si Hans n’est pas juif, la Librairie est vue d’un mauvais œil par les nazis : pour eux, c’est un magasin juif et on lui n’épargnera rien : les descentes pour confisquer tous les livres qui ne plaisent pas au régime, pour saccager tout.

Ce roman nous livre le combat d’un homme pour sauver, au péril de sa vie, la Librairie, les livres, et à travers eux, la liberté de penser, dans un régime où la propagande lobotomise tout le monde (enfin beaucoup de personnes) et entretient la haine via la désinformation.

Il y a des passages très forts sur la nuit de cristal : comment Hitler a manipulé les gens pour qu’ils aillent tout briser. Hans a été un résistant aux nazis, comme son voisin de palier, Herr Becker, un vieux professeur de français, avec qui il pouvait parler, échanger en écoutant en douce la BBC, ou le vendeur de glaces. Des gens ont tenté de résister, tel Ludwig Brodski, par exemple, et malgré la clandestinité….

Catherine Ganz-Muller, s’adresse aux adolescents, et montre de très belle manière la désinformation, la réécriture de l’Histoire, car la perte de la guerre en 1918 a traumatisé beaucoup d’Allemands, ainsi que la crise économique. Elle a construit son récit de manière chronologique pour que les ados comprennent bien comment les faits se sont enchaînés, comment l’antisémitisme a gagné les cerveaux : c’est tellement plus simple de désigner un coupable et c’est toujours en vogue…

Elle évoque la vie des Colonais, dans toutes les périodes : l’euphorie des nazillons, les oriflammes qui tapissent la ville, mais aussi les retombées quand le régime commence à battre de l’aile, les bombardements de Cologne, le refuge dans les abris.

Catherine Ganz-Muller évoque aussi tous les auteurs chers au cœur du libraire et à celui du lecteur : Herman Hesse, Thomas Mann, Tolstoï, Balzac, Stendhal, Dostoïevski et bien d’autres… et les lettres échangées entre Liese et Hans sont des moments plus légers pour permettre au lecteur de reprendre son souffle et de continuer à espérer.

A la fin du roman, elle fait un récapitulatif de la chronologie de l’arrivée des nazis au pouvoir jusqu’à la fin de la guerre et elle propose un glossaire, où elle revient sur des thèmes qu’il faut hélas encore marteler de nos jours : autodafés, pogroms, Shoah, déportation, camps…

Cette Librairie a bien existé et le nom de Hans a été modifié, bien-sûr mais certains personnages ont existé, tel Herr Denker, le marchand de glaces qui aide Hans à transporter ses livres pour éviter leur destruction. Et côté français, la vie ne sera pas rose non plus pour Alexander…

Passionnée par cette période de l’Histoire, ce livre me tendait les bras. Bien-sûr, je n’ai rien appris de plus sur les évènements tragiques, mais j’ignorais l’existence de cette Librairie et j’ai eu beaucoup de plaisir à le lire.

Un immense merci à Babelio, et aux éditions Scrineo qui m’ont permis de découvrir ce roman lors qu’en opération masse critique spéciale, roman qui mérite d’être lu par un maximum d’ados pour ne jamais oublier…

Un petit mot sur les éditions Scrineo, que je découvre avec ce roman et qui propose des titres très intéressants parmi lesquels :

« Un ado nommé Churchill », et « Pour qui meurt Guernica de Sophie Doudet, « L’enfant d’Oradour » de Régis Delpeuch ou encore « Rosa Parks, elle a dit non au racisme » de Florence Lamy par exemple pour expliquer l’Histoire et les personnalités qui l’ont marquée, aux ados. Une collection mythologie est en cours…

https://www.scrineo.fr/

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L’auteure :

Après des études de lettres, Catherine Ganz-Muller devient monteuse dans le cinéma.
Passionnée de littérature, elle ouvre une librairie à Paris puis se tourne vers le métier de bibliothécaire. Elle a écrit des articles pour des magazines, des nouvelles, des romans pour les adolescents, un roman pour enfant lauréat du Prix Chronos 2010, et des romans pour adultes.

http://www.catherineganzmuller.fr/

Extraits :

Aussi loin qu’il remonte dans son enfance, les souvenirs, bons ou mauvais, sont toujours accompagnés des siens, comme ils sont encore là dans sa vie de jeune homme. Ludwig ne peut concevoir un avenir sans cette famille, rassemblée ce soir de réveillon dans l’appartement de la Budengasse.

En fait, beaucoup d’Allemands, déçus par la défaite de 1918, puis victimes de la crise, se sont sentis abandonnés par le gouvernement Hindenburg. Ils se sont tournés vers le national-socialisme qui leur a fait croire qu’il serait un régime fort, capable de résoudre tous leurs problèmes. Ils sont maintenant à leur merci.

