« Dans la brume de Capelans » d’Olivier Norek

Intermède thriller avec le livre dont je vous parle aujourd’hui, l’avalanche de critiques enthousiastes, le plaisir de retrouver la plume de l’auteur, tout était tentant et j’ai dû attendre qu’il soit disponible à la bibliothèque :

Quatrième de couverture :

Une île de l’Atlantique, battue par les vents, le brouillard et la neige.

Un flic qui a disparu depuis six ans et dont les nouvelles missions sont classées secret défense.

Sa résidence surveillée, forteresse imprenable protégée par des vitres pare-balles.

Une jeune femme qu’il y garde enfermée. Et le monstre qui les traque.

Dans les brumes de Capelans, la nouvelle aventure du capitaine Coste se fera à l’aveugle.

Ce que j’en pense :

Le capitaine Coste est affecté à Saint Pierre, (l’archipel Saint Pierre et Miquelon) en mission secret défense : dans sa maison, isolée, aux vitres pare-balles, il « héberge » des détenus repentis, dont il tire le maximum de renseignements, avant qu’on leur attribue une nouvelle identité, récompense des services rendus. Le dernier d’entre eux étant un génie informatique.

Victor Coste se plaît dans cet isolement, qui lui a permis de quitter le 93 à la suite d’une tragédie. Tellement cabossé, qu’il est parti, sans prévenir personne. Officiellement il s’occupe des douanes et a peu de liens avec son équipe, dont les membres ne connaissent pas la réalité de son travail. Il a un seul ami, un flic en fin de vie, qui héberge sa petite-fille.

Pendant ce temps, sur le Continent, un « monstre » s’en prend à des adolescentes depuis plusieurs années en toute impunité, insaisissable car très malin. Un jour pourtant, il est moins prudent que d’habitude et une de ses cachettes est découverte : on retrouve, à côté d’une victime morte, une jeune femme de vingt-quatre ans, qui semble être la première disparue. Pourquoi l’a-t-il gardé en vie ? Elle se prénomme Anna et ne prononce pratiquement aucune parole.

On va proposer à Victor de la faire parler, l’apprivoiser… Victime? Manipulatrice? Mais ne divulgâchons pas!

J’aime bien les flics cabossés, car leur parcours est intéressant, leur psychologie également, donc le capitaine Coste ne pouvait que me plaire. La personnalité d’Anna est forte, mystérieuse, permettant de tout imaginer, car la méfiance du lecteur est toujours là, même tapie dans l’ombre, ce qui rend l’enquête passionnante. L’auteur parle très bien de la dureté du métier, des traumatismes, des addictions, dépressions ou tentatives de suicides.

Ce roman se lit de manière addictive, tant le scenario est passionnant, les rebondissements nombreux, l’auteur se plaisant à nous envoyer sans cesse, sur de nouvelles pistes avec brio, mêlant des enquêtes locales à l’enquête principale, car Saint Pierre est peut-être un endroit perdu, loin du monde, elle a son lot d’actes de délinquance. Saint Pierre qui est, elle-même, un personnage à part entière du roman, avec les éléments qui se déchaînent.

C’est le troisième roman d’Olivier Norek que je lis : j’ai beaucoup aimé « Entre deux mondes », un peu moins « Impact » et j’ai eu beaucoup de plaisir à retrouver sa plume. Je n’ai pas lu les trois premières aventures de Victor Coste, mais cela ne m’a pas gênée, Olivier Norek nous donne suffisamment d’éléments pour que l’on ne se perde pas. Par contre, mon esprit étant alléché, j’ai envie de découvrir les trois premiers volumes qui sont dans ma PAL depuis assez longtemps, tant les critiques sur mon site préféré Babelio sont enthousiastes.

9/10

Extraits :

Même repenti, rien n’efface les actes d’un sale type. Si l’un des ex-pensionnaires du flic venait à y rester, abattu, noyé, pendu… Qu’en dire ? N’est-ce pas le destin possible de ceux qui ont choisi la criminalité comme gagne-pain.

On les voudrait hideux, les monstres. Dans les villes, dans les foules, leurs démons sont invisibles. Ils nous frôlent sans que l’on frémisse. Leurs sourires ressemblent aux nôtres. On les côtoie, on les voisine, on les invite. Ils nous charment ou nous indifférent car ils sont bien normaux, les monstres.

Pour celui qui sait écouter, ce sont les premières notes de la respiration du suroît qui vous conseillent d’aller vous abriter. A la suite de cet avertissement, d’immenses nuages obscurs et menaçants apparurent au fond du ciel, poussés par le souffle de la tempête qui les menait au-devant de la scène, formant un million de petits rouleaux blancs qui parcouraient la surface de l’eau en une armée d’écume resserrant ses rangs…

(Des brumes) De Capelans. Le courant chaud du Gulf Stream rencontre le courant froid du Labrador et, une fois par an, pendant trois semaines, les brumes tombent sur l’archipel et le font disparaître littéralement de la carte. Tout devient… Disons… Mystique.

Pour certains peuples, le ciel est une digue retenant des rivières de lumières et, lorsque la digue cède, s’échappe un torrent de couleurs. Longtemps inexplicables, les aurores boréales ont forcé les hommes à leur créer des légendes. Âmes dansantes des défunts, reflet des armures des Walkyries ou pont vers l’au-delà, les habitants des terres qu’elles éclairent leur ont toutes trouvé une histoire.

Là, dans cet ancien sanatorium devenu refuge, posé au milieu des quatre-vingts hectares de verdure, des flics, comme des maisons en ruine, hommes et femmes en lambeaux, étaient accueillis, le temps d’y sevrer une addiction, d’y apaiser une dépression, d’y oublier l’accumulation d’évènements traumatiques qui font une carrière, même courte…

Lu en juillet 2022

« Summit » de Mo Malø

Je vais essayer de combler mon retard, en continuant à vous proposer des chroniques allégées pendant quelques temps, d’autant plus que, début mai, je me suis inscrite au Challenge NetGalley, pour essayer de me motiver, (encore une idée de génie, version fuite en avant) notamment avec ce roman :

Résumé de l’éditeur :

À Nuuk, capitale du Groenland, Qaanaaq Adriensen, le chef de la police locale, mi-Inuit mi-Danois, est chargé d’organiser la première réunion de la Scandinavian Police Association. Les plus grands flics islandais, danois, norvégiens et finlandais se retrouvent à Kangerlussaq, à l’ouest du grand pays blanc, pour sauver le Danemark d’une guerre des gangs qui menace sa stabilité. Mais tout se complique quand l’un d’entre eux disparaît…

Malgré la situation, le groupe doit partir en expédition dans l’Inlandsis – une nappe de glace recouvrant la terre ferme et qui peut atteindre plusieurs milliers de mètres d’épaisseur. Mais pendant le voyage, des événements de plus en plus inquiétants se produisent : leurs balises de repérages sont désactivées, ils évitent un accident de justesse, deux autres participants disparaissent à leur tour… Et si quelqu’un cherchait délibérément à provoquer leur perte ? Dans cette atmosphère angoissante, Qaanaaq doit affronter une blessure ancienne, liée à un secret de famille qui vient de refaire surface. Au milieu du blizzard et des blocs de glaces, tous sont désormais coupés du monde : si la faim et le froid n’ont pas raison d’eux, ce pourrait bien être la folie polaire…

