« L’île des souvenirs » de Chrystel Duchamp

Petit détour par le thriller, aujourd’hui, et une auteure que j’aime beaucoup, pour tenter de me réconcilier avec mon blog avec ce roman :

Résumé de l’éditeur :

Delphine, 22 ans, est étudiante à Lyon. Issue d’une famille bourgeoise, elle tente de s’affranchir de son éducation en écumant bars et boîtes de nuit. Au cours d’une soirée, elle suit une ombre mystérieuse jusqu’à sa voiture…

Quand elle se réveille dans une maison abandonnée, elle est menottée à un radiateur. Bientôt rejointe par une autre prisonnière.

L’enquête confiée à la Crim’ n’avance pas assez vite aux yeux de l’opinion. Sous pression, le capitaine Romain Mandier accepte l’aide d’un profiler et d’une psychotraumatologue.
Qui est cet homme en noir, qui hante les souvenirs confus d’une des captives ? Pourra-t-on exhumer de sa mémoire les fragments qui mèneront au coupable ?
Une fois de plus, Chrystel Duchamp surprend par une intrigue des plus originales, et un épilogue aussi glaçant que retors !

Ce que j’en pense :

Deux jeunes femmes sont enlevées et séquestrées dans une maison abandonnée, attachées, nourries le strict minimum. Delphine est étudiante, née dans une famille bourgeoise dont elle s’est échappée très vite, ne supportant plus son éducation rigide, lorsqu’elle rencontre Maëlis sur les bancs de la fac mais leur relation prend fin brutalement. Pourquoi les a-t-on enlevées que cherche le ravisseur ?

Maëlis seule réussit à s’échapper, mais sous l’influence des mauvais traitements elle est victime d’une amnésie post-traumatique. L’enquête s’avère compliquée faisant appel à différents « spécialistes » : profiler, psycho-traumatologue, entre autres, sans oublier un médecin légiste génial, sous la houlette du capitaine Mandier.

On découvre, au fil des pages, la vie et les fragilités de chacun des protagonistes, ce qui les rend attachants et proches de nous (la stérilité du couple Mandier, et la réflexion sur les spermatozoïdes fainéants ne peuvent que nous toucher.

Ce roman est une surprise qui m’a un peu déstabilisée au départ, de la part d’une auteure que j’aime beaucoup car on sort de la traditionnelle enquête pour aborder essentiellement l’aspect psychologique, décrivant avec précision les caractéristiques du travail de chacun avec moults détails, qui peuvent désarçonner au départ, mais très vite, on se laisse porter par l’enquête, la plume de l’auteure, à tel point qu’on ne sait plus qui manipule l’autre, le lecteur compris.

On pense avoir trouvé le coupable mais, Chrystel Duchamp sait tellement bien nous entraîner dans des recoins insoupçonnés que le dénouement éblouissant montre à quel point elle est capable de nous manipuler et jusqu’où elle peut aller et nous surprendre.

Une scène qui m’a beaucoup plu : Gabriel devant sa table d’autopsie chantant à tue-tête « Ra-ra, Rasputin, lover of the Russian Queen » tout en maniant son scalpel presque avec volupté…

Lecture addictive donc, en ce qui me concerne, une addiction sans conséquence par rapport à certaines tristement d’actualité.

Un grand merci à NetGalley et aux éditions L’Archipel qui m’ont permis de découvrir ce roman et de retrouver la plume de son auteure que j’aime décidément beaucoup : « Une autrice qui compte dans le polar ! », comme le dit si bien Gérard Collard

#Lîledessouvenirs #NetGalleyFrance !

8,5/10

Cofondatrice du collectif les Louves du Polar, Chrystel Duchamp est l’autrice, aux éditions de l’Archipel, de « L’Art du meurtre » (2020), « Un excellent polar addictif et original » (Le Parisien), « Le Sang des Belasko » (2021), un huis clos familial oppressant, et « Délivre-nous du mal » (2022), un suspense sombre et engagé.

Extraits :

Elle (Delphine) avait grandi dans le luxe matériel, mais dans une pauvreté affective et sociale extrême. Ma messe du dimanche constituait l’unique sortie hebdomadaire, l’occasion d’enfiler une robe bleu marine à col blanc et des souliers vernis qu’elle détestait.

Quand le catholicisme utilisait la métaphore de la poussière pour illustrer notre issue, il s’interdisait de préciser qu’elle était précédée d’une étape moins glorieuse : la décomposition de la chair, son odeur, sa couleur et son armée d’asticots…

L’être humain, influencé malgré lui par divers facteurs, fournissait des données à exploiter avec prudence. Les indices matériels, à l’inverse, quand ils étaient détectés et correctement analysés, constituaient des sources d’information objectives et fiables.

Romain préférait la métaphore de la « boule de neige ». D’abord petite, abritant en son centre la victime, elle prenait naissance au sommet d’une montagne avant de s’élancer le long d’un versant enneigé. Au cours de sa descente, elle grossissait, collectant preuves, témoignages et prélèvements jusqu’à former une énorme boule blanche. Quand l’enquête se concluait par une réussite ; l’amas de neige arrivait intact en bas de la montagne. Quand l’enquête se soldait par un échec, la boule explosait et l’avalanche détruisait tout sur son passage…

Pour les policiers, un cadavre était une victime à qui il fallait rendre justice ; pour les légistes, c’était une caverne d’Ali Baba de laquelle un maximum de trésors devaient être exhumés.

Le cerveau de l’être humain – quand il est malmené – partage dans un élan de générosité sa douleur avec les muscles, les organes et le système nerveux. Soldats de retour du front, victimes d’agression physique ou sexuelle, individus pris au piège de catastrophes naturelles, les TSPT touchaient toutes les strates de la société sans distinction. Les durs comme les faibles…

Fasciné par l’ascension des imposteurs, Erwann avait lu articles et essais les concernant. Il voulait comprendre comment un individu lambda, sans bagages scientifiques ni légitimité à s’exprimer sur un sujet, pouvait rassembler une foule de fidèles. Les réseaux sociaux étaient, en majeure partie, responsables de la popularité de ces savants de pacotille, qui disposaient d’un moyen de communication puissant, leur assurant de toucher des milliers – voire des millions – de personnes.

Lu en février 2023

« Aquitania » par Eva Garcia Saenz de Urturi

Je vous propose aujourd’hui, un retour dans le passé, une période que j’affectionne particulièrement puisqu’elle me permet de retrouver Aliénor d’Aquitaine, (et oui, cela faisait longtemps, je vois certains sourire …) :

Résumé de l’éditeur :

Compostelle, 1137. Le duc d’Aquitaine – convoitée par la France pour ses richesses – est retrouvé mort, le corps bleu et portant la marque de l’« aigle de sang », une effroyable torture normande. La jeune Aliénor, portée par sa soif de vengeance, épouse alors le fils de celui qu’elle croit être le meurtrier de son père – Louis VI le Gros, roi de France. Son objectif : décimer la lignée des Capétiens et imposer le sang aquitain. Mais, le jour des noces, Louis VI est assassiné à son tour.

Aliénor et Louis VII devront apprendre à se connaître pour infiltrer le royaume de France et démasquer l’instigateur de cette machination. Quel qu’en soit le prix à payer…

Un roman historique captivant qui traverse un siècle rythmé par la loi du Talion, l’inceste et les batailles, et nous fait découvrir les vies de celles et ceux qui vont forger la France d’aujourd’hui.

Ce que j’en pense :

De tout temps, l’Aquitaine a fait de l’ombre au Royaume de France, car elle était plus puissante et à la mort du père d’Aliénor, Guillaume X, en 1137, dans des conditions plus que louche sur le chemin de Compostelle, les appétits se sont aiguisés. Elle est l’héritière, petite fille du redoutable Guillaume le Troubadour et nièce de Raymond de Poitiers.

Le roi de France Louis VI le Gros, a envoyé des parents (à sa place) pour violer Aliénor qui n’est encore qu’une enfant pour pouvoir mettre le grappin sur ses possessions sans passer par le mariage. Son oncle Raymond a fait justice en les exécutant.

Aliénor décide de se venger en épousant le roi de France, Louis le Jeune, pour lui faire des enfants et ainsi perturber la lignée ; pour cela, il faut prouver que c’était la volonté de son père. A cette époque, un testament doit être tatouer sur la peau du défunt.  Qu’à cela ne tienne, elle fait réaliser un faux testament par un taxidermiste avec le sceau Semper Sursum (toujours viser plus haut), deus S entrelacés.

Tout au long du récit, on suit les traces des espions du duché d’Aquitaine, qu’on appelle les chats aquitains qui veillent ainsi sur Aliénor, sur les inimitiés, voire les haines qui l’entourent à la cours de France, de l’Abbé Suger au Troubadour qui mettra fin à sa première grossesse, sur la dévotion de Louis qui frise à l’idolâtrie, avec ses bains de sel pour nettoyer les fautes dont il se sent coupable, et aussi sur les liens qui unissent Louis et Aliénor qui ne se détestent pas autant qu’on ne pourrait le penser.

J’ai beaucoup aimé suivre à nouveau les traces de ma chère Aliénor, sa relation incestueuse, avec son oncle Raymond de Poitiers, prince d’Antioche, qu’elle vénère et qui lui sert de mentor, dans ses déplacements « sous haute surveillance » comme on dit, de nos jours, dans des marchés, plus ou moins nets, se renseignant sur les poisons, en quête de la vérité sur l’assassinat de son père.

Eva Garcia Saenz de Urturi donne la parole, tour à tour, à Aliénor ou a Louis, fait des allers et retours entre le présent et le passé, ce qui permet de bien cerner la psychologie des personnages, et ce qui les a poussé à commettre telle ou telle action.