Ils fuient. La famille Mendel fuit devant les lois promulguées par l’état nazi. Les Mendel sont aussi peu pratiquants d’une religion que le sont bien des Allemands. Mais pour Hitler, avant d’être Allemands, ils sont juifs.

Hans a du mal à maîtriser son émotion. Le cœur serré, les larmes aux yeux, il traverse une ville qui a changé de visage. Il lui semble qu’elle est devenue totalement grise, écorchée par la seule couleur qui émerge comme autant de balafres : le rouge des oriflammes nazis. Le cœur de Hans bat de plus en plus vite. Des images de la librairie saccagée brouillent sa vue.

La chaussée n’est plus qu’un cimetière de vies brisées. La police tente de faire circuler les véhicules dans un dédale d’objets hétéroclites. Hans entend tout au long de son parcours les commentaires haineux à l’encontre des juifs. Beaucoup ont été arrêtés et déportés dans des camps.

Deux jours plus tard, la presse appellera cette nuit du 9 novembre, la « nuit de cristal », Reichkristallnacht. Jusqu’à ce jour, le cristal était pour Hans un verre pur et limpide, donnant un son mélodieux. Il n’ose pas croire que l’épuration de tant de juifs soit associée à la pureté dans l’esprit des nazis !

« L’homme ne vit pas seulement sa vie personnelle comme individu, mais consciemment ou inconsciemment, il participe aussi à celle de son époque et de ses contemporains » Thomas Mann dans la montagne magique.

Que suis-je au milieu de tout cela ? se demande-t-il. Un jeune libraire qui tente de sauver quelques livres pour l’amour d’un homme qui n’est même pas mon père. Pour la passion de la littérature, de cette liberté incomparable qu’elle offre aux lecteurs. Et pour tenir tête aux nazis.

Le quartier est en feu. Hans se précipite dans un abri avec les autres locataires de son immeuble. Transis de peur, ils y passent une nuit d’angoisse. Le silence qui règne entre les réfugiés de cet espace souterrain est plus terrifiant encore que le vacarme du dehors. « Ce silence, pense Hans c’est celui du déshonneur, celui de la fin d’une Allemagne qui s’est vendue au nazisme »

Le silence inonde les vestiges de la ville. Hans est sur le seuil de la Librairie. « Vivre sans espoir, c’est cesser de vivre ». Cette citation de Dostoïevski lui revient en mémoire en regardant les Colonais reprendre leur vie en main…

Lu en février 2020

« Entre pétales et épines de rose » de Lucie Farigoul

Je vous parle aujourd’hui d’un livre sur l’adolescence (plutôt que livre pour ados) que j’ai choisi pour sa belle couverture et en pensant faire une pause après des lectures superbes mais dures émotionnellement et cela a été moins simple que prévu :

Résumé de l’éditeur :

Maëlle est une jeune fille pétillante de 17 ans qui a tout pour être heureuse : une famille unie, un groupe d’amis formidable, un petit copain attentionné… Mais l’adolescence n’est pas une période facile et tout finit par basculer dans sa vie amicale, amoureuse, familiale… Comment l’adolescente va-t-elle réagir à cela ? Va-t-elle traverser les épreuves avec le sourire, comme elle le faisait auparavant ? Sera-t-elle toujours aussi sûre que la vie est belle ?

Ce que j’en pense :

Tout va bien pour Maëlle ; elle a dix-sept ans, une famille heureuse et équilibrée : ses parents, Laurent et Caroline, travaillent, elle a deux frères plus jeunes Thomas et Gauthier, et une petite sœur, Agathe, est venue se rajouter à la famille des années plus tard.

Elle a un groupe d’amis solide : Romain, Florian, Camille et Charlotte, soudés depuis longtemps, on les a d’ailleurs surnommés « le club des cinq » …

Tout roule donc, en apparence du moins. A la rentrée scolaire, Maëlle n’est pas dans la même classe que la bande, et peu à peu, s’isole, sans que les autres s’en aperçoivent. Elle interprète parfois de travers et surtout elle est très déstabilisée par les attentats du Bataclan.

Cette ado, toujours joyeuse, dans l’empathie en permanence, (trop) se referme sur elle, revoit les JT en permanence, fait des recherches sur l’identité des personnes qui ont trouvé la mort. Cela tourne peu à peu à l’obsession, elle ne retient plus que ce qui est négatif, se pose des questions sur la vie, la mort, la spirale infernale se met en marche.

Pour compléter le tout son père a un malaise cardiaque et elle veut continuer à protéger ses frères et sœur, accrochant au mieux un sourire de circonstance sur ses lèvres.