Ce que j’en pense :

Il y a un moment que je voulais découvrir cet auteur et j’avais des envies de froid, polaire ou pas en cette période presque caniculaire et de surcroit la couverture magnifique est une incitation au dépaysement…

L’histoire m’a plu, l’idée du voyage initiatique avec les flics les plus chevronnés, islandais, danois, norvégiens et finlandais qui composent la Scandinavian Police Association, dans une sorte de chasse au trésor flirtant avec Koh Lanta, sans réseau, avec uniquement un équipement rudimentaire (kit de survie) …

On se promène dans l’Inlandsis, avec des températures frôlant les moins 50°, en butte à la gourmandise des ours polaires, des techniques qui respectent peu la biodiversité et les espèces protégées et, cerise sur le gâteau le chef (qui dirige bien au chaud dans son bureau) n’a qu’une idée en tête se débarrasser de Qaanaaq …

En principe, ce livre, le 4e de la série est censé se lire même si on n’a pas lu la trilogie, mais c’est très frustrant car il y beaucoup de choses, d’événements personnels ou liés aux intrigues qui gâchent le plaisir… à mon humble avis, il faut absolument avoir lu les précédents pour apprécier vraiment « Summit ». Je vais essayer de lire « Qaanaaq » pour ne pas avoir de regrets.

Je pensais découvrir un auteur nordique et je me suis rendue compte que derrière Mo Malo se cachait un auteur français écrivant sous plusieurs identités, j’ai appris quelque chose, mieux vaut tard que jamais.

Que l’ours polaire soit sans inquiétude, je l’assure de toute ma compassion, car ses prédateurs ont encore de longues années devant eux hélas… Par ailleurs, la réflexion sur le comportement de l’homme vis-à-vis de la Nature et des espèces protégées me plaît énormément car je suis sur la même longueur d’ondes…

Un grand merci à NetGalley et aux éditions de la Martinière qui m’ont permis de découvrir ce roman et son auteur.

7/10

Extraits :

L’animal n’a eu besoin ni de ses griffes ni de sa gueule pour terrasser les intrus venus l’importuner sur son territoire. L’Homme se charge si bien de se détruire lui-même.

Dur au mal et résistant, l’ours polaire exprimait parfois des sentiments qu’on ne prête qu’aux humains : détermination, orgueil, susceptibilité… Mais c’était bien la première fois que l’un d’entre eux paraissait animé par la rancune. Par l’envie d’en découdre avec cette espèce dominante qui envahissait son territoire et menaçait son mode de vie.

Y aurait-il un jour créature plus nuisible pour ses semblables que l’Homme.

Lu en mai 2022

« Froid comme l’enfer » de Lilja Sigurdadottir

Je suis bientôt à jour dans mes chroniques, il ne m’en reste qu’une à rédiger, qui ne va pas être simple, alors je vous propose encore un petit détour par l’Islande aujourd’hui avec ce livre :

Résumé de l’éditeur :

Avoir une sœur c’est la meilleure et la pire des choses, on se trouve coincée dans des rôles depuis l’enfance. Aurora n’a aucune envie de quitter l’Angleterre pour aller en Islande s’occuper de la disparition d’Ísafold, mais difficile de résister à une mère qui ne veut pas comprendre qu’une enquêtrice financière n’est pas un détective privé. Ce qu’elle sait bien faire, elle, c’est démasquer les fraudeurs et les faire payer en se servant au passage. Et comme l’Islande a une réputation établie pour ce genre de problème, elle va y aller. Et tester ses compétences ainsi que sa séduction. 

Mais Ísafold est introuvable. Il semble que son mari la battait, ce qu’elle niait farouchement. Au fil des témoignages qu’Aurora recueille dans ce pays baigné dans la lumière magique d’un soleil de minuit éblouissant, des personnages inquiétants émergent. Au cours de son enquête elle met au jour des détails subtils sur les façons de vivre et de se parler, et par ce travail de dentellière elle nous fait entrer dans un monde plus complexe qu’il n’en a l’air.

Un livre sombre et imprévisible.

Ce que j’en pense :

Le roman s’ouvre sur la scène de crime : un homme vient de déposer le cadavre d’une femme, enfermé dans une valise, après lui avoir ôté sa bague, et enfoui quelque part dans la lave. Qui ? A nous de spéculer !

Ísafold n’a pas de donner de nouvelles depuis environ quinze jours. En Angleterre, sa mère commence à s’inquiéter et charge son autre fille, Aurora, de se rendre en Islande pour tenter de découvrir ce qui se passe. Cette dernière s’y rend à contre-cœur car Ísafold est victime de violences conjugales, mais chaque fois qu’Aurora a tenté de l’aider, de lui trouver un lieu refuge, elle retourne toujours chez son époux qui jure de ne plus recommencer.

Tout le monde est au courant dans leur immeuble car Ísafold a l’habitude de se réfugier chez les voisins après chaque accès de violence de son époux. Le couple vit en marge de la société, petits boulots, trafics en tous genre.

Lors de leur dernière entrevue, Ísafold a sommé sa sœur de s’occuper de ce qui la regardait et une brouille s’en est suivie, d’où le peu d’enthousiasme d’Aurora qui a une vie stable en Angleterre, où elle est enquêtrice financière, traquant les magouilles, l’argent détourné puis caché dans des paradis fiscaux… Elle va être aidée dans son enquête sur la disparition d’Ísafold (qu’elle estime être une énième tentative pour attirer l’attention sur elle) par un oncle par alliance, policier de son état et qui n’est pas insensible à son charme.

L’enquête est intéressante, malgré sa lenteur (si typique aux polars islandais, ce qui fait leur charme), l’auteure prenant un malin plaisir à nous orienter sur des fausses pistes, sur fond de migrants en situation illégale, ou de voisin amoureux transis. L’auteure évoque aussi, au passage, les mariages mixtes : le père d’Aurora est Islandais, sa mère Anglaise, et cette dernière est retournée vivre en Angleterre. Les deux filles ont également fait un choix, seule Ísafold a choisi de rester à Reykjavik.

Le dénouement m’a beaucoup plu, même si je l’avais quelque peu anticipé. Le dépaysement est toujours garanti, avec ces polars nordiques, champs de lave, soleil qui ne se couche jamais (ou l’inverse selon la saison), les noms aussi mystérieux qu’imprononçables…

C’est le premier roman de Lilja Sigurdardottir que je lis, alors qu’il s’agit de son cinquième opus, sa trilogie Reykjavík Noir connaissant un certain succès et je dois reconnaître que c’est une agréable surprise.

Un grand merci à NetGalley et aux éditions qui m’ont permis de découvrir ce roman et son auteure.

J’ai encore quelques polars en réserve, mais l’enthousiasme est en train de baisser, je reviens, peu à peu, à mes centres d’intérêt habituels, c’est comme le chocolat, il ne faut pas en abuser…

#Froidcommelenfer #NetGalleyFrance !