L’auteure nous propose au passage une réflexion sur la vengeance, la loi du Talion, les rancunes tenaces, nous conduisant sur le chemin des croisades. Tout son récit est vivant, haletant ; elle réussit aussi bien dans le domaine du roman historique, où entre parenthèses, on ne l’attendait pas que dans ses polars historiques ou mythologiques, dont je vous rabats les oreilles depuis quelques temps : j’ai découvert Eva Garcia Saenz de Urturi avec Le Secret de la ville blanche et je suis tombée sous le charme à tel point, que dès qu’on me propose un titre de l’auteure je fonce, sans même lire le résumé.

S’il fallait choisir un évènement en particulier, j’opterai pour l’enlèvement d’Aliénor par le traitre Galeran, ou encore la culpabilité de Louis VII après la tragédie de Vitry-le-Brûlé qu’il a conquise mais près de 1500 personnes vont mourir brûlées dans l’église, où elles s’étaient réfugiées, drame qui va le hanter durant toute sa vie, malgré flagellations, silice, bains de sel qu’il va s’imposer pour expier…

Un grand merci à NetGalley et aux Fleuve éditions qui m’ont permis de découvrir ce roman et de retrouver la plume de son auteure dont j’attends avec impatience le prochain opus.

#Aquitania #NetGalleyFrance

Eva García Sáenz de Urturi est née à Vitoria en 1972 et vit à Alicante depuis l’âge de quinze ans. En 2016, Le Secret de la ville blanche, un thriller passionnant se déroulant dans sa ville natale, devient un best-seller avec plus de 200 000 exemplaires vendus en Espagne. Depuis, les droits de traduction ont été cédés dans de nombreux pays et une adaptation cinématographique a été réalisée. Elle a remporté en 2020 le prix Planeta.

Extraits :

J’ai cru mourir quand ils me déchirèrent les entrailles. Sous ce pont, j’ai appris que la chair d’une enfant doit céder parce que la détermination d’un homme à y pénétrer, elle, ne fléchit jamais. Ce fut un acte de guerre et le champ de bataille – lâches ! – le corps d’une fillette.  

Mon grand-père fut un formidable duc d’Aquitaine, qui n’avait cependant jamais craint, de son vivant, de rabaisser son propre fils. A présent que tous deux avaient disparu, je comptais bien rendre justice à mon père.

Voici ma confession, dis-je. Je vais éliminer les Capétiens. Je vais épouser le veule petit roi.

Entraînés dès leur plus tendre enfance, ils (les chats aquitains) étaient bien plus que les espions des ducs d’Aquitaine. Passés maîtres en matière de surveillance, de traque, de filature, ces filles et ces garçons gauchers, étaient sélectionnés pour leur discrétion et leurs qualités d’improvisation dans des situations complexes…

Nul n’est invulnérable, répondit Louis. Tuer quelqu’un ne pose aucune difficulté. Pour peu qu’on le veuille, il suffit d’un peu d’imagination, d’une occasion, de quelques sous… Il n’y a aucun mérite à tuer, à faire souffrir. Nous en sommes tous capables. Le mérite consiste au contraire à avoir de bonnes raisons de le faire, mais s’en abstenir. C’est cette force-là que j’admire, mais je crains fort d’être le seul.

Nous vîmes tout ce qu’il y avait à voir ? des corps raides comme le bois, les bras agrippant le vide. Des corps de toutes tailles, hommes et femmes, jeunes et vieux mêlés, sans vêtement ni chevelure pour les distinguer. Des corps chauves, nus, calcinés. C’est donc cela, la guerre, dis-je. Ce n’est pas ce que l’on voit au Conseil royal…

Si au lieu de la moitié de mes hommes, j’avais envoyé toutes les troupes au puits, peut-être aurions-nous peu éteindre le feu avant que… Non. Voilà qu’elles revenaient, ces ruminations. Les pensées répétitives, sans début ni fin. Par milliers, jour après jour. Toujours les mêmes. Encore. Ce soir encore je ne dînerai pas.

Héraclite disait qu’on ne se baigne pas deux fois dans le même fleuve, car il s’écoule et change constamment. Il en va de même pour le temps. Le passé ne se répète jamais, du moins jamais exactement de la même façon, et si les évènements venaient à se reproduire, ils ne concerneraient pas la même personne, mais une autre, plus âgée, dans des circonstances différentes.

« Aquitaine ». Le pays des eaux. Ces eaux qui fertilisaient nos champs. Loire et Garonne fécondaient nos récoltes, comme des dieux volages répandant, çà et là, leur semence…

Lu en octobre 2022

« Les rites de l’eau » d’Eva Garcia Saenz de Urturi

Plongée dans le monde fabuleux de la mythologie celte et ses mystères avec le livre dont je vous parle aujourd’hui :

Résumé de l’éditeur :

Pays basque espagnol, 2016. Un tueur en série s’attaque aux femmes enceintes. Comble de l’horreur, l’individu semble s’inspirer d’un rite ancestral consistant à brûler les victimes avant de les pendre par les pieds pour les immerger dans un chaudron datant de l’âge de bronze.

L’affaire est aussitôt confiée à l’inspecteur et profiler Unai López de Ayala, dit Kraken. Appelé sur la première scène de crime, ce dernier découvre, horrifié, que la victime n’est autre qu’Ana Belén Liaño, son amour de jeunesse.

Une révélation qui va replonger l’inspecteur vingt-cinq ans en arrière, dans un passé qu’il croyait profondément enfoui…

Ce que j’en pense :

Pleins feux sur le Pays basque espagnol en 2016 où l’on vient de découvrir une jeune femme morte dans de curieuses circonstances : elle est pendue par les pieds ? la tête immergée dans un chaudron. Très vite, il s’avère que le chaudron qui date de l’âge de bronze a été dérobé quelques temps auparavant.

C’est un chaudron de type irlandais, caractéristique de la culture celte. Si ma mémoire est bonne, celui-là a été exhumé en 1912, dans le massif de Pena Cabarga. Il date de l’âge de bronze, final, autrement dit, il a entre 2600 et 2900 ans.

L’enquête est confiée à l’inspecteur Unai López de Ayala, profiler de son état, dont nous avons fait la connaissance dans le précédent livre. Notre inspecteur, que l’on surnomme Kraken, a reçu une balle dans la tête, tirée à bout portant et qui lui a occasionné des dégâts, une aphasie de Broca en plus du stress post traumatique.

En arrivant sur la scène de crime, il constate que la victime est une amie de longue date, un amour de jeunesse, même avec laquelle il a participé autrefois à un camp de vacances. Ils étaient cinq adolescents sous la houlette d’un jeune professeur, Saul Tovar en juin 1992 ?

Plus tard on découvre une autre victime, tuée selon un rituel analogue, les deux victimes ayant partagé l’expérience alors que s’est-il vraiment passé durant ce camp de vacances ?

Qu’est ce qui peut bien pousser le meurtrier à s’en prendre à des femmes enceintes, ou à des futurs pères ? Les juge-t-il indigne d’être digne d’être parent ? Et pour quelle raison ?

Ce récit nous permet de voir fonctionner notre profiler : le meurtrier est-il psychotique ou psychopathe, par exemple ?

Il y avait un aspect messianique dans ce meurtre, comme si l’assassin accomplissait une mission en tuant rituellement Annabel Lee.  Ce qui évoquait aussi la psychose, la maladie mentale, la perte de contact avec la réalité. Bref, la folie.

L’auteure nous entraîne dans une enquête passionnante, avec des rituels celtiques compliqués, bien approfondis, nous envoyant au passage sur des fausses pistes, avec notre ami Kraken qui se remet mal de sa terrible blessure, rechignant à faire sa rééducation car plus rien ne semble l’intéresser. Mais l’assiduité à ladite rééducation étant la condition sine qua non, pour enquêter, en compagnie de sa coéquipière Estibaliz, alias Esti, il n’a plus le choix et ne tarde pas à succomber au charme de son orthophoniste, donc pas au bout de ses surprises…

Un clin d’œil au passage à la relation très forte et pleine de tendresse qu’entretient Kraken avec son grand-père : on aimerait bien avoir le même !

Ce thriller sort complètement des sentiers battus et fait remonter des traumatismes du passé, en nous faisant découvrir l’importance de la mythologie celtique en Cantabrique, ce qui m’a passionnée illico.

J’ai retrouvé le même plaisir qu’à la lecture du précédent roman d’Eva Garcia Saenz de Urturi : « Le silence de la ville blanche », avec des personnages récurrents (mais il n’est pas nécessaire de l’avoir lu pour déguster celui-ci). Il est aussi passionnant, m’a autant tenu en haleine car je l’ai lu presque en apnée. Un coup de cœur ce qui m’arrive rarement avec un ce style de roman. Je guette avec impatience déjà la parution du suivant en français….

Un grand merci à NetGalley et aux éditions Fleuve noir qui m’ont permis de découvrir ce roman et de retrouver la plume de son auteure.

#LesRitesdeleau #NetGalleyFrance !

Née à Vitoria-Gasteiz, Eva García Sáenz de Urturi est une romancière espagnole. En 1988, elle s’installe avec sa famille à Alicante, Communauté valencienne, où elle étudie plus tard l’optométrie à l’université d’Alicante. En 2012, elle publie son premier roman via Amazon.com « La saga de los longevos ».

Extraits :

Cette mise en scène était bien trop complexe pour un meurtre classique. C’était une drôle de façon de tuer quelqu’un. Comme si le tunnel de San Adrian était une faille temporelle menant à une époque où le rituel était aussi important que la mort elle-même. Il y avait quelque chose de totalement anachronique, hors du temps dans cette scène.

