« La Bible perdue » d’Igor Bergler

Je vous parle aujourd’hui d’un thriller qu’on pourrait baptiser historico-ésotérique dont le résumé a attiré mon attention :

Résumé de l’éditeur :

Interrompu par la police roumaine en pleine conférence, le célèbre professeur Charles Baker, de l’université de Princeton, croit d’abord à une méprise. Que peut-il avoir à faire avec les vicissitudes de Sighisoara, petite ville au fin fond de la Transylvanie ? Pourtant, lorsqu’il parvient sur la scène de crime devant trois cadavres auxquels il manque les yeux, les oreilles et la langue, la mise en garde est claire : ne rien voir, ne rien entendre, ne rien dire.

 En dépit des menaces, accompagné de Christa, enquêtrice d’Interpol, Charles poursuit ses recherches sur les traces du mystérieux sabre de Vlad l’Empaleur, et de la première Bible de Gutenberg, supposée renfermer un message secret auquel le destin de l’humanité serait lié. Mais il n’est pas le seul à convoiter cette fameuse relique : une étrange organisation agit dans l’ombre et le suit pas à pas pour mettre la main sur le livre sacré avant lui…

Ce que j’en pense :

Charles Baker, professeur réputé de Princeton, s’apprête à faire une conférence sur l’histoire médiévale, lorsqu’il est interrompu par la police roumaine car des meurtres étranges viennent d’être commis, avec une mise en scène pouvant évoquer un rituel : on leur a enlevé les yeux, les oreilles et la langues ».

Charles va donc mener l’enquête en compagnie de Christa, agent d’Interpol, avec des policiers aux méthodes encore dignes de l’ex-URSS. On va les suivre de Sighisoara en Roumanie, à Prague, en passant pas la Hongrie, avec des meurtres à répétition, des agents peu catholiques qui les espionnent, des menaces de tous ordres.

Au départ, Charles veut obéir à une des dernières volontés de son grand-père, en tentant de récupérer un sabre mystérieux ayant appartenu à Vlad Tepes, alias Vlad l’Empaleur, alias Dracula (fils du Dragon) mais pour cela il doit en fait résoudre toutes sortes d’énigmes qu’on lui fait parvenir par des moyens rocambolesques. C’est ainsi qu’on va lui demander de retrouver une bible éditée par Gutenberg ayant la particularité de contenir une mystérieuse liste sur laquelle un groupe secret veut absolument mettre la main.

Mais, un mystérieux Werner, membre d’un non moins mystérieux Institut composé de douze membres, féru d’informatique, espionne tout le monde en compagnie d’une comparse qui ne recule devant rien veut aussi récupérer sabre, bible et établir sa domination.

J’ai beaucoup aimé toutes les références à l’histoire de la Transylvanie, que je connais très mal en fait, et c’est passionnant de découvrir les liens entre les différents chefs qui se sont succéder à la tête des pays, la manière de conquérir le pouvoir, le jeu de l’Église pour entretenir des superstitions et garder la main sur les gens, les rivalités entre les papes et certains rois ou princes, la montée en puissance de l’Inquisition et ses tortures, les schismes, les conciles, ou encore les anti-papes.

Igor Bergler évoque aussi les ordres religieux et leur influence : Bénédictins, Franciscains, Templiers (clin d’œil au passage à Philippe le Bel et les templiers, tout le monde connaissant bien ma passion pour « Les Rois maudits » de Maurice Druon), Rose-Croix, Cathares, Albigeois, puis les corporations, la franc-maçonnerie sans oublier l’Ordre du Dragon ou l’aube dorée… pour aboutir à toutes sortes de sectes qui veulent prendre le pouvoir sur le monde avec l’avènement du complotisme qui a le vent très en poupe à l’heure actuelle …

J’aime bien ce genre de jeux de pistes qui nous entraînent aussi bien vers les musées que le monde la musique, en passant par Kafka et dans lesquels on finit par ne plus savoir qui sont les bons et les méchants, le noir et le blanc, le yin et le yang, cf. Mani prophète persan du IIIe siècle et la doctrine du manichéisme, sur fond bien-sûr de monstre avec Dracula qui a inspiré son conte vampire à Bram Stocker.

L’intrigue est passionnante, menée très habilement sur un rythme haletant, une fois le livre en mains, il est difficile de le lâcher malgré les 600 et quelques pages. J’ai pensé à Indiana Jones et la dernière croisade, ou à un de mes romans préférés « Le nom de la rose » d’Umberto Eco, en fait ce roman se situe juste au milieu …

Les personnages sont intéressants, notamment Charles Baker qui se perd parfois dans les détails mais dont le raisonnement est intéressant, Werner qui rappelle un milliardaire sans scrupule et avide de pouvoir bien connu ou encore l’inspecteur Ledvina haut en couleur, le verre à la main, et nostalgique des méthodes de l’ex-URSS…

Certes, il y a des longueurs, et j’avoue avoir survoler les pages concernant les sabres, qui ne me passionnaient pas et ralentissaient le rythme. L’écriture est belle, les explications sur le plan historique sont claires et donnent envie de creuser. Au passage, Igor Bergler nous livre une réflexion savoureuse sur les personnes qui ne veulent que « continuer à jouer, à taper non-stop sur des boutons comme un singe sur un Smartphone, à passer sans cesse d’une chose à l’autre sans pouvoir se concentrer sur rien.