7/10

L’auteure :

Lilja SIGURDARDÓTTIR est née en 1972, elle est auteur de théâtre et de romans noirs, et participe à l’organisation du Festival Iceland Noir de Reykjavík. Elle vit entre l’Islande et Glasgow. Sa trilogie Reykjavík Noir est traduite en huit langues et a rejoint la liste des best-sellers dans de nombreux pays. Elle est aussi choriste du groupe de rock Fun Lovin’ Crime Writers.

Extraits :

Cet instant constituait un véritable tournant dans son existence. Accablé de chagrin, il était mû par une détermination nouvelle, aussi vive et acérée qu’une lame d’acier. Désormais, tout serait différent. Il n’était plus le même homme. Désormais, il était capable de tuer.

Ils marchaient dans une direction bien déterminée, contrairement aux touristes, et beaucoup plus vite, dans une attitude indiquant qu’ils étaient en retard pour leur travail. C’était tellement islandais, de toujours vivre dans la précipitation, de toujours tout faire à la dernière minute.

Voilà une des choses qui lui avaient manqué de l’Islande, enfant, après que sa famille s’était installée en Angleterre. Ces matins d’été porteurs d’une promesse. Le soleil déjà haut et le vent marin encore à peine perceptible permettant aux petites maisons recouvertes de tôle ondulée bigarrée d’absorber la chaleur des rayons lumineux.

Il était souvent envahi de ce même sentiment en démarrant une enquête, et en général cette petite lueur qui clignotait dans sa tête, ce petit caillou dans sa chaussure, ce petit sifflement ô combien agaçant se révélaient fondés. Une sorte d’intuition qu’il avait sans doute toujours possédée mais à laquelle il avait appris à se fier avec l’âge et qui n’annonçait jamais rien de bon.

Lu en avril 2022

« Les filles qui mentent » de Eva Björg AEgisdottir

Intermède polar et voyage en Islande, on s’évade comme on peut, avec le roman dont je vous parle aujourd’hui :

Résumé de l’éditeur :

Une jeune mère désespérée se tient immobile dans une maternité, incapable de regarder son propre enfant qui vient de naître. C’est le début d’une relation étrange et brisée entre la mère et l’enfant, qui mènera à une tragédie redoutable.

Quinze ans plus tard, en effet, le corps d’une femme est retrouvé gisant dans un champ de lave… Cela fait sept mois que cette mère célibataire avait disparu, ne laissant qu’un simple mot d’excuses sur la table de la cuisine. Que s’est-il passé durant tout ce temps ? Le nouveau quotidien de sa fille Hekla, désormais choyée par sa famille d’accueil, ne cache-t-il pas une réalité plus sombre ? Au fur et à mesure que la liste des suspects s’allonge pour le meurtre, de nouvelles lumières sont jetées sur le passé de la mère,­ et sur l’enfance d’une fille qui n’a jamais été comme les autres… Elma, inspectrice de police dans la petite ville d’Akranes, est chargée d’enquêter.

Cruauté adolescente, préjugés de petite ville, mensonges d’enfants qui souffrent pour les péchés de leurs parents. Les filles qui mentent est un thriller psychologique saisissant à l’enquête policière sophistiquée, qui porte Eva Björg Ægisdottir au rang des nouveaux grands noms du roman policier contemporain.

Ce que j’en pense :

Je ne reviendrai pas sur l’intrigue : le corps d’une femme disparue quelques mois auparavant est retrouvée dans un champ de lave. Il s’agissait donc d’un assassinat. L’enquête est confiée à Elma, inspectrice et à son collègue Saever, sous la houlette du chef Hördur…

Il s’agit donc de Marianna Törstdottir et curieusement cela n’a pas l’air d’affecter outre mesure sa fille Hekla, mais les relations entre la mère et la fille n’ont jamais été au beau fixe : l’association drogue alcool et autres, l’ayant conduite à laisser plusieurs fois sa fille seule sans soin à la maison : 3 jours lorsqu’elle n’avait que 4ans et plus tard plus d’une semaine. Tout ceci s’étant terminé par un placement en famille d’accueil. Famille qui désire l’adopter et dans laquelle Hekla se sent aimée…

Le récit alterne entre passé et présent ce que j’apprécie en général, quoi que dans ce roman, il m’a fallu du temps pour identifier la narratrice, j’étais partie sur une fausse piste.

Il s’agit du deuxième opus de l’auteure, mais ce n’était pas gênant pour la lecture, dans les relations entre les policiers, leurs échanges, quelque chose m’échappaient mais cela n’a pas posé de problème, à part l’envie d’en savoir plus…

L’auteure nous emmène dans le parcours de ces femmes, les grossesses non désirées, l’instinct maternel qui ne fonctionne pas, les relations plus ou moins toxiques, la manière dont on compense l’absence de tendresse par des cadeaux ou de l’argent facile parfois…

J’ai apprécié ces mensonges qui se répètent au fil des années, entraînant des drames, l’aplomb de ces femmes qui finissent toujours par retomber sur leurs pieds et le dénouement que je n’avais pas vu venir m’a épatée. Quand à l’écriture, notamment la syntaxe, je préfère m’abstenir.

J’ai aimé retrouver l’Islande, les champs de lave, les paysages, la nature, les noms imprononçables qui font déjà rêver et la lenteur de ses polars mais, même si j’ai passé un bon moment, je ne suis pas sûre que ce livre me laisse un souvenir impérissable d’où la note mitigée (je ne vais pas me faire des amis vue sa côte de popularité sur Babelio par exemple, mais tant pis j’assume)…

Un grand merci à NetGalley et aux éditions La Martinière qui m’ont permis de découvrir ce roman et son auteure.

#LesFillesquimentent #NetGalleyFrance !

7/10

L’auteure :

Née à Akranes en 1988, Eva Björg Ægisdóttir vit à Reykjavík avec son mari et ses trois enfants. Elma, son premier roman, a été numéro 1 des ventes en Islande. Il a été récompensé du Blackbird Award, un prix créé par Yrsa Sigurðardóttir et Ragnar Jónasson pour promouvoir les nouvelles révélations du polar islandais.

Extraits :

Enfant, Elma adorait aller se promener sur la plage elle-aussi. Elle emportait un petit récipient pour accueillir les coquillages et passait des heures à observer tout ce que la mer avait à offrir. Ces sons, ces odeurs avaient toujours un effet apaisant. Comme si les problèmes du monde se tenaient à distance de l’océan.

Il (Hördur) devrait en toucher un mot à ses enfants. Leur demander d’épargner leur mère les semaines où elle avait une séance de rayons. Il lui faudrait juste prendre garde à ce que sa femme n’en entende pas parler, sinon il risquait de se faire remonter les bretelles.

Il ne savait pas quoi dire ni faire, en face d’eux. Il se sentait stupide quand il prenait une petite voix comme la plupart des gens le faisaient…

Les sage-femmes me disaient que ce serait plus facile avec le temps, et j’imagine qu’elles avaient raison. Certaines choses le sont, à présent que j’ai un emploi. On se réveille, je l’habille et je l’emmène chez sa nounou. Pendant huit heures, je ne pense à rien d’autre qu’à moi et à mon travail que j’adore.