Le chaudron était un fétiche, un objet détourné de son usage pour devenir une arme. L’ensemble donnait une impression de contrôle ; les mains liées dans le dos pouvaient signifier la crainte que la victime se défende et bousille sa mise en scène sophistiquée.

En fait, reprit-elle après quelques instants de réflexion, je crois que même si tu nais avec une forte personnalité, un fort instinct de survie, que tu refuses d’être abusé… La réalité, c’est que quand tu es gosse, tu as un corps de vingt kilos, et que si un adulte décide de te faire du mal, tu ne peux pas l’en empêcher. Ça se passe tous les jours. Je veux dire, la violence intrafamiliale, les abus qui ne sont pas détectés, voire acceptés par des mères qui ferment les yeux…

J’étais troublé par les souvenirs qui affluaient en masse, de retour sur cette côte qui avait été si importante pour moi des années plus tôt. J’avais un compte à régler avec le dieu de cette mer, où j’évitais de me baigner depuis des décennies. La mer Cantabrique était pour moi synonyme de menace et de trahison…

C’est atavique, depuis des temps immémoriaux. Il y a toujours eu des rituels, des cérémonies, des prières… Trop de cultures et de religions successives pour que je vous les énumère, mais les lieux de culte, certains, en tout cas, les plus importants, subsistent, s’adaptent, demeurent. La Triple Mort s’inscrit dans un fond mythique indo-européen très ancien, dans l’origine est antérieure à l’âge de bronze. On la retrouve dans l’imaginaire celte du pourtour atlantique, jusqu’en Hispanie, et dans les traditions littéraires populaires d’origine celte en Galicie, dans les Asturies et en Cantabrie, mais pas seulement.

Si on regarde le Moyen-âge, un tiers de la population mourrait des mains d’un tiers… Nous sommes tous les descendants de ceux qui ont survécu à la période de l’enfance et qui ont peu se reproduire avant de mourir. Dans notre ADN, nous portons à la fois les gênes des victimes et ceux des assassins.

Toutes nos célébrations, toutes nos fêtes, toutes les traditions de vos villes et de vos villages sont issues de traditions bien plus anciennes. Depuis le Samhain celtique que les immigrants irlandais ont importé aux États Unis sous le nom d’Halloween et qui correspond à la nuit de Samain en Galice, mais aussi à la fête des moissons des Romains, jusqu’à la fête de la Saint-Jean qui célèbre le solstice d’été, et Noël qui correspond au solstice d’hiver. Les moments clés de l’année, dans la culture de nos aïeux – les solstices et les équinoxes – coïncident avec les grandes fêtes de l’Église catholique.

Lu en mai 2022

« Reine rouge » de Juan Gomez-Jurado

Nouvel intermède thriller aujourd’hui avec ce livre que j’ai choisi pour son titre, sa couverture et aussi pour connaître davantage les polars espagnols :

Résumé de l’éditeur :

Antonia Scott est spéciale. Très spéciale.

Elle n’est ni flic ni criminologue. Elle n’a jamais porté d’arme ni d’insigne, et pourtant, elle a résolu des dizaines d’affaires criminelles.

Avant de tout arrêter. Depuis un tragique accident, Antonia se terre dans un appartement vide et n’aspire qu’à une chose : qu’on lui fiche la paix.

C’était compter sans l’inspecteur Jon Gutiérrez. Missionné pour lui faire reprendre du service, il parvient à la convaincre d’étudier un dernier dossier, celui d’un assassin sans scrupule qui s’en prend aux héritiers des plus grandes fortunes d’Espagne. Sa particularité ? L’homme ne semble motivé ni par l’appât du gain, ni par le plaisir de tuer.

Un cas complexe auquel la police madrilène n’entend rien.

En un mot, le terrain de jeu favori d’Antonia Scott.

Ce que j’en pense :

Jon Gutiérrez, est un policier sur la touche depuis qu’il a voulu faire tomber un proxénète, violent, en lui mettant sur le dos un trafic d’héroïne, monté de toutes pièces. Dans son grand élan de générosité et d’empathie, il a expliqué son geste à la compagne de l’homme en question, mais cette dernière a filmé la scène sur son téléphone portable et la vidéo a été virale sur les réseaux sociaux. 

Un homme se présente pour son « entretien », Mentor, qui lui propose un étrange marché : rendre chez Antonia Scott, qui est en mode survie depuis trois ans, car son mari est dans le coma après avoir été agressé à leur domicile et Jon réussit à la convaincre de reprendre du service, tout sera effacé.

Après une prise de contact houleuse, Jon parvient à entraîner Antonia sur une scène de crime : dans une villa somptueuse, dans un quartier richissime, un jeune homme a été retrouvé mort sur le canapé, dans une position théâtrale un verre à moitié vide dans une main, qui contient en fait du sang. Le jeune a été totalement vidé de son sang. Aucune trace de violence dans la pièce, donc il a été tué ailleurs et mystérieusement sa disparition n’avait pas été signalé par la famille.

Un binôme se forme, avec deux personnalités très différentes : Jon est un policier, plutôt bien noté, un peu en marge des autres car il est homosexuel et ne s’en cache pas, vit avec sa mère alors qu’Antonia appartient à une organisation qui traque les criminels de façon peu orthodoxe, créée sous couvert de Bruxelles, l’Union européenne.

Antonia est surdouée et elle a été sélectionnée puis formée par Mentor pour son « unité d’élite » avec des méthodes dignes du KGB (ou de la CIA comme on veut !) privation de sommeil, tests à répétition à effectuer le plus rapidement possible, sinon décharge électrique… elle a des crises d’angoisse, des phobies et toujours une boite de « pilules » à portée de main pour canaliser l’anxiété et éviter d’être dépassée par ses pensées (comme des singes dans la tête comme elle dit !)

Cette enquête va nous emmener vers d’autres enlèvements dans des familles richissimes avec un mode opératoire curieux : celui qui enlève téléphone aux familles mais au lieu de leur demander une rançon, il leur demande quelque chose qu’ils ne peuvent pas faire car cela ternirait leur réputation : ou ils reconnaissent leurs « méfaits » ou la personne enlevée meurt dans un délai de 5 jours. Que vaut la vie d’une personne face à la réputation ?

L’enquête est rondement menée avec des scènes intenses (une course poursuite à 200 à l’heure, notamment), une rivalité entre les policiers chargés de l’enquête et notre duo Reine rouge (référence à Alice de l’autre côté du miroir, où la Reine rouge est obligée de marcher constamment pour pouvoir rester sur place), des informations qu’on n’échange pas, un journaliste qui veut la peau de Jon…

La reine rouge dit à Alice que dans son pays, il faut courir pour rester au même endroit, poursuit Mentor. Appliqué à l’évolution des espèces, ça signifie qu’il est nécessaire de s’adapter continuellement pour rester au niveau des prédateurs.

Au passage, l’auteur nous fait découvrir la vie personnelle, les traumatismes, de Jon et Antonia ce qui les rend attachants…

C’est la première fois que je croise la route de Juan Gomez-Jurado et ce ne sera sûrement pas la dernière, car l’idée est originale, l’histoire et le rythme d’une telle intensité que la lecture devient très vite addictive. J’adore être harponnée de cette manière par un thriller, et j’attends de pied ferme le second tome de la trilogie Antonia Scott car Reine rouge est le début de l’aventure.

Un grand merci à NetGalley et aux Fleuve-éditions qui m’ont permis de découvrir ce roman et son auteur dont j’ai hâte de retrouver la plume.

#ReineRouge #NetGalleyFrance !

8/10

L’auteur :

À 33 ans, Juan Gómez-Jurado est un journaliste et auteur espagnol. Il est chroniqueur dans « La Voz de Galicia » et « ABC », distribués en Espagne, et il participe à de multiples programmes radiophoniques et télévisés

Son premier roman, « Espion de Dieu » l’a propulsé vers la gloire internationale. Après le succès de son œuvre, il réalise son rêve et se consacre pleinement à l’écriture. Par la suite, il a publié les romans « Le contrat avec Dieu »

« Reine rouge » est le premier tome de la Saga Antonia  Scott.

Extraits :

L’esprit d’Antonia s’apparenterait plutôt à une jungle, une jungle grouillant de singes, qui bondissent à toute allure de liane en liane, en transportant des choses. Énormément de singes, portant énormément de choses, qui se croisent dans les aies en montrant les crocs.

Les flics ont un point commun avec les chiens : une année de service en vaut sept dans l’âme. 

Les séries télévisées ont donné une image si déformée du travail de la police scientifique que même les flics finissent parfois par se faire avoir et par croire aux miracles.

Selon la théorie du même nom, un « cygne noir » est un événement exceptionnel, d’une portée considérable, mais que ni la science, ni l’histoire ne permettent d’anticiper et qui ne peut être rationalisé qu’a posteriori. Comme le11 septembre, la crise financière de 2008 ou le retour des sacs-bananes.

Bref, la conclusion de l’étude en question a été que la création de l’Union européenne a engendré un monde nouveau. Sans frontières, sans douanes. Cinq millions de kilomètres carrés où les criminels peuvent circuler comme bon leur semble. Et des centaines de forces de police qui se tirent la bourre. C’est comme ça qu’est né le projet Reine rouge.

La police est lente, sûre, prévisible. C’est un éléphant qui fonce tête baissée vers son but et écrase tout sur son passage. Nous sommes autre chose.