Je mettrai un bémol : connaissant mal l’histoire de la Roumanie, du moins de la Transylvanie pour simplifier, notamment au Moyen-Âge, de Sigismond de Luxembourg, à Rodolphe II en passant pas Vlad Tepes, il m’est impossible de déterminer l’exactitude des faits que l’auteur leur attribue.  Donc, j’ai du pain sur la planche…

 Je connais peu la littérature roumaine, et ce roman me permet d’y entrer avec enthousiasme.

Un grand merci à NetGalley et aux Fleuve éditions qui m’ont permis de découvrir ce roman qui se dévore ainsi que son auteur.

#LaBibleperdue #NetGalleyFrance

UN PORTRAIT DE ARCIMBOLDO le peintre préféré de Rodolphe II

8/10

L’auteur :

Igor Bergler est un écrivain et producteur roumain. La Bible perdue, thriller ésotérique narrant les aventures du professeur Charles Baker, a connu un succès phénoménal avec plus de 150 000 exemplaires vendus, et est devenu un best-seller traduit dans plusieurs pays.

Extraits :

Charles se demanda ce qu’il avait à voir avec les évènements de cette minuscule ville au cœur de la Transylvanie. Il avait écrit des livres vaguement en lien avec cette région, et il était précisément là pour un colloque d’histoire médiévale. Les policiers se tenaient toujours figés à la porte, plantés avec autorité dans l’épaisse moquette.

Durant le Moyen Âge et dans toute l’Europe, les corporations avaient initié la plupart des évolutions de la société, en dépit des résistances de la noblesse et de l’Église.

Elles ont cependant forcé et accéléré l’avènement de la modernité. Au sein de la corporation des artisans et des commerçants a germé la petite bourgeoisie, parmi les banquiers et les notaires a émergé la grande bourgeoisie. De la corporation des maçons s’est élevée la franc-maçonnerie, qui a donné la Révolution Française, qui a fondé l’Amérique, qui a engendré les révolutions de la première moitié du XIXe siècle et qui a formé le monde que nous connaissons aujourd’hui…

Contempler l’orage depuis le balcon, tout le monde peut faire ça. C’est la grandeur de l’Amérique, songea-t-il, tout prédicateur trouve son troupeau. Et c’était bien comme ça, tant qu’il pouvait, avec son Institut, choisir et contrôler les prédicateurs.

Rodolphe (II de Habsbourg) invita même à sa cour l’un des peintres les plus intéressants de la Renaissance. Aujourd’hui encore les critiques d’art n’ont pu trancher s’il avait des problèmes mentaux ou s’il était génial. Ce qui est certain, c’est que ses toiles peuvent être admirées au Louvre. Arcimboldo était le peintre favori de Rodolphe II.

L’absence d’un ennemi clairement identifié vers lequel diriger la haine et la peur de l’opinion publique était devenue un danger, pour le Conseil. Ils avaient réussi à combler cette lacune et préparaient aujourd’hui une nouvelle guerre froide, bien plus sinistre que celle qui avait suivi la Seconde Guerre mondiale.

Et pourtant, la Révolution française a été le moment historique qui a donné le plus de frissons à l’organisation parce qu’elle a produit, de leur point de vue, le plus monstrueux document de l’histoire, la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen…

Empêcher l’individu d’être seul, et donc de se retrouver avec ses pensées, représentait le premier pas vers le contrôle total du sujet. L’absence de solitude est le pire ennemi de la liberté de pensée, de l’indépendance, avait dit Werner. Jamais rien de sérieux n’a été élaboré en dehors de ces heures que l’homme passe face à lui-même. Suspendre la réflexion équivaut à annihiler la personnalité individuelle, à fondre des individus différents, capables de penser et d’agir seul, dans une sorte de soupe primordiale…

Aujourd’hui, la vie réelle devient une pause dans le jeu et dans le récit. De plus en plus de gens confondent la réalité et les innombrables stupidités, les énormes incohérences qui leur sont mises dans la tête. C’est une méthode de contrôle. L’homme devient la proie facile du spectacle de l’information.

Terminé en janvier 2021

13 réflexions sur “« La Bible perdue » d’Igor Bergler

    1. un roman vraiment à part, bien au-delà du thriller, on passe du XIIe siècle à l’heure actuelle