Je n’ai pas envie de la consoler. Pas envie de la voir ni de l’entendre. A cet instant, je voudrais qu’elle soit le problème de quelqu’un d’autre. J’ai honte de penser une chose pareille, je ne le dirai jamais à voix haute, mais c’est ainsi, je n’arrive pas à aller la voir…

La culpabilité m’assaille fréquemment lorsque je la regarde, car c’est ma faute si elle est pas comme ça. Toutes ces années où je l’ai privée de la tendresse dont elle avait besoin ont dû avoir un impact. Parfois, je me demande ce que serait ma vie si je n’étais pas tombée enceinte…

Lu en avril 2022

« Mort sur le Nil » : Agatha Christie

Je vous parle aujourd’hui d’un livre qui m’avait beaucoup plu à l’adolescence et que j’ai eu envie de relire dans cette nouvelle traduction :

Résumé de l’éditeur :

Quoi de plus reposant et tranquille qu’une croisière sur le Nil ? Sauf quand on retrouve à bord le corps de Linnet Ridgeway tuée d’une balle dans la tête. Linnet avait tout pour elle, jeunesse, beauté, richesse… tout jusqu’à ce qu’elle perde la vie ! 

 Parmi les passagers, tous sous le choc d’une telle découverte, se trouve Hercule Poirot, le célèbre détective belge. Et voilà que justement il se rappelle avoir entendu un homme dire au sujet de la victime : « Je poserai bien mon pistolet contre sa tempe et j’appuierai sur la gâchette ! »   Mais cette déclaration, si elle n’est pas anodine, ne fait pas forcément de vous le coupable idéal. 

Ce que j’en pense :

Hercule Poirot est en train de dîner dans un restaurant lorsque son attention est attirée par un jeune couple qui occupe une table voisine. Il constate d’emblée que, si ces deux-là sont amoureux, la jeune femme semble plus éprise que son compagnon qui comme il se le formule intérieurement, se contente de se laisser aimer. Il s’agit de Jacqueline de Bellefort et Simon Doyle.

Quelques mois plus tard alors qu’il effectue une croisière sur le Nil dont il rêvait depuis longtemps, il constate que Simon a épousé une riche héritière : Linnet Ridgeway, par ailleurs l’amie de Jacqueline qui lui avait demandé d’embaucher Simon. Tous deux ont choisi cette croisière comme voyage de noces…

Jacqueline, pleine de colère après cette trahison, s’est invitée à la croisière et empoisonne la vie du jeune couple, affirmant au passage à Hercule Poirot son envie de « tirer une balle dans la tête » de Linnet… Bien sûr celle-ci est retrouvée morte, mais Jacqueline a un alibi : elle a tiré sur Simon le blessant au genou après avoir abusé des cocktails au bar. On l’accompagne « en état de choc.

Linnet ne s’est fait que des ami(e)s, elle n’a que 18 ans lorsqu’elle se marie donc tous ceux qui « géraient sa fortune » n’apprécie guère, elle a racheté le manoir Wode Hall à un homme ruiné, elle est belle donc attise curiosité, jalousie… Tenues somptueuses, bijoux qui le sont tout autant…

Ce livre m’a beaucoup plu à l’adolescence et j’ai eu envie de le relire, dans cette nouvelle traduction. Je me rappelais parfaitement qui avait tué qui et comment, mais j’avais oublié les autres personnages, intrigues et morts brutales. Et bien, force est de reconnaître que le charme a parfaitement fonctionné en deuxième lecture.

La couverture est très belle, nettement plus tentante que ma vieille édition en jaune et noir. J’avais prévu de comparer les deux traductions mais je n’ai réussi à remettre la main sur le premier…

J’ai lu plusieurs romans de la Reine du polar, à l’époque, souvent lors de la préparation des examens, en alternance avec une aventure d’Astérix selon les époques et j’ai retrouvé avec plaisir le style d’Agatha Christie, la manière dont Hercule Poirot fait fonctionner ses petites cellules grises comme il se plaît à le dire, en prenant bien soin de multiplier les indices pour mieux égarer le lecteur.

Mon préféré reste quand même « Le crime de l’Orient Express » que j’ai relu en version BD il y a quelques temps et vu les adaptations au cinéma.

Un grand merci à NetGalley et aux éditions J.C. Lattès qui m’ont permis de redécouvrir ce roman et ainsi retrouver la plume de son auteure.

#MortsurleNilNouvelletraductionrévisée #NetGalleyFrance

8/10

Extraits :

Nu-tête, vêtue d’une robe qui avait l’air tout simple – mais qui en avait l’air seulement – une fille était descendue de la voiture. Une fille aux cheveux d’or, au visage régulier, à la silhouette parfaite. Une fille qui ne semblait pas du genre à se laisser impressionner… Une fille comme on n’en voyait guère à Malton-under-Wode.

On dit parfois que l’homme a été obligé d’inventer le travail pour éviter de penser, et c’est bien vrai.

Il y avait de la sauvagerie dans ce plan d’eau qui s’étendait devant eux, dans ces escarpements de rochers dénudés qui semblaient l’enclore, dans ces vestiges de maisons englouties par la montée des eaux consécutives à l’endiguement du fleuve. Le paysage tout entier respirait la mélancolie et dégageait une manière de charme quasi maléfique…

Il y avait de la sauvagerie dans ce plan d’eau qui s’étendait devant eux, dans ces escarpements de rochers dénudés qui semblaient l’enclore, dans ces vestiges de maisons englouties par la montée des eaux consécutives à l’endiguement du fleuve. Le paysage tout entier respirait la mélancolie et dégageait une manière de charme quasi maléfique…

Lu en avril 2022

« La ferme aux poupées » de Wojciech Chmielarz

Je ne peux pas envisager ce challenge « le mois de l’Europe de l’Est » sans un roman de cet auteur au prénom imprononçable, que j’ai découvert l’an dernier avec son premier livre « Pyromane » :

Résumé de l’éditeur :

L’inspecteur Mortka, dit le Kub, a été envoyé à Krotowice, petite ville perdue dans les montagnes. Officiellement, il est là pour un échange de compétences avec la police locale. Officieusement, il y est pour se mettre au vert après une sale affaire. S’il pense être tranquille et avoir le temps de réfléchir à l’état de sa vie personnelle, il se trompe lourdement.

Quand Marta, onze ans, disparaît, un pédophile est rapidement arrêté, qui reconnaît le viol et le meurtre de la petite.

Mais l’enquête est loin d’être terminée : les vieilles mines d’uranium du coin cachent bien des secrets… et peut-être quelques cadavres.

Il faudra tout le flair du Kub pour traquer des trafiquants dont la cruauté dépasse l’entendement.

Ce que j’en pense :

Marta, une petite fille qui attend, seule, au bord de la route, est abordée par un homme qui réussit à la faire monter dans sa voiture. Elle disparaît sans que cela paraisse émouvoir vraiment sa famille. On évoque l’acte d’un pédophile, déjà connu pour des délits, et la consultation de sites pédopornographiques, mais qui n’est semble-t-il jamais encore passé à l’acte.