Il avait du mal à croire en une Église qui ne croyait pas en lui, mais peu importait, car il était convaincu que Jésus lui-même ne croyait pas en sa propre Église. Antonia, naturellement, était une fervente athée. Une autre forme de religion, sans les inconvénients…

A elle seule, l’Espagne compte plus d’un million de psychopathes ? très peu d’entre eux iront jusqu’à tuer, la plupart mèneront une vie en apparence normale ? Heureux à leur poste de directeur des ressources humaines, de ministre, de patron de café. S’ils en viennent à faire du mal à quelqu’un, ce sera à petite échelle. Pas de quoi en faire un film …

Lu en janvier 2022

« Malgré tout »de Jordi Lafebre

Je vous parle aujourd’hui d’une BD qui m’attendait dans ma PAL depuis sa sortie; en effet, comment résister à tant de criques élogieuses? Je commençais à désespérer, la liste d’attente à la BM étant conséquente mais tout vient à point à qui sait attendre comme aimait à le dire ma grand-mère…

Résumé de l’éditeur :

C’est l’histoire d’un amour à rebours. Une passion platonique mais éternelle entre deux êtres. D’un côté, il y a Ana. Sexagénaire charismatique, ancienne maire tout juste retraitée, mariée et maman. Une battante au grand cœur qui impose le respect. De l’autre, il y a Zeno. Célibataire endurci, libraire proche de la retraite et doctorant en physique qui aura mis quarante ans pour terminer sa thèse. Un esprit libre et voyageur, aussi séduisant que mystérieux.


Au fil des années, ils ont tissé ensemble un amour impossible et intarissable. Tout en égrainant les excuses qui ont empêché qu’elle ne prenne forme, on remonte le temps de cette romance et de ses méandres… jusqu’à sa source.

Ce que j’en pense :

Ana, sexagénaire en pleine forme a rendez-vous avec Zeno avec lequel elle a eu une courte histoire d’amour trente-sept ans auparavant. Ils se retrouvent sur le pont qui domine la ville dont elle a été longtemps maire, et à la construction duquel elle a participé, ou du moins œuvré. La marche sous la pluie en mangeant des cookies qu’elle a elle-même préparés est attendrissante.

Tandis qu’elle se dévouait à sa ville, fondait une famille heureuse, Zeno de son côté voguait sur les mers, multipliant les amourettes peu compromettantes, et pour finir est revenu dans sa ville, et s’occupe vraiment de sa librairie qui a résisté au temps, et à la négligence de son propriétaire. 

Ana va-t-elle, maintenant qu’elle est à la retraite, donner une chance à cette relation platonique ? Peut-on se construire une nouvelle vie ? Les deux tourtereaux se sont écrit sans relâche des lettres qu’ils ne se sont jamais envoyées.

J’ai aimé cette histoire, les deux protagonistes sont tellement à l’opposé l’un de l’autre qu’on se laisse prendre au jeu avec plaisir. L’auteur a une idée originale, en commençant le récit par la fin : la scène des retrouvailles sur le pont et remonte ensuite dans le temps, et l’on termine sur le chapitre N° 1.

Il y a des scènes savoureuses : quand Ana se fait couper ses longs cheveux pour une coupe courte, pour paraître sous son meilleur jour devant Zeno essuyant au passage les commentaires acerbes de sa fille qui ne supporte pas l’idée qu’elle modifie son apparence pour un autre homme que son époux. Ou encore Zeno qui ne supporte pas bien le roulis et dont les camarades se moquent gentiment.

Les dessins sont beaux, Ana est très jolie, et Zeno pas mal non plus, cheveux au vent, tel un vieux loup de mer, et Jordi Lafebre nous offre toute une panoplie de nuances dans les couleurs en fonction de ce qui se passe dans le chapitre.

J’ai beaucoup apprécié cette BD, véritable intervalle de douceur entre deux lectures plus difficiles, une friandise ou un doudou à déguster au coin du feu ! une comédie romantique qui permet d’oublier ce qui se passe dans ce vaste monde en folie.

8,5/10

L’auteur :

Né à Barcelone, Jordi Lafebre est illustrateur et dessinateur de bande dessinée.
après avoir étudié la bande dessinée à l’école Joso de Barcelone et les beaux-arts à l’université de Barcelone, en 2001, il fait ses premières armes dans l’illustration et la bande dessinée.

Puis il rencontre Zidrou avec lequel il va travailler. On leur doit, entre autres « Les beaux étés » qui comporte 3 tomes et « Lydie ».

Extraits :

Tu dois me prendre pour une idiote. Comment ai-je pu croire que tu étais l’amour de ma vie alors que nous n’avons passé qu’une seule nuit ensemble il y a des années ?

Je t’ai cherché, je t’ai attendu et je t’ai pleuré…Jusqu’au jour où je me suis enfin convaincue que je ne reverrai plus jamais. Je veux aimer un homme qui restera à mes côtés.

Mes compagnons se moquent de moi. Ils disent que je suis atteint du syndrome du marin : je suis tombé amoureux d’une sirène que je n’ai vu qu’une seule fois, et je suis condamné à la chercher aux quatre coins du monde sans jamais la retrouver…

Lu en décembre 2021

« Le silence de la ville blanche » de Eva Garcia Saenz de Urturi

Je vous parle aujourd’hui d’un livre qui a été proposé sur NetGalley à la demande générale et insistante des lecteurs, libraires et autres :

Résumé de l’éditeur :

Dans la cathédrale de Sainte-Marie à Vitoria, un homme et une femme d’une vingtaine d’années sont retrouvés assassinés, dans une scénographie macabre : ils sont nus et se tiennent la main comme des amoureux alors que les deux victimes ne se connaissaient pas.

Détail encore plus terrifiant : l’autopsie montrera que leur mort a été provoquée par des abeilles mises dans leur bouche. L’ensemble laisse croire qu’il existe un lien avec une série de crimes qui terrorisaient la ville vingt ans auparavant. Sauf que l’auteur de ces actes, jadis membre apprécié de la communauté de Vitoria, est toujours derrière les barreaux. Alors que sa libération conditionnelle est imminente, qui est le responsable de ces nouveaux meurtres et quel est vraiment son but ?

Une certitude, l’inspecteur Unai López de Ayala, surnommé Kraken, va découvrir un tout autre visage de la ville.

Ce que j’en pense :

A Vitoria, dans le pays Basque espagnol, la veille de la Saint Jacques, a lieu la fête de la blouse, prélude à celles de la Vierge blanche (Virgen Blanca) et tout le monde se retrouve dans la rue pour faire la fête. Dans la cathédrale Sainte-Marie, on retrouve deux corps, un homme et une femme assassinés, dans une mise en scène particulière : ils sont nus, se tiennent la main, la main de l’un posée sur le visage de l’autre et réciproquement. Et, petite signature : trois chardons « eguzkilore » en basque, c’est tellement plus joli et mystérieux !

L’enquête va démontrer qu’ils ne se connaissaient pas et qu’ils sont morts à la suite de piqures de guêpes que l’assassin avait pris soin de mettre dans leur bouche, les bâillonnant ensuite par un adhésif, dénué d’empreinte bien-sûr. Cette mise en scène rappelle des meurtres commis vingt ans plus tôt pour lesquels Tasio, archéologue très médiatisé, un des jumeaux d’une famille ayant pignon sur rue et surtout omnipotente alors. C’est Ignacio, policier, le propre frère de Tasio qui a procédé à l’interpellation à l’époque…

Qui peut avoir commis ce crime odieux suivi de plusieurs autres, alors que Tasio doit bientôt sortir de prison ? il faut donc reprendre l’enquête, ce qui sera fait par un tandem d’inspecteurs : Estibaliz Ruiz de Gauna et Unai Lopez de Ayala, alias Kraken, profileur.

« Je me fiais aux impressions d’Estibaliz comme la roue arrière d’un tandem se fie à la roue avant. C’était notre façon de fonctionner, de pédaler ensemble. »

Tous deux sont chapeautés par la sous-commissaire Alba Diaz de la Salvatierra, qui vient juste d’arriver au commissariat.

On se retrouve en pleine immersion dans cette ville de Vitoria, pleine de mystères, au passé prestigieux sur le plan historique, artistique, architectural, et le côté « endogame » comme dit l’auteure, « tous les gens nés à plus de cinquante kilomètres d’ici sont des « étrangers » disait la grand-mère » de Kraken. Mais aussi, on apprend beaucoup de choses sur les noms propres des gens avec une partie espagnole à laquelle un nom basque évocateur, de la région d’Avala, pour être plus précise, est ajouté ce qui nous donne des noms interminables qui sonnent bien dans l’oreille.

Autre élément important, que j’aime beaucoup dans les polars, l’alternance des récits entre les années 70 et l’époque actuelle, où l’on fait la connaissance de Javier Ortiz de Zarate, descendant d’esclavagiste, l’ignoble père des jumeaux et de Blanca Diaz de Antonana leur mère, qui est une femme maltraitée, par un mari jaloux, convaincu d’être intouchable.

Eva Garcia Saenz de Urturi nous promène dans la ville mais aussi dans la campagne environnante, au gré des légendes, des récits bibliques, les symboles en nous orientant vers différentes pistes. J’ai adoré cette enquête, cette promenade (ces promenades en fait) car il y a plusieurs évènements durant les fêtes de la Virgen Blanca et, cerise sur le gâteau, on sait dès le prologue que l’inspecteur s’est fait tirer dessus par le meurtrier…

En parlant de symboles : que peuvent signifier entre autres, l’eguzkilore, l’abeille, l’if, sans parler des postures dans lesquels sont retrouvés les victimes, ou encore leur âge qui raconte aussi une histoire…

J’adore ce genre de thriller, qui mêle des crimes bien typés, en rapport avec la religion, l’art, l’ésotérisme ou autres, avec des inspecteurs loin d’être parfaits, avec des failles. C’est très rare quand je mets un coup de cœur à un polar mais là je ne résiste pas, ce roman est génial, la lecture addictive. C’est le premier d’une série, alors j’attends avec impatience la publication en français du suivant…

Ce roman a été adapté en série disponible que Netflix: avis aux abonnés…

Un grand merci à NetGalley et aux éditions Fleuve noir qui m’ont permis de découvrir ce roman ainsi que son auteure dont le style est si particulier qu’on n’a plus qu’une seule envie, en le refermant, de se procurer le prochain… j’espère qu’il ne faudra pas attendre trop longtemps sinon je vais être obligée d’apprendre l’espagnol pour retrouver cet univers ;

#Lesilencedelavilleblanche #NetGalleyFrance

Extraits :

Les caméras de télévision se mirent à harceler mes amis sans relâche. Les journalistes avaient besoin d’un scoop, et ils étaient persuadés qu’ils pourraient le leur fournir. Lorsque la nouvelle se répandit que le tueur m’avait tiré dessus, ils ne les lâchèrent plus d’une semelle : dès lors, aucun d’entre eux ne connut le repos.