J’ai trouvé cette adolescente très touchante, sur laquelle tout le monde se reposait, y compris ces parents qui n’ont rien vu ou voulu voir à part les résultats scolaires qui devenaient catastrophiques, le bac étant au bout.

Lucie Farigoul décrit très bien le passage difficile de l’adolescence, les ravages que tous les attentats ont pu causer sur une personnalité fragilisée, sur laquelle reposaient des choses qui incombaient plus aux parents (elle s’occupe de la petite sœur comme une mère, surveille les petits-frères…). Elle décrit aussi la place de l’information dans la vie de tous les jours, JT, Internet… Tout ceci est anxiogène et peut entraîner une culpabilité à être heureux, à être survivant quand d’autres sont morts.

Maëlle sait qu’elle ne sera plus jamais la même, après ce qui lui est arrivé, et que cela aura des conséquences, elle aura appris.

J’ai beaucoup aimé ce roman pour ados qui s’adresse aussi aux adultes, et même s’il commence un peu trop en romance, à mon goût, l’auteure affine de plus en plus sa « démonstration » et fait réfléchir.

Un grand merci à NetGalley et aux Editions Plumes de Marmotte qui m’ont permis de découvrir ce roman et son auteure.

#Entrepétalesetépinesderose #NetGalleyFrance

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L’auteure :

Lucie Farigoul est diplômée à l’Académie ESJ (École supérieure de journalisme) Lille (2016-2019).

En 2017, elle publie son premier roman « À jamais dans mon cœur », un livre où l’amour filial et la passion pour les chevaux sont omniprésents. Lauréat de Haute-Normandie au Prix de l’Auteur Sans Piston 2018 (organisé par Edilivre).

Extraits :

Ils partaient tous du principe qu’un ami devait nous faire voir les choses en face, même si cela ne faisait pas toujours plaisir. Un ami était présent pour nous faire voir les bons côtés de nous-mêmes, comme les mauvais et c’est ainsi qu’on avançait. Beaucoup les enviaient, mais personne d’autre n’arrivait à atteindre ce résultat.

Lorsqu’un événement malheureux survient, nous avons trois choix : le laisser définir notre vie, le laisser nous détruire, ou s’en servir pour devenir plus fort…

Elle assistait aux cours, mais sans vraiment écouter, puis rentrait chez elle où elle passait son temps à s’occuper d’Agathe. Les médias continuaient de parler de l’attentat. Il y avait eu quatre-vingt-treize morts et cent vingt blessés dont la vie de certains était encore en jeu. Maëlle n’arrêtait pas d’y penser. Elle se disait qu’on ne pouvait jamais être sûr d’être en sécurité, que tout pouvait arriver, que la vie pouvait nous arracher notre famille, nos amis d’un instant à l’autre et nous briser à jamais.

Elle se demandait comment les proches des victimes faisaient pour supporter cela. Elle pouvait voir la souffrance qu’ils avaient. Et elle se demanda pourquoi eux et pas elle ? Elle se sentit coupable parce que pendant que des gens souffraient un peu partout dans le monde, elle, vivait sa vie tranquillement, était heureuse et elle se dit qu’elle n’avait pas le droit.

Personne ne comprenait que si elle ne parlait pas, si elle faisait la tête, c’est qu’elle n’allait pas bien. Elle avait envie que les autres la rattrapent quand elle les envoyait balader, qu’ils insistent pour savoir ce qui n’allait pas, mais ils n’en faisaient rien. Maëlle savait très bien qu’elle s’isolait elle-même, mais elle n’avait plus le courage de se battre.

C’était tellement inimaginable que la personne avec qui on passe toute notre vie ne soit plus. C’était tellement cruel que des enfants de cet âge dussent grandir sans leur mère. Personne ne pourra la remplacer. Ils ne pourront jamais oublier l’accident.

C’était cela la vie en fait ? On en q qu’une, pensait Maëlle, et on la bousille, on est comme prisonnier alors qu’il faudrait faire ce que l’on veut, découvrir le monde, faire des expériences… C’est tellement triste de mourir en ayant toujours fait la même chose, en ayant jamais bougé pour voir d’autres pays.

Elle voulait être libre de faire ce que bon lui semblait. Elle voulait découvrir le monde et ne pas être réduite à un métier dans le but de gagner de l’argent pour se nourrir, se loger. Pour survivre en fin de compte. C’était un cercle vicieux et elle ne voulait pas tomber dedans.

La vie ce n’est pas d’attendre que les orages passent, c’est d’apprendre comment danser sous la pluie.