Arrêté, l’homme avoue l’enlèvement et le meurtre de la fillette, mais celle-ci finit par être retrouvée dans une ancienne mine d’uranium, à côté de cadavres en décomposition.  En lait, l’homme avait avoué car il redoutait un passage à l’acte… Libéré, on le retrouve assassiné quelques jours plus tard. Qui l’a tué ? Y-a-t-il un rapport avec les cadavres retrouvés dans la mine ?

C’est l’inspecteur Lupa de la brigade de Krotowice, qui mène l’enquête, supervisée par le commissaire Zajda, qui tient à tout prix à garder cette enquête sinon on risque de réduire son budget et son équipe. Notre ami Mortka, n’est que consultant dans cette enquête, car depuis qu’il a abattu le pyromane (cf. enquête précédente) on l’a envoyé au vert en province dans le cadre d’un « programme d’échange » pour ne pas dire au placard…

J’ai beaucoup aimé retrouver Mortka, surnommé « Le Kub », policier intègre qui a toujours fait passer son métier avant tout et par voie de conséquence son couple qui a explosé en vol. Il doit trouver sa place dans une équipe dont certains membres feraient mieux de changer de travail… J’apprécie la manière dont il mène ses enquêtes, dont il réfléchit au lieu de foncer tête baissée, son intuition, son attitude envers les suspects…  

Wojciech Chmielarz nous décrit une région de Pologne, où règne un racisme dirigé contre la communauté Tzigane, coupable d’office pour certains, avec des disparitions qui n’inquiètent personne, sur fond de trafic d’être humains, avec des rebondissements des complicités au sein même de la police parfois, et nous oriente dans des directions multiples, où l’on finit par suspecter tout le monde.

Il revient sur les mines d’uranium, du temps de l’époque soviétique, où les ouvriers ne savaient même pas qu’ils étaient exposés à la radioactivité, avec les conséquences qu’on imagine. Il évoque également la nostalgie de l’époque communiste où policiers, miliciens avaient tous les pouvoir et donc étaient respectés.

J’aime beaucoup cet auteur et son univers, car on voit la manière de travailler de la police en Pologne tout en revenant sur l’Histoire du pays. Son troisième opus « La Colombienne » m’attend déjà mais je fais durer le plaisir alors ce sera pour le challenge de l’an prochain, car Olga Tokarczuk avec « Sur les ossements des morts » et Zygmunt Milozsewski et « Les impliqués » piaffent d’impatience…

8,5/10

Extraits :

Le Kub, je ne comprends pas très bien moi-même, mais c’est comme ça. Si un Tsigane collabore avec la police, il cesse d’être tsigane. On ne peut plus manger avec lui, ni dormir, ni lui parler. Il est exclu de la communauté. A vie. C’est la sanction la plus sévère.

Soudain, Mortka se figea, sentant ses cheveux se dresser sur sa tête. Il venait de comprendre. Devant lui, un encadrement de béton était planté dans la roche, et des planches bloquaient l’entrée d’une ancienne mine.

Son père et ses collègues savaient parfaitement qu’ils extrayaient de l’uranium. Qu’on ne leur ait jamais expliqué en quoi consistait l’uranium, c’était une autre chose. Les Soviets stipulaient bien de ne pas prendre de repas sous terre, sous aucun prétexte, mais qui aurait perdu du temps à remonter à la surface après être tombé sur un bon filon ? Car ils recevaient, en fonction de la production, des pries dont même les mineurs de Walbrzych n’auraient jamais rêvé. Un âge d’or pour Kretowice…

Zajda se trouvait, lui, nez à nez avec une autre menace : un troupeau de jeunes chômeurs privés de tout espoir, brutalement écrasés par un monde qu’ils avaient cru sûr. Il était effrayé, car il lisait dans leurs yeux et leurs gestes que l’uniforme n’avait plus rien de sacré.

L’époque où le milicien de la Pologne communiste était un dieu était bien révolue. Le régime avait disparu, et il avait depuis l’impression d’avoir été rétrogradé à un statut de chien de garde. Un chien, ça reste au bout de sa chaîne, et on le fait obéir avec un bâton s’il aboie trop fort.

Lu en mars 2022

« Les racines des ombres » de François Rabes

Je vous parle aujourd’hui d’un livre d’un polar, premier opus de son auteur, dont la couverture m’a tapé dans l’oeil, et qui m’a tenue en haleine du début à la fin :

Résumé de l’éditeur :

Les Vosges.

Une profanation de cercueil réveille la mémoire d’un terrible fait divers survenu quarante ans plus tôt. L’enquête est confiée à Claire, jeune substitut du procureur. Des zones d’ombres apparaissent bientôt et viennent éclairer l’affaire sous un autre jour. Entre un capitaine de gendarmerie hostile et une famille de forains dans le viseur de la justice, ses premiers pas sur le terrain vont s’avérer plus complexes que prévus. Simultanément, un couple et leur petite fille de six ans emménagent dans une vieille maison à rénover. Mais ce qui devait être un nouveau départ pour Michel, fils d’un puissant industriel de la région, sonne bientôt comme une plongée dans les méandres d’un épisode tragique qu’il croyait oublié. Une peur tenace revient le hanter et va le conduire sur les traces de son passé.

Et si quelque chose ou quelqu’un reliait les deux événements ? Et si l’ombre qui plane sur Michel depuis son enfance prenait racine au cœur des investigations menées par Claire ?

La vérité les attend. Mais pour l’atteindre, ils devront l’un et l‘autre braver leurs propres démons.

Ce que j’en pense :

Cap sur les Vosges donc, avec une histoire passionnante ! En faisant des travaux sur l’ancien cimetière de la commune, les ouvriers mettent à jour une tombe profanée. Il s’agit de celle d’une jeune fille assassinée il y a près de quarante ans, meurtre sordide pour lequel un jeune gitan a été jugé coupable, de manière expéditive et condamné à la prison.

Il vient de sortir, après avoir purgé sa peine, mais évidemment les soupçons vont se porter sur lui. L’enquête sur la profanation est menée à charge, une nouvelle fois par le capitaine de gendarmerie, malgré l’opiniâtreté de Claire, substitut du procureur. Autrefois l’enquête a été menée par Jacques qui s’est recyclé en puissant industriel, directeur d’une scierie, qui règne en maître absolu sur son entreprise et sur sa famille, notamment son fils Michel qui a vécu une expérience traumatisante quand il était âgé de six ans…

L’intrigue m’a beaucoup plu, avec de nombreux tiroirs, rebondissements, des manipulations en tous genres, avec des intrications avec le passé. Les personnalités des protagonistes sont vraiment approfondies, notamment celles de Michel et de son père Jacques. Certains sont carrément machiavéliques et nous offrent des surprises, qui vont nous tenir en haleine jusqu’à la dernière phrase, car le final est grandiose !

François Rabes nous propose, au passage, une réflexion amère sur la société d’aujourd’hui, son côté autocentré, où seuls les puissants sont intéressants (et dignes de vivre selon Jacques !)