L’un comme l’autre, étions sacrément doués pour résoudre des affaires, un peu moins pour suivre les règles. Après quelques avertissements pour indiscipline, nous avions appris à nous couvrir. Quant à suivre les règles, eh bien… on y travaillait.

Dans la culture basque, l’eguzkilore était un antique symbole de protection, que l’on plaçait à la porte des maisons pour les protéger des sorcières et autres démons ? de fait, en l’occurrence, elle n’avait pas protégé les victimes…

La première série de meurtres représentait l’histoire alavaise dans l’ordre chronologique… Les victimes étaient des nouveau-nés, comme s’ils représentaient le premier âge de l’humanité.

Nous avons la preuve que les Celtes l’utilisaient déjà (l’if) comme poison dès le troisième millénaire avant Jésus-Christ. Ça fait partie de ces secrets qui ne se disent pas à voix haute, mais dans les villages, tous les anciens le savent. L’écorce, les feuilles…  Dans l’if, tout est toxique, hormis la partie charnue des graines. Pour les Celtes, c’était un arbre sacré, à qui ils attribuaient l’immortalité en raison de son extrême longévité, et du temps des premiers chrétiens, on a continué à en planter près des églises et des cimetières…

Durant ma formation à l’académie d’Arkaute, j’avais étudié les dossiers d’Argentins d’origine allemande qui avaient découvert avec horreur que leurs charmants grands-pères étaient des criminels de guerre nazis. Comment concilier dans sa vie deux perceptions, deux réalités si divergentes. Pourrions-nous embrasser à nouveau cette personne, lui donner un baiser sur le front, la regarder dans les yeux ? Le dénoncerions-nous ? Est-il possible de cesser d’aimer quelqu’un qui a pris son de vous, qui vous a donné tant d’affection durant toute votre vie ?

Les groupes se forment au lycée, c’est dur de t’intégrer quand tu viens de l’extérieur. C’est un petit monde endogame. A quinze ans, tu connais des jeunes, des gars et des filles, qui sortent ensemble, untel avec unetelle, unetelle avec untel ou tel autre… Bref, vingt ans plus tard, si tu les revois, les couples auront changé, mais aucun d’entre eux n’aura pris la peine de regarder si dans le vaste monde, hors de leur microcosme, il n’y a pas d’autres individus susceptibles de leur plaire.

Je maudis le pouvoir qu’avait un seul cerveau de changer la vie de tant de gens étrangers à son entreprise. J’étais consterné de constater avec quelles facilité la folie d’un seul était capable de transformer le visage de toute une ville.


Lu en septembre 2020

« Les patients du Docteur Garcia  » Almudena Grandes

Je vous parle aujourd’hui d’un livre que j’ai choisi, au départ, pour son titre sur NetGalley, tout en ayant flashé sur la couverture:

 

 

 

Résumé de l’éditeur:

 

Après la victoire de Franco, le docteur Guillermo García Medina continue de vivre à Madrid sous une fausse identité. Les papiers qui lui ont permis d’éviter le peloton d’exécution lui ont été fournis par son meilleur ami, Manuel Arroyo Benítez, un diplomate républicain à qui il a sauvé la vie en 1937.

En septembre 1946, Manuel revient d’exil avec une dangereuse mission :   infiltrer une organisation clandestine d’évasion de criminels nazis, dirigée depuis le quartier d’Argüelles par Clara Stauffer, qui est à la fois allemande et espagnole, nazie et phalangiste.
Alors que le docteur García se laisse recruter par Manuel, le nom d’un autre Espagnol croise le destin des deux amis. Adrián Gallardo Ortega, qui a eu son heure de gloire comme boxeur professionnel avant de s’enrôler dans la División Azul, créée par Franco pour soutenir la Wehrmacht, survit péniblement en Allemagne. Ce dernier ne sait pas encore que quelqu’un souhaite prendre son identité pour fuir dans l’Argentine de Perón.

Traduit de l’espagnol par Anne Plantagenet

 

Ce que j’en pense :

 

Nous faisons la connaissance de Guillermo en 1947, le jour de la messe des Rameaux, alors qu’il attend une jeune femme qui a beaucoup compté dans sa jeunesse Amparo, pour lui demander de l’aide alors qu’elle est pour Franco depuis le début, alors que le Docteur Guillermo Garcia était républicain. Il s’agit de sauver un ami proche. L’aidera-t-elle ? ainsi commence ce que l’auteure Almudena Grandes appelle « Mon histoire est celle de trois imposteurs. »

On assiste alors à un retour vers le passé et la guerre entre républicains et partisans de Franco, début des années trente.

Guillermo est un chirurgien reconnu et apprécié, qui sauve des vies, met en place avec un médecin canadien Norman Bethune,  les premiers dons du sang. Il vit une histoire d’amour avec Amparo qu’il finira par épouser, car elle est enceinte, hyper catholique…

Pendant ce temps en Allemagne arrive au pouvoir le NSDAP avec ce cher Adolf qui met en place la politique qu’on connait, avec au passage une amourette avec une descendante de Wagner, son compositeur fétiche : Winifred Wagner … « À partir de ce jour, Winifred vit exclusivement pour Adolf Hitler. »

Hitler va aider son « ami » Franco bien-sûr, lui donnant avions, bombes, pour écraser Madrid et la révolution…

Guillermo est obligé de quitter l’hôpital et renoncer à la médecine et surtout changer d’identité, grâce à la complicité de son meilleur ami, diplomate républicain, Manuel Arroyo Benítez et devient Rafaël Cuesta Sanchez alias Rafa…

Pendant ce temps la guerre fait rage, certains Espagnols choisissent d’aller combattre aux côtés des nazis, se livrant aux exactions qu’on connaît : on rencontre Jan un jeune Flamand plus que séduit par les théories raciales : « exécuter des Juifs, cela n’est rien, car ils ont l’apparence des humains mais n’en sont pas » et son meilleur ami, un ancien boxeur tricheur, Adrian Gallardo. On les suit jusqu’à la défense du bunker à Berlin, où ils tiennent à résister jusqu’au 2 mai pour que les Russes ne puissent pas fêter leur victoire le premier mai !

Ils vont finir par rester en Allemagne, changeant d’identité aussi. Mais Adrian est recherché car il a commis des atrocités, donc criminel de guerre.

Le décor est planté. La chasse aux nazis commence, mais, Franco est là et tous ses partisans, notamment les bigotes à ses bottes vont tenter par tous les moyens d’empêcher les arrestations en distribuant des faux papiers bien en règles et des filières se mettent en place de façon magistrale il faut bien le reconnaître.

Manuel est également obligé de changer d’identité, plusieurs fois et finit par prendre celle Adrian Gallardo Ortéga en1947 puisque ce dernier est considéré comme criminel de guerre et porté disparu.

Les deux hommes resteront en contact et le « docteur Garcia » continuera à exercer ses talents de médecin sous le manteau, avec beaucoup de prudence…

Manuel est né dans une famille nombreuse et n’a jamais été aimé par ses parents, notamment par sa mère qui s’en débarrasse en le plaçant chez un prêtre qui va lui apprendre à lire et écrire, faire son éducation, lui permettant de faire des études, qui vont changer son destin. Il occupera des fonctions importantes à la Société des Nations en Suisse, durant la République.

Comme l’auteure le répète assez souvent dans le roman : « Manolo Arroyo Benítez avait toujours eu à la fois la poisse et beaucoup de chance. »

On va suivre, les réseaux qui se mettent en place. Bien-sûr l’Église catholique a les siens, mais l’auteure nous parle davantage des réseaux organisés par les civils, notamment celui de Clara Stauffer, (fille d’un brasseur de bière allemand et de mère madrilène), la manière dont les dignitaires nazis mais aussi les moins gradés, sont recevoir la nationalité espagnole, puis migrer vers l’Argentine de Perón qui leur réserve un accueil enthousiaste.

Almudena Grandes mêle la grande et la petite histoire de manière magistrale. Au début, j’ai eu du mal avec les noms espagnols à rallonge ;’ai pourtant l’habitude avec les noms portugais, mais les consonances sont différentes et surtout les personnages principaux changent d’identité ! et surtout il y a beaucoup de monde dans ce roman !

Je me suis rendu compte, après avoir lu une centaine de pages, qu’il y avait à la fin du livre, la liste des personnages réels ou fictifs, leurs différentes identités, ce que m’a beaucoup simplifié la vie.

Guillermo-Rafa à Madrid et Manolo-Adrian en Argentine, vont tenter, en risquant leur vie, de surveiller, tenir des registres de l’or nazi et surtout des œuvres d’art volés aux juifs, à la demande des autorités américaines. Hélas, l’ennemi a changé ! c’est la guerre froide, l’ennemi c’est Staline et pas Franco qui aura ainsi de beaux jours devant lui….