Elle était déterminée à redevenir comme avant, mais elle savait que cela allait être compliqué et elle sentait qu’au fond d’elle, quelque chose s’était brisé.

Laisse ton sourire changer le monde mais ne laisse pas le monde changer ton sourire.

Lu en février 2020

« L’impératrice Joséphine, plus qu’une reine » de Stéphanie Lepers et Bettina Schopphoff

Petit intermède douceur aujourd’hui avec ce livre choisi sur Babelio lors de l’opération Masse critique jeunesse :

 

Les Superflus de l'Histoire de limperatrice Josephine

 

 

Quatrième de couverture

 

Marie-Joseph-Rose de Tascher de La Pagerie, c’est MOI !

Rose de Beauharnais et Joséphine Bonaparte… C’est MOI aussi !

Mais bizarrement, on me connaît sous le nom de Joséphine de Beauharnais… Pourtant, je ne l’ai JAMAIS été…
En revanche, je suis sans conteste L’IMPÉRATRICE JOSÉPHINE, l’épouse de NAPOLÉON 1er (ce qui n’est pas une mince affaire !) et une maman attentionnée.
Accessoirement, j’ai été BOTANISTE, prisonnière, grimpeuse et patineuse, diplomate et collectionneuse, un peu contrebandière, si nécessaire.
J’ai eu une vie sacrément bien remplie et des anecdotes, j’en ai des tas à partager !

 

 

Ce que j’en pense

 

Toujours autant branchée Histoire, ce livre m’était prédestiné et surtout j’ai réussi à l’avoir, ne m’étant pas réveillée assez vite (être connectée à 7h sur l’ordinateur pour participer, cela me coûtait beaucoup…)

Stéphanie Lepers nous raconte donc la vie assez extraordinaire de Marie-Joseph-Rose de Tascher de La Pagerie, née le 23 juin 1763, en Martinique, son enfance dans la plantation de canne à sucre (elle en a tellement mâché que sa denture est devenue catastrophique.

Un jour, un ouragan dévaste tout, la propriété est en miettes et tandis que tous regarde le désastre, une voyante Eliama lui prédit qu’un jour elle deviendra une femme très puissante, plus qu’une reine.

Son père la marie à Alexandre de Beauharnais, qui devait initialement épouser Catherine-Désirée, la sœur de celle qu’on appelait encore Yeyette. Mais, la sœur est décédée de tuberculose.

C’est le départ pour Paris, un mariage expédié avec un aristocrate quelque peu volage dont elle va avoir deux enfants : Eugène et Hortense. Mais nous sommes en 1794, il ne fait pas bon être aristo, et notre vicomte va y laisser sa tête….

Elle finit par rencontrer Napoléon Bonaparte qui l’épouse et décidera que son prénom sera désormais Joséphine.

Je n’insiste pas plus sur son destin, pour m’arrêter sur ses « folies » : le Château de Rueil Malmaison, (très bien dessiné) où elle va faire construire une gigantesque serre pour faire pousser toutes les plantes, arbres de son pays natal qui lui manque tant.

On connaît la vie un peu légère de « la veuve », elle aime les belles choses : vêtements, bijoux, comment assortir 60 étoles avec 600 robes par exemple, comment améliorer son teint, sa peau…

Stéphanie Lepers nous présente des pages avec données historiques ou de l’époque, qui se passent en même temps que les dates importantes dans la vie de Joséphine, ce qui permet de tout bien resituer dans le temps (n’oublions pas que c’est un livre pour la jeunesse) ce qui permet de découper en petits chapitres toute l’épopée de la Belle.

Il faut noter au passage, qu’elle a été Impératrice, épouse de Napoléon 1er et grand-mère de Napoléon III, fils de sa fille Hortense de Beauharnais.

Les dessins de Bettina Schopphof sont magnifiques, et dans les textes certains mots son en majuscule, en caractères gras avec des polices différentes pour donne vie aux mots en question.

J’ai beaucoup aimé ce livre, qui est magnifique, et qui peut permettre d’apprendre tout en s’amusant. Superbe travail, côté texte, comme côté dessins, ce livre se tient dans les mains, comme un bijou.

Il est publié dans la collection « Les superflus de l’Histoire », qui propose un livre sur Napoléon 1er ;

Je remercie infiniment Babelio et les éditions « Les superflus » qui m’ont permis de découvrir cet album plein de couleurs d’énergie et d’humour qui fait un joli cadeau de Noël.

http://www.bettina-schopphoff.fr/

 

Extraits

 

l'impératrice Joséphine 1

 

 

l'Impératrice Joséphine 2

 

 

L'impératrice Joséphine 3

 

 

l'impératrice Joséphine 4

 

Lu en décembre 2019