Je mettrais un bémol, qui m’a gâché (un peu ) le plaisir : un capitaine de gendarmerie, imbu de lui-même se croyant au-dessus des lois, d’une misogynie effroyable, pervers, blessant, traitant Madame la substitut du procureur de manière abominable : du harcèlement en grandes largeurs, et de surcroît raciste, appelant Dario, le gitan forain, « le romanichel » avec le mépris le plus complet pour tout ce qui ne pense pas comme lui, n’est pas un Blanc suant la testostérone comme lui…

Un roman qui, en plus de tenir le lecteur en haleine, surfe de belle manière sur les dangers de nos sociétés modernes, la difficile réinsertion à la sortie de prison, la vie et les illusions spoliées à tout jamais, par une erreur judiciaire…

Un grand merci à NetGalley et aux éditions Hugo Poche Suspense qui m’ont permis de découvrir ce roman très prometteur, le premier de François Rabes dont je vais surveiller les prochaines parutions.

#Lesracinesdesombres #NetGalleyFrance !

8/10

L’auteur :

Réalisateur et scénariste, auteur de courts métrages multi-primés, clips musicaux et autres réclames (comme dirait Jean-Pierre Jeunet dont il fut le stagiaire après lui avoir adressé un courrier sous forme de Story- Board) François Rabes signe son premier roman avec Les racines des ombres et remporte le concours Les Lieux Noirs, organisé par Fyctia et les éditions Hugo & Cie.

Extraits :

Le charisme n’est pas toujours héréditaire. Michel en était la preuve vivante. Sa posture, sa manière de croiser les mains dans le dos, d’être légèrement voûté en dansant d’un pied sur l’autre, le rangeait d’emblée dans le tiroir des dos ronds, ceux qui écoutent mais ne l’ouvrent pas, ou rarement. Pas vraiment porté par la spiritualité, Michel ne savait pas que « vivre, c’est apprendre à danser sous la pluie »

Dario avait assisté impuissant à cette mutation radicale et violente au cours des quinze dernières années. Les méthodes d’hier, le respect de certaines règles et des aînés, étaient bonnes pour la casse. La répartition des territoires était devenue fragile, même après accord entre familles. Le moindre petit voyou d’aujourd’hui voulait tout, tout de suite.

Jacques avait l’impression d’être poussé en fauteuil roulant. Il lui prenait alors l’envie de distribuer des baffes à tous ces petits singes savants donneurs de leçons et de conseils, cette génération nivelée vers le bas et autocentrée, persuadée d’incarner le monde par le seul fait d’exister.

Le fatalisme n’existait pas dans son mode de pensée et d’action. Autrement dit, le triomphe des uns provoquait forcément la défaite des autres. Car oui, le monde des affaires ne se traitait pas autrement. Et ceux qui vous disaient le contraire étaient des ratés, des perdants de l’histoire.

Les signes de faiblesse, il avait toujours laissé cela aux autres. On ne tend pas la main à ceux qui souffrent, on les évite, on s’en éloigne. C’était cela la vérité. Et Jacques n’avait jamais laissé personne le prendre en pitié ou lui tourner le dos…

De nos jours, tout le monde était expert et s’arrogeait le droit de répandre sa vérité, son émotion, son ressenti. Que ce soit sur les réseaux sociaux ou sur les plateaux télé où de soi-disant spécialistes venaient régulièrement débattre en boucle sur les mêmes sujets, mais surtout s’écouter parler…

Michel appartenait à cette génération qui ne cherchait pas à bâtir. L’idée de socle, de pérennité, de vouloir marquer son passage ne signifiait rien pour ces troupeaux désabusés, pour ne pas dire désespérés. Une relève qui se plaignait constamment d’avoir hérité de sociétés malades dirigées par des politicards véreux. Mais depuis quand devait-on hériter de quoique ce soit ? Personne ne lui avait jamais rien donné, à lui…

Lu en février 2022

« Bain de minuit à Buckingham » de S.J. Bennett

Je vous parle aujourd’hui d’un livre fort sympathique, véritable friandise dans ces moments de sinistrose que nous traversons ; il s’agit du deuxième tome de la série « Sa Majesté mène l’enquête » dont j’avais découvert le premier il y a quelques mois :

Résumé de l’éditeur :

Après un démarrage majestueux, le deuxième volume de la royale série de cosy mysteries « Sa majesté mène l’enquête ».

L’année 2016, marquée par le référendum sur le Brexit, s’annonce difficile pour Elizabeth II : l’un de ses tableaux préférés, mystérieusement disparu de sa collection privée des années plus tôt, réapparaît dans une exposition. La reine confie à Rozie, sa secrétaire particulière adjointe, la mission de le récupérer, de préférence avec des explications. Pour couronner le tout, l’ambiance au palais de Buckingham est gangrenée par une vague de lettre anonymes.

Lorsque l’une de ses femmes de chambre est retrouvée morte, exsangue, au bord de la piscine, c’en est trop pour la souveraine, qui décide d’intervenir. Tremblez corbeaux, meurtriers, voleurs et autres pourfendeurs de la royauté : Sa Majesté mène l’enquête !

Ce que j’en pense :

Sir Simon, secrétaire particulier de Sa Gracieuse Majesté a décidé de soigner son apparence en se rendant à la piscine pour faire quelques longueurs. Une surprise l’attend : il tombe sur le corps complètement exsangue d’une femme de chambre fort peu appréciée de ses collègues. Accident ? Meurtre ? « Shocking ! »  Sa Majesté doute…

Retour quelques mois en arrière : un tableau représentant le Brittania, le yacht de la Reine, au bord duquel elle a vécu tant de belles choses, tableau de piètre qualité en fait mais ô combien riche sur le plan émotionnel, figure dans une exposition où il n’aurait jamais dû être puisqu’il appartient au domaine privé.

Rozie, la secrétaire particulière adjointe se voit confier la mission d’enquêter sur cette mystérieuse disparition par la Reine, tout en appelant en renfort un inspecteur.

J’ai beaucoup aimé retrouver Sa Gracieuse Majesté, son époux Philip dont j’apprécie toujours autant l’humour pince sans rire, et les surnoms originaux dont il affuble son épouse ainsi que Rozie et son efficacité coutumière, sur fond de trafic d’objets, de lettres anonymes en tout genre, voire de racisme le tout sur fond de Brexit qui irrite au plus haut point le Prince, qui se « console » en ironisant sur les tailleurs de Teresa May et ses chaussures en léopard.

Il y a beaucoup de plaisir à observer la Reine mener l’enquête, sans se mettre en avant, se promenant dans le palais et les autres résidences, ses Corgis sur les talons, la suivre dans ses entretiens avec les Chefs-d’Etat étrangers et leurs exigences parfois risibles, sans jamais élever un sourcil, tandis que les élections américaines s’acheminent vers l’impensable…

J’aime bien la manière dont les membres de son personnel, notamment Sir Simon et Rozie, essaie de lui cacher les choses, en lui affirmant que tout est sous contrôle, petite phrase qu’elle déteste comme si elle avait besoin qu’on la traite comme une chose fragile.

L’enquête est plus lente que la précédente mais c’est un plaisir, et un dépaysement total, dans les jardins comme dans les immenses pièces qui se délabrent… un polar à part, friandise qui se consomme sans modération. J’attends le prochain tome avec impatience et plaisir, même si je sais que Philip ne sera plus là…

Un grand merci à NetGalley et aux éditions Presse de la Cité qui m’ont permis de découvrir ce roman et de retrouver la plume et la pétillance de son auteure.