On va rencontrer ainsi, au fil des pages, des Républicains, qui se cachent sous d’autres identité, qui continuent à espérer la République, des gens sincères, des salauds de la pire espèce qui continueront à être protégés…

Tout en nous racontant l’Histoire de l’Espagne Franquiste, que je n’ai jamais étudiée de près car le Caudillo me déclenchait de l’urticaire (il est décédé en novembre 1975 !) et je reconnais que je me suis davantage intéressée à Salazar et sa clique et à la révolution des œillets au Portugal le 25 avril 1974 qu’à lui. Donc négligence réparée…

Pour la petite histoire, voyage de noces au Portugal en décembre 1975 ! c’était la première fois que mon mari retournait dans son pays, sans la dictature, et Franco venait juste de décéder…

J’ai adoré ce livre passionnant à plus d’un titre, dans lequel l’auteure a fait un travail de recherche considérable pour étayer son raisonnement et rester au plus près de la réalité historique et je me suis aperçue que ce livre était en fait le quatrième d’une série consacrée à la guerre civile, qui en comporte encore deux autres.

Certains personnages semblent récurrents, mais cela ne gêne absolument de ne pas avoir lu les précédents, ce que je vais sûrement faire. Je proposerai le plan de l’œuvre dans une autre page de mon blog, afin de ne pas donner le tournis.

Un livre exceptionnel comme l’est d’ailleurs « La fabrique des Salauds » dont je vous ai tant rebattue les oreilles, fin 2019, et dont j’ai tourné la dernière page avec tristesse, tant je m’étais attachée à tous ces personnages. Bip-Bip! je deviens lyrique, il est temps que je termine cette chronique.

Un immense merci à NetGalley et aux éditions Lattès qui m’ont permis de découvrir une auteure géniale et une partie de sa fresque historique.

#LespatientsdudocteurGarcia #NetGalleyFrance

 

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L’auteure :

 

Almudena Grandes vit à Madrid.

Elle est l’auteure de « Un cœur glacé » qui a remporté le prix Méditerranée 2008.
« Les patients du docteur Garcia »  poursuit sa série « Épisodes d’une guerre interminable », inaugurée par « Inés et la joie », puis « Le Lecteur de Jules Verne », et dernièrement « Les trois mariages de Manolita. »

Extraits :

 

Toujours fidèle à mon principe de ne pas divulgâcher », j’ai choisi des citations dans la première partie du roman :

 

Le délicat feston en dentelle noire, ancienne, du voile qui encadrait son visage l’avantageait, accentuant le contraste entre ses sourcils sombres et ses cheveux blonds, une audace suspecte, d’entraîneuse de cabaret, que la plupart des femmes de sa classe sociale ne se seraient pas permise. Mais Amparo Priego Martínez n’était pas une femme comme les autres, et son culot me bouleversait plus que je ne l’aurais cru. Nous avions vécu ensemble trop de choses, trop longtemps, pour que je puisse sortir indemne de ces retrouvailles. Pour cette raison, je ne pris pas le risque de regarder l’enfant qu’elle tenait par la main.

 

Le dernier dimanche du mois de mars 1947, je partis à la recherche d’une femme qui connaissait ma véritable identité. Amparo savait que je ne m’appelais pas Rafael Cuesta Sánchez, mais Guillermo García Medina. Et que j’étais médecin, même si je n’avais plus de statut officiel et travaillais dans une agence de transports.

Elle ignorait, en revanche, que j’étais allé la trouver pour venir en aide à Manuel Arroyo Benítez, un de mes amis qui avait pris l’identité d’Adrián Gallardo Ortega afin d’infiltrer une organisation de fugitifs nazis et d’émigrer en Argentine comme un des leurs. Pendant ce temps, le vrai Adrián Gallardo faisait la manche à Berlin, et quand il était contrôlé par une patrouille, il montrait les papiers d’un certain Alfonso Navarro López.

 

L’événement le plus important de sa vie se produit en 1923, quand un jeune homme énergique de trente-quatre ans se présente à la famille Wagner après avoir assisté à une représentation du Festival de Bayreuth. C’est le leader du Parti national-socialiste ouvrier allemand, mais la raison de sa visite n’est pas politique. Il est persuadé qu’il n’existe aucune œuvre comparable à celle de Richard dans toute l’histoire de la musique et veut témoigner de sa ferveur aux héritiers du compositeur.

La jeune épouse de vingt-six ans, restée en retrait, assiste à cette déclaration passionnée qui lui inspire à son tour des sentiments encore plus excessifs. À partir de ce jour, Winifred vit exclusivement pour Adolf Hitler.

 

Norman Bethune a réussi. Pour la première fois dans l’histoire, une transfusion de sang conservé dans un réfrigérateur redonne vie à un mourant. Désormais, il n’est plus nécessaire que le donneur soit juste à côté du receveur, relié à lui par deux aiguilles et un tube en caoutchouc. Cette nouvelle technique rend les transfusions beaucoup plus faciles, pratiques et efficaces.

 

Ainsi, ma relation avec Amparo, étrange fruit du hasard et de la guerre, prit peu à peu une curieuse forme, semblable à la silhouette de ces réfugiés qui portaient en couches superposées tous les vêtements qu’ils possédaient. Mais avant la fin de l’hiver, il se produisit un événement qui me prouva que tout pouvait être encore plus compliqué.

 

Au contraire, sa nationalité fait très vite d’elle une pièce maîtresse dans les relations entre le gouvernement de Burgos et le Troisième Reich. Clara, franquiste en Espagne, nazie en Allemagne, sait regarder très loin et comprend ce qu’elle voit. Intelligente, compétente, extrêmement énergique et très sympathique, elle se met en retrait et attend son heure.

 

Clara Stauffer continuera d’être phalangiste et nazie, espagnole et allemande, jusqu’à sa mort.

 

Manolo aurait été un bon étudiant au séminaire de Gijón. Au collège Sierra Pambley il fut, dès le début, un élève brillant, car s’il n’avait aucune vocation pour la prêtrise, celle qu’il avait pour l’étude était immense, surtout à partir du moment où il comprit que c’était pour lui le seul moyen de s’échapper de Robles, de sa maison, du piège de sa vie.

 

C’était un bon garçon, sain, innocent, qui ne buvait pas, ne fumait même pas, et n’arrêtait pas de sortir de sous sa chemise un scapulaire que lui avait donné sa mère pour l’embrasser. Il y avait beaucoup d’hommes comme lui parmi les volontaires de son armée, presque encore des enfants, élevés dans des familles ultra catholiques de tradition carliste. (A propos du vrai Adriàn)

Là-dedans, il y a une carte d’identité au nom de Rafael Cuesta Sánchez. Tu te souviens ? (Je hochai la tête en silence. Je n’avais jamais oublié ce nom.) C’est une fausse identité, inventée de toutes pièces.

 

 

Lu en février 2020

« Dans le miroir de Valeria » : Elisabet Benavent

Petit moment de détente aujourd’hui avec la suite des aventures de Valeria:

 

 

 

Quatrième de couverture:

 

La suite trépidante des aventures de Valeria et de sa bande d’amies Valeria, qui s’est séparée d’Adrian, est tombée dans les bras de Victor.

Mais, après un début de relation enflammée, elle commence à s’interroger…

A-t-elle fait le bon choix ? Heureusement, ses amies de toujours sont là, à qui elle peut se confier.

Et réciproquement. Car Lola, elle aussi, se pose des questions. Est-elle encore amoureuse de Sergio, l’homme qui a plaqué sa fiancée pour elle, avant qu’elle le rejette ?

Carmen, de son côté, semble heureuse d’avoir enfin franchi le pas avec Barto, même si elle pressent que la mère de ce dernier va se montrer envahissante…

Seule Nerea semble garder le cap et la tête froide. Mais les apparences sont souvent trompeuses…

Valeria a aussi une autre source d’inquiétude. Elle vient enfin de terminer son deuxième roman. Elle en est satisfaite et son éditeur est enthousiaste. Mais comment ses amies réagiront-elles quand elles découvriront leurs histoires de cœur et leurs ébats intimes étalés au grand jour ?

En attendant, les quatre amies sont de nouveau réunies et s’apprêtent à sortir faire la fête. C’est drôle, c’est vif, ça pétille et ça passe aussi vite qu’une soirée entre filles. On s’est à peine embrassées qu’il est déjà l’heure de se quitter.

 

 

Ce que j’en pense :

 

On retrouve dans cet opus les quatre copines : Valeria, Lola, Carmen et Nerea toujours prêtes à faire la fête, la fiesta ou la java seraient des termes mieux adaptés à la situation) en parlant de leurs problèmes de cœur.

Valeria a fui un mariage qui prenait l’eau, et file le parfait amour avec son Dieu du sexe Victor dont elle a tellement vanté les performances dans son roman (la publication de journal intime T1) que son pas encore ex-mari, ne prend pas très bien, c’est le moins qu’on puisse dire…

Les copines se sont bien-sûr reconnues dans les pages du livre, avec plus ou moins d’humour.

Lola, toujours aussi vamp, qui en pince toujours pour son Sergio, plus ou moins toxique, Carmen, qui découvre les parents, notamment la mère possessive, hyper-toxique de son Barto, et Nerea, la toujours sage, marquée par son éducation, attend le mariage raisonnable, avec un homme adéquat pour faire un mari convenable et des enfants convenables.

Valeria est touchante car elle ne sait pas ce qu’elle veut, hésite à divorcer, a toujours peur que Victor demeure l’homme à femmes qu’il a toujours été….

Un bon moment de fous- rires, avec des scènes érotiques très explicites : hot, very hot, caliente… toutes les positions du Kâma-Sûtra y sont bien détaillées, entrecoupées de douches froides et de coups de blues !

Elles sont attachantes, parfois tellement extravagantes qu’on a du mal à les suivre, mais leurs réflexions sur la vie, la féminité, le couple sont intéressantes; alors je vais continuer l’aventure, c’est un moment détente, au milieu de lectures sérieuses… et soyons honnêtes, j’en pince pour Victor évidemment!

On peut lire et entendre partout que Noël est une période de régression pour tout un chacun, alors la Chick-Lit s’imposait…

Un grand merci à NetGalley et aux éditions de l’Archipel qui m’ont permis de suivre une nouvelle fois les quatre copines.

 

#DansLeMiroirDeValeria #NetGalleyFrance

 

❤️ ❤️ ❤️

 

Extraits :

 

Oups! Désolée, je ne vous dévoilerais pas les passages coquins sinon, vous n’aurez plus envie de lire le livre…

 

J’étais tombée amoureuse d’un de ces mecs avec lesquels ça ne marche jamais et j’avais fichu mon mariage en l’air. J’avais demandé la séparation. Bref… J’aurais mieux fait de réfléchir avant de ruer dans les brancards.

 

Nous, les femmes de ma génération, nous nous sentons libérées. Nous avons un boulot, des préoccupations intellectuelles et, dans une certaine mesure, des ambitions professionnelles. Si le rôle de mère nous tente, nous planifions nos maternités. Nous avons fait des études et sommes bien préparées au monde du travail. Nous parlons de sexe sans complexe, et nous ne dépendons de personne. Mais, la plupart du temps, ce n’est que de la poudre aux yeux. En réalité, sur le plan des sentiments, nous continuons de dépendre maladivement des hommes, presque toujours.

 

Mais, on pouvait se demander si Nerea était capable de tomber réellement amoureuse. Elle était peut-être un peu trop carrée pour ça : ce qu’elle recherchait, ce n’était pas le grand amour, mais un mec pragmatique, qui cadrait bien avec la vie qu’elle s’était choisie.

 

Quand Victor me regardait en souriant, je craquais complètement. Je l’avais toujours vu comme un de ces objets de luxe qu’on ne peut s’empêcher de mater dans une vitrine même si on sait qu’on ne peut pas se les offrir.

 

Lu en décembre 2019

« Dans les pas de Valeria » : Elisabet Benavent

Petit détour par la chick-lit aujourd’hui avec ce roman à la couverture géniale déniché sur NetGalley

 

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Résumé de l’éditeur :

 

Quand Bridget Jones s’invite dans Sex and the City…

Elles sont quatre amies de toujours qui vivent à Madrid. Complices et inséparables, elles se connaissent sur le bout des doigts et se racontent tout. Vraiment tout. Surtout leurs histoires de cœur…

Valeria, 27 ans à peine, commence à s’encrouter avec son compagnon de toujours, elle déprime.

Lola s’est entichée d’un super coup,  mais il est fiancé.

Carmen est amoureuse d’un collègue, mais elle n’ose pas se lancer, elle est un peu complexée.

Nerea, la sainte- Nitouche du groupe, vient enfin de rencontrer un homme à sa hauteur – mais…

Tout bouge lorsque Valeria rencontre Victor, un homme ô combien séduisant
lorsque Lola décide de réagir.

Lorsque Carmen parvient à séduire son collègue et découvre que le nouveau petit ami de Nerea n’est autre que… son propre boss – qu’elle déteste !

Leur amitié survivra-t-elle à ce drame ?

C’est drôle, c’est vif, ça pétille et ça passe aussi vite qu’une soirée entre filles. On s’est à peine embrassées qu’il est déjà l’heure de se quitter. A regret.

 

 

Ce que j’en pense

 

J’ai choisi ce roman, car j’avais besoin d’une lecture facile, ne prenant pas la tête, dans cette période difficile. Il faisait référence au fameux « journal de Bridget Jones » que je n’ai jamais lu, mais les films m’avaient amusée alors pourquoi pas ?

Nous sommes à Barcelone, en compagnie de quatre amies qui se réunissent régulièrement pour dîner, (alcool bienvenu aussi) et se raconter leurs soucis : problèmes conjugaux, libido, travail…

Valeria a publié un premier roman qui a eu beaucoup de succès, mais elle est à court d’idée pour écrire le deuxième, panne sèche, malgré une astreinte quotidienne devant la page blanche. Elle est mariée à Adrian depuis dix ans mais leur vie sexuelle bat de l’aile, et leur vie de couple tout court d’ailleurs… Adrian, photographe, rentre de plus en plus tard et, crevé, il s’endort sitôt la tête posée sur l’oreiller.

Carmen supporte un boss qui la dénigre, lui infligeant des remarques désobligeantes sur son travail pourtant bien fait et de préférence devant témoins. Son coéquipier Baltho ne cautionne pas mais se tait. Elle multiplie les amants, rencontres d’un jour pour s’étourdir.

Nerea, la plus sage de toutes cherche le véritable amour, l’homme de sa vie et tente de modérer ses copines. Jusqu’au jour où elle tombe d’un homme qui va laisser les autres sans voix…

Enfin, nous avons Lola qui tombe toujours sur des super-coups mais mariés…

Bien-sûr Valeria tente de se remettre en question : c’est sûrement de sa faute, elle se balade en vieux T-shirt, (les bas, tombant sur les chaussures dirait Aznavour) décide de se reprendre en mains, laisse tomber la page blanche pour aller voir Adrian à son atelier et ô surprise s’aperçoit qu’Alex l’assistant dont son mari lui rabat les oreilles est une jeune femme de vingt ans, hyper-sexy….

Lorsqu’elle croise la route de Victor, tous les clignotants vont s’affoler pour notre plus grand plaisir…

Mon peu d’attirance envers la Chick-lit n’est un secret pour personne, mais le ton plein d’humour d’Elisabet Benavent m’a beaucoup plu, les scènes d’amour torrides qui émaillent le roman sont drôles, parfois même très crues mais dépaysement garanti….

Un roman idéal pour les vacances ou en cas de surchauffe neuronale… Et c’est vrai, ça pétille tellement qu’après avoir râler sur le côté « nunuche » de ces quatre copines, je me suis prise en jeu…

Un grand merci à NetGalley et aux éditions de l’Archipel qui m’ont permis de découvrir le roman et l’auteure.

Sortie prévue 18 septembre 2019…

 

#DansLesPasDeValeria #NetGalleyFrance

 

 

L’auteure

 

Née à Valence en 1984, Elisabet Benavent est licenciée en communication audiovisuelle, elle a travaillé dans le service communication d’une multinationale avant de tout plaquer pour se consacrer à sa passion : l’écriture.

D’abord auto-éditée, la publication en 2013 de ses romans « Dans les pas de Valeria » (« En los zapatos de Valeria »), « Dans le miroir de Valeria » (« Valeria en el espejo »), « Les hauts et les bas de Valeria » (« Valeria en blanco y negro ») et « Passionnément Valeria » (« Valeria al desnudo ») a connu un énorme succès en Espagne, avec plus de 800 000 exemplaires vendus.

 

Extraits

 

C’est tellement plus facile de se sentir bien dans ses pompes quand quelqu’un vous vénère comme un dieu. J’aurais sans doute été bien avisée de me dégotter moi-aussi un admirateur inconditionnel.

 

Comment aurais-je pu dire à mes amies que mon mari et moi ne nous touchions plus quand nous étions au lit, qu’il n’était pas exclu qu’une autre lui ait mis le grappin dessus, ou que, n’ayant plus aucun désir pour moi, il se livrait peut-être jusqu’à l’épuisement à l’auto-érotisme ? Mais une bonne chose au moins était sortie de toutes ses considérations : j’avais pris conscience que mon allure laissait gravement à désirer et qu’il était temps que je me ressaisisse.

 

Je me regardai dans la glace, avec mon chignon perché sur le haut de mon crâne et mes lunettes qui glissaient sur mon nez, le vieux T-shirt tout défraichi d’Adrian… Pas vraiment étonnant qu’il ne se sente pas attiré par mois. Et si c’était moi qui avais fait capoter notre relation à force de négligence ?

 

Tombée très bas, oui, mais les deux paquets de donuts et les deux litres de Coca que je me suis enfilas hier m’ont aidée à amortir la chute. Rien de tel qu’une orgie de sucre et de caféine pour se rafraîchir les idées.

 

Carmen n’était pas habituée à se sentir toute-puissante, et pour être tout à fait franche, elle avait peur de ne pas être à la hauteur de la situation. Elle craignait de perdre subitement les pédales et de tout gâcher en cédant à la panique. L’heure de la vengeance avait sonné, et elle s’imaginait faisant gicler le sang de son boss en riant à gorge déployée.

 

Le reste, je le réservais aux filles qui me livraient généralement trois points de vue différents, voire discordants. Mais, lorsque toutes tombaient d’accord, je savais qu’elles avaient raison. C’était une thérapie de groupe efficace et un rituel si ancien, entre nous, qu’il était impossible d’y déroger. C’est pourquoi j’avais décidé de passer aux aveux…

 

 

Lu en août 2019

« Rose de cendres » de Pilar Rahola

Je vous parle aujourd’hui d’un livre que j’ai choisi sur NetGalley du fait de mon goût pour l’Histoire, et j’avoue que je ne connaissais peu pour ne pas dire pas du tout  l’histoire de la Catalogne  :

 

Rose de cendres de Pilar Rahula

 

Résumé de l’éditeur :    

 

D’origine modeste et issu d’une famille républicaine, Albert Corner a combattu lors de la première guerre d’indépendance de Cuba. À son retour au pays, il n’a plus qu’une idée en tête: s’enrichir, quitte à verser dans la criminalité. Des années plus tard, il jouit d’un statut d’homme d’affaires reconnu. Mais, en 1909, la révolte est aux portes de la ville : le syndicalisme ouvrier affronte violemment le gouvernement espagnol au sujet de la mobilisation pour la guerre au Maroc. Et dans cette Catalogne au bord de l’explosion, les enfants Corner pourraient bien trahir les idéaux fraîchement bourgeois de leur père.