#BaindeminuitàBuckingham #NetGalleyFrance !

8/10

Extraits :

La reine se doutait que l’article du Daily Telegraph devait traiter du Brexit, d’où l’humeur de Philip, plus irritable que d’habitude. Adieu Cameron. Le parti en déroute. Tout ce travail de sagouin… à côté de ça, un malheureux tableau peint par un artiste médiocre bien avant l’entrée de la Grande Bretagne dans le marché commun ne semblait pas bien important.

Elle représentait une source de fascination, et elle était observée depuis si longtemps qu’elle avait l’habitude que ses observateurs soient eux-mêmes observés.

Comme temps passait vite. Ou pas. Parfois, on se demandait comment on allait tenir jusqu’à l’heure du thé. D’autres fois, en un clin d’œil, une décennie s’était écoulée.

Qu’allons-nous bien pouvoir faire avec une première ministre pour qui le comble de l’humour, c’est de porter des chaussures léopard ?

Parfois, c’était vraiment usant de constater que même des individus supposément sensés s’attendaient à ce qu’elle s’exprime comme une princesse médiévale dans sa tour d’ivoire. Surtout que les princesses médiévales devaient connaître le sujet aussi.

Le palais était tel un cygne sur un lac : glissant avec grâce en surface, moulinant comme un dératé en profondeur.

Les fondements mêmes de la démocratie semblaient affaiblis comme jamais depuis la guerre, c’est-à-dire avant la naissance de la plupart de ses sujets. Elle sentait que, à l’orée de quelque chose qu’ils ne comprenaient pas pleinement, tous s’accrochaient à leurs valeurs en priant pour qu’elles résistent.

Lu en février 2022

« Reine rouge » de Juan Gomez-Jurado

Nouvel intermède thriller aujourd’hui avec ce livre que j’ai choisi pour son titre, sa couverture et aussi pour connaître davantage les polars espagnols :

Résumé de l’éditeur :

Antonia Scott est spéciale. Très spéciale.

Elle n’est ni flic ni criminologue. Elle n’a jamais porté d’arme ni d’insigne, et pourtant, elle a résolu des dizaines d’affaires criminelles.

Avant de tout arrêter. Depuis un tragique accident, Antonia se terre dans un appartement vide et n’aspire qu’à une chose : qu’on lui fiche la paix.

C’était compter sans l’inspecteur Jon Gutiérrez. Missionné pour lui faire reprendre du service, il parvient à la convaincre d’étudier un dernier dossier, celui d’un assassin sans scrupule qui s’en prend aux héritiers des plus grandes fortunes d’Espagne. Sa particularité ? L’homme ne semble motivé ni par l’appât du gain, ni par le plaisir de tuer.

Un cas complexe auquel la police madrilène n’entend rien.

En un mot, le terrain de jeu favori d’Antonia Scott.

Ce que j’en pense :

Jon Gutiérrez, est un policier sur la touche depuis qu’il a voulu faire tomber un proxénète, violent, en lui mettant sur le dos un trafic d’héroïne, monté de toutes pièces. Dans son grand élan de générosité et d’empathie, il a expliqué son geste à la compagne de l’homme en question, mais cette dernière a filmé la scène sur son téléphone portable et la vidéo a été virale sur les réseaux sociaux. 

Un homme se présente pour son « entretien », Mentor, qui lui propose un étrange marché : rendre chez Antonia Scott, qui est en mode survie depuis trois ans, car son mari est dans le coma après avoir été agressé à leur domicile et Jon réussit à la convaincre de reprendre du service, tout sera effacé.

Après une prise de contact houleuse, Jon parvient à entraîner Antonia sur une scène de crime : dans une villa somptueuse, dans un quartier richissime, un jeune homme a été retrouvé mort sur le canapé, dans une position théâtrale un verre à moitié vide dans une main, qui contient en fait du sang. Le jeune a été totalement vidé de son sang. Aucune trace de violence dans la pièce, donc il a été tué ailleurs et mystérieusement sa disparition n’avait pas été signalé par la famille.

Un binôme se forme, avec deux personnalités très différentes : Jon est un policier, plutôt bien noté, un peu en marge des autres car il est homosexuel et ne s’en cache pas, vit avec sa mère alors qu’Antonia appartient à une organisation qui traque les criminels de façon peu orthodoxe, créée sous couvert de Bruxelles, l’Union européenne.

Antonia est surdouée et elle a été sélectionnée puis formée par Mentor pour son « unité d’élite » avec des méthodes dignes du KGB (ou de la CIA comme on veut !) privation de sommeil, tests à répétition à effectuer le plus rapidement possible, sinon décharge électrique… elle a des crises d’angoisse, des phobies et toujours une boite de « pilules » à portée de main pour canaliser l’anxiété et éviter d’être dépassée par ses pensées (comme des singes dans la tête comme elle dit !)

Cette enquête va nous emmener vers d’autres enlèvements dans des familles richissimes avec un mode opératoire curieux : celui qui enlève téléphone aux familles mais au lieu de leur demander une rançon, il leur demande quelque chose qu’ils ne peuvent pas faire car cela ternirait leur réputation : ou ils reconnaissent leurs « méfaits » ou la personne enlevée meurt dans un délai de 5 jours. Que vaut la vie d’une personne face à la réputation ?

L’enquête est rondement menée avec des scènes intenses (une course poursuite à 200 à l’heure, notamment), une rivalité entre les policiers chargés de l’enquête et notre duo Reine rouge (référence à Alice de l’autre côté du miroir, où la Reine rouge est obligée de marcher constamment pour pouvoir rester sur place), des informations qu’on n’échange pas, un journaliste qui veut la peau de Jon…

La reine rouge dit à Alice que dans son pays, il faut courir pour rester au même endroit, poursuit Mentor. Appliqué à l’évolution des espèces, ça signifie qu’il est nécessaire de s’adapter continuellement pour rester au niveau des prédateurs.

Au passage, l’auteur nous fait découvrir la vie personnelle, les traumatismes, de Jon et Antonia ce qui les rend attachants…

C’est la première fois que je croise la route de Juan Gomez-Jurado et ce ne sera sûrement pas la dernière, car l’idée est originale, l’histoire et le rythme d’une telle intensité que la lecture devient très vite addictive. J’adore être harponnée de cette manière par un thriller, et j’attends de pied ferme le second tome de la trilogie Antonia Scott car Reine rouge est le début de l’aventure.

Un grand merci à NetGalley et aux Fleuve-éditions qui m’ont permis de découvrir ce roman et son auteur dont j’ai hâte de retrouver la plume.

#ReineRouge #NetGalleyFrance !

8/10

L’auteur :

À 33 ans, Juan Gómez-Jurado est un journaliste et auteur espagnol. Il est chroniqueur dans « La Voz de Galicia » et « ABC », distribués en Espagne, et il participe à de multiples programmes radiophoniques et télévisés

Son premier roman, « Espion de Dieu » l’a propulsé vers la gloire internationale. Après le succès de son œuvre, il réalise son rêve et se consacre pleinement à l’écriture. Par la suite, il a publié les romans « Le contrat avec Dieu »

« Reine rouge » est le premier tome de la Saga Antonia  Scott.