Entre les aspirations révolutionnaires des uns et les désirs d’émancipation des autres, l’équilibre de la famille et des affaires est en danger…

 

 

Ce que j’en pense   

 

On fait la connaissance du héros principal Albert Corner alors qu’il se bat pour l’Espagne à Cuba, combat dont il réchappe à force de volonté, de rage. Il connaît les affres de la traversée, en fond de cale, partageant la litière des chevaux. En fait le bien-être des chevaux compte davantage que celui des hommes qu’on envoie à la boucherie, car ils sont plus utiles. Cette guerre violente se soldera par la perte de Cuba pour l’Espagne.

De retour, Albert n’a qu’un seul but ; échapper à la pauvreté de sa famille, s’enrichissant grâce à la spéculation et à des méthodes peu orthodoxes, mais quand il a été normal de tuer au nom de l’Espagne, cela devient facile… Il va construire sa famille, s’impliquant en politique, pour la Catalogne.

On assiste à l’évolution de cette famille, alors que les émeutes de 1909 se déclenchent car les catalans refusent d’aller se battre contre le Maroc (la guerre de Melilla), un premier contingent ayant été envoyé purement et simplement à l’abattoir faisant trois cents morts.

Trois partis influents s’opposent à cette époque, car le peuple veut l’indépendance de la Catalogne, de manière modérée pour les uns : Solidarité catalane, les anarchistes purs et durs et le parti conservateur qui veut rester avec l’Espagne. C’est le départ d’un convoi de soldats réquisitionnés (on peut y échapper si on paye, alors le sentiment d’injustice des ouvriers pauvres ne peut qu’exploser) qui va déclencher les émeutes que l’on retiendra dans l’histoire sous le nom de « Semaine tragique » du 26 juillet au 2 août 1909

Tout commence par une grève générale, visant à paralyser le pays, mais ce sera un bain de sang : on érige des barricades, on arrache les pavés, on met le feu aux églises, car on rejette la toute puissante église catholique qui a la mainmise sur tout, jusqu’à l’école. Les anarchistes essaient de mettre en place une école laïque mais il n’y a qu’un pas entre projet et utopie. Barcelone est en feu.

 

« Au-dehors, Barcelone flambait et elle écrivait en lettres de feu un des chapitres les plus tragiques de son histoire. Mais à l’intérieur de la famille d’Avel-li aussi se dressait un bûcher d’incompréhension, de douleur et de violence, aussi dévastateur que les flammes qui avaient détruit des églises dont la plupart avaient résisté au passage du temps et des violences des siècles. »

 

J’ai beaucoup aimé cette famille et ses dysfonctionnements, chacun optant pour un camp, pour des raisons différentes : Albert ne veut pas que son empire financier lui échappe, Enric croit à une société meilleure plus égalitaire, le fils aîné, Avel-li, désire une Catalogne libre, républicaine sans utiliser la violence.

Tout oppose ces deux frères, car Avel-li se comporte en aîné responsable, suit les traces de son père donc reconnu par ce père, alors qu’Enric le deuxième fils est un être d’une grande sensibilité, il a été couvé par sa grand-mère, et déclenche la colère paternelle de manière quasi permanente.

Il porte le nom de son grand-oncle mort à la guerre, ce qui ne facilitera pas les choses… l’un est marié, installé dans sa vie alors que l’autre se cherche sur tous les plans, politique, sexuel, donc le drame sera inévitable…

 

« L’oncle de mon père, c’est-à-dire, le frère de ma grand-mère Mercé, est mort éventré par un cheval pendant la révolte de 1835. Mon frère Enric porte son prénom, à la demande de grand-mère Mariona quand il est né.« 

 

J’aurais aimé avoir de la sympathie pour Enric, mais c’est difficile car son sentiment de ne pas être aimé et d’être sans cesse comparé avec son frère aîné, qui est pourtant légitime, le pousse à se poser en victime et lui sert de justification sans cesse…

Les femmes de la famille sont intéressantes aussi : Elisenda, l’épouse d’Albert est soumise, tient sa maison le mieux possible, c’est l’épouse modèle prototype de l’époque, les filles d’Albert, par contre, ne sont pas résignées et obéissante comme leur mère, elles se rebellent, Merceneta en particulier, affirment davantage leurs idées. On retient aussi la place importante de l’art dans cette ville, où passer Gaudi, décrié par la population de l’époque car on ne comprend pas son travail…

J’ai suivi comme tout le monde les évènements récents avec le référendum pour l’indépendance, mais je ne comprenais pas bien les positions de chacun. Il s’agit d’un phénomène ancien, et ce roman m’a permis d’apprendre beaucoup de choses,  tant sur la période historique que sur la société de l’époque: Lerroux, Cambo, Maura et Ferrer étaient d’illustres inconnus pour moi et donc envie de creuser encore…

Cependant, j’adresserai un reproche à l’auteure : avoir trop décortiqué, embrouillant le lecteur par trop de détails à mon goût, je me suis perdue parfois dans les noms des protagonistes (leurs noms à rallonge sont durs à mémoriser !) et j’ai parfois survolé la description des combats, des violences de rues, des radicalisations, car trop de détails tue parfois…

Ainsi, Pilar Rahola cite fréquemment des extraits de l’époque du journal « La Veu de Catalunya » ou les comptes-rendus d’interventions lors des réunions politiques, pour appuyer son récit, et cela finit par devenir soporifique…

  ♥ ♥ ♥ ♥ ♥

Je remercie vivement NetGalley et les éditions Belfond qui m’ont permis de découvrir ce roman ainsi que son auteure.

#PilarRahola #NetGalleyFrance

 

L’auteur   

 

Née à Barcelone en 1958 dans une famille républicaine antifasciste, Pilar Rahola est une journaliste, écrivaine et femme politique catalane.

Diplômée d’une licence en philologie catalane et espagnole de l’université de Barcelone, elle a publié plusieurs livres et écrit pour de nombreux journaux, dont La Vanguardia (Espagne). Rose de cendres, qui a reçu le prix Ramon Llull 2017, est son premier ouvrage publié en France.

 

Extraits   

 

Trop endurci pour croire aux dieux et aux curés, Albert n’avait jamais été très religieux, il jugeait néanmoins l’Église efficace pour endiguer les idées révolutionnaires qui ne pouvaient conduire qu’au chaos.

 

… Le passé pouvait être un grand prestidigitateur, un escamoteur qui trompait les sens et les plongeait dans la nostalgie. Or, lui (Albert) n’avait pas le temps de vivre dans le passé, surtout à présent que l’orage grondait.

 

Gaudi est un mystique et un poète, mais sera-t-il un bon architecte pour nos maisons ?

 

Et d’un bout à l’autre de l’Espagne, la moindre tentative pour obtenir une amélioration dans l’intérêt des Catalans était aussitôt taxée de séparatiste. « pourtant nous n’avons jamais été aussi nombreux, aussi puissants et aussi unis, et personne ne pourra nous arrêter si nous persévérons, du moment que nous évitons de nous disputer et de nous poignarder dans le dos »

 

Papa est né avec l’instinct de survie, ce qui explique qu’il possède un sens de l’opportunité très développé…

 

« Notre famille est comme cette terre, elle tombe mais elle se relève toujours » disait-elle. De telles phrases éveillaient chez le jeune garçon (Avel-li) des émotions qu’il expliquait difficilement. C’était comme un battement de cœur qui le rattachait à quelque chose de plus grand que lui, dont il faisait partie sans pouvoir le comprendre.

 

Les actions héroïques des vieux carlistes ou, avant cela, la défense des murailles de Barcelone durant la guerre de 1714, ou encore et surtout l’engagement de l’arrière-grand-mère Mariona pendant le bombardement de Gràcia, tous ces hauts faits avaient peuplé son enfance, mais à mesure qu’il grandissait, Avel-li s’intéressait davantage aux évènements politiques qu’à l’épopée historique.

 

Il avait assumé le rôle de fils aîné avec un zèle qui l’accablait maintenant de responsabilités … « tu es l’aîné de la famille Corner, Avel-li, mais pas l’aîné de l’humanité » tentait de le raisonner Dolcina

 

Quand il parvint enfin à réagir, sa douleur fut insupportable, et il comprit aussi qu’il le savait depuis longtemps qu’il le niait. « Je lui ai pardonné beaucoup de choses, mais cette infamie répugnante, cet outrage misérable à notre famille, c’est impossible », et il sortit fou de rage… Réaction d’Albert en découvrant l’homosexualité de son fils Enric 

 

Son frère était un perverti, un libertin qui faisait jaser toute la ville, le pantalon sur les chevilles et le sexe exhibé, une crapule… Plutôt mort qu’inverti ! s’écria-t-il fou de rage, avant de s’effondrer, brisé dans les bras de Dolcina qui le caressait comme un petit enfant… Réaction d’Avel-li

 

Il n’y a pas de feu aussi mortel que celui qu’on attise soi-même pensait-il, accablé, la tête basse en essayant de trouver sa place dans cette maison paternelle, à présent remplie de proches, et qui pourtant lui semblait étrangère…

 

Les femmes étaient les grandes perdantes, bannies du récit humain, et l’exclusion du regard féminin avait peut-être été la plus grave erreur de l’humanité.    

 

Lu en décembre 2018