Extraits :

L’esprit d’Antonia s’apparenterait plutôt à une jungle, une jungle grouillant de singes, qui bondissent à toute allure de liane en liane, en transportant des choses. Énormément de singes, portant énormément de choses, qui se croisent dans les aies en montrant les crocs.

Les flics ont un point commun avec les chiens : une année de service en vaut sept dans l’âme. 

Les séries télévisées ont donné une image si déformée du travail de la police scientifique que même les flics finissent parfois par se faire avoir et par croire aux miracles.

Selon la théorie du même nom, un « cygne noir » est un événement exceptionnel, d’une portée considérable, mais que ni la science, ni l’histoire ne permettent d’anticiper et qui ne peut être rationalisé qu’a posteriori. Comme le11 septembre, la crise financière de 2008 ou le retour des sacs-bananes.

Bref, la conclusion de l’étude en question a été que la création de l’Union européenne a engendré un monde nouveau. Sans frontières, sans douanes. Cinq millions de kilomètres carrés où les criminels peuvent circuler comme bon leur semble. Et des centaines de forces de police qui se tirent la bourre. C’est comme ça qu’est né le projet Reine rouge.

La police est lente, sûre, prévisible. C’est un éléphant qui fonce tête baissée vers son but et écrase tout sur son passage. Nous sommes autre chose.

Il avait du mal à croire en une Église qui ne croyait pas en lui, mais peu importait, car il était convaincu que Jésus lui-même ne croyait pas en sa propre Église. Antonia, naturellement, était une fervente athée. Une autre forme de religion, sans les inconvénients…

A elle seule, l’Espagne compte plus d’un million de psychopathes ? très peu d’entre eux iront jusqu’à tuer, la plupart mèneront une vie en apparence normale ? Heureux à leur poste de directeur des ressources humaines, de ministre, de patron de café. S’ils en viennent à faire du mal à quelqu’un, ce sera à petite échelle. Pas de quoi en faire un film …

Lu en janvier 2022

« Noces sanglantes » de Marshall Karp et James Patterson

Je vous parle aujourd’hui d’un gentil polar, lu en même temps que je découvrais « Les prophètes » mais aussi parallèlement à une autre lecture forte: « La liberté des oiseaux » car j’avais besoin de pouvoir reprendre mon souffle :

Résumé de l’éditeur :

Quand le mariage du siècle…

Erin Easton, star de téléréalité, vient d’épouser le fils de Veronica Gibbs, la richissime directrice d’une agence de mannequins. « Mariage du siècle », « Mariage de rêve » … Autant de superlatifs pour qualifier ces noces people retransmises en direct à la télévision.

Mais, alors qu’elle doit monter sur scène après la cérémonie pour un tour de chant devant ses invités, Erin est introuvable. Une fois sa loge ouverte, on découvre des traces de lutte et sa robe de mariée maculée de sang !

… s’achève dans le sang !

Une affaire pour le NYPD Red, l’unité d’élite de la police new-yorkaise chargée de protéger les rich and famous. Zach Jordan et sa partenaire Kylie MacDonald pensent d’abord à un énorme coup de pub. Jusqu’à ce que le ravisseur se manifeste à nouveau… de façon spectaculaire !

Ce que j’en pense :

La scène s’ouvre sur la réception du mariage d’Erin Easton, star bien connue de la téléréalité. Alors que la fête bat son plein sous l’œil des invités endimanchés comme il se doit, Erin s’absente pour aller se changer avant de se livrer à un show.

Tous les flics, actuels et ceux qui se sont recyclés dans le business plus rentable de gardes du corps, videurs et autres. Comme elle ne revient pas, le grand jeu : on défonce la porte, la robe de mariée est bien là tachée de sang mais plus d’Erin… Kylie, invitée de dernière minute, est sur les lieux et se lance dans l’enquête avec son coéquipier et ex-amant Zach Jordan, dans le cadre du NYPD Red, chargée de protéger les personnes riches et célèbres (cela va souvent ensemble !).

Une demande rançon ne tarde pas à arriver car le nouvel époux est riche, mais la fortune est entre les mains de sa mère, Veronica, gérante d’une agence de mannequins, qui désapprouve le mariage auquel elle n’a pas voulu assister. Celle-ci clamant haut et fort qu’elle ne paiera jamais.

L’enquête va nous entraîner dans un milieu qu’affectionnent notre duo : fortunes colossales, jalousie, téléréalité, journalistes sans foi ni loi, prêts à tout pour faire monter les audiences. On apprend très vite que le preneur d’otage est un fan amoureux d’Erin, qui la poursuit depuis des lustres, car il est persuadé qu’elle l’aime aussi !

On passe par tous les états d’âme car les auteurs nous entraînent sur différentes pistes, en ajoutant une autre enquête, le gang des ambulances, qui dévalise les personnes aisées et âgées, pour mieux nous perdre…

C’est la 6e enquête de la série « NYPD Red » de notre duo (et la deuxième que je lis) et j’ai eu du plaisir à les retrouver, car l’enquête est crédible, mais comme ce milieu du showbiz ne l’intéresse guère, il y a forcément des bémols.

C’est le genre de polar qui m’accompagne entre deux lectures difficiles ou de manière concomitante, car il se lit d’une traite, l’humour des auteurs est toujours présent, et certaines scènes sont savoureuses : Il faut reconnaître que le mari d’Erin, qui ne brille pas particulièrement par son intelligence et son esprit d’initiative, maltraité par sa mère acariâtre est attachant.

Les relations entre Kylie et Zach, leurs histoires d’amour, sont amusantes et la description de la police et de ses méthodes face aux médias est également drôle car assez proche de la réalité.

Quoi qu’il en soit, cette lecture a rempli son rôle et en période de sinistrose, et cela fait du bien.

Un grand merci à NetGalley et aux éditions L’Archipel qui m’ont permis de découvrir ce roman et de retrouver leurs auteurs.

#Nocessanglantes #NetGalleyFrance !

7/10

Extraits :

Bobby mit une semaine à repérer l’endroit où il allait se garer. Il fallait que ce soit près du lieu où se déroulerait la réception, mais pas trop. Et comme il risquait de rester pendant deux ou trois heures dans un fourgon volé, il valait mieux opter pour un secteur où les flics ne patrouillent presque jamais…

Apprends des erreurs des autres, avait coutume de lui dire son père. Tu ne vivras pas assez vieux pour les faire toutes toi-même

Nous venions de traverser le pont Robert Kennedy reliant le Bronx à Manhattan et roulions vers le commissariat. Il était minuit passé mais on y trouverait une armée de flics plongés dans leurs notes après des centaines d’interrogatoires, y cherchant la pépite susceptible de propulser leur carrière sur orbite.  Penchés sur eux, un peloton de chefs impatients exigeant des réponses immédiates car sommés de fournir des réponses immédiates à leurs propres chefs impatients…

Lu en décembre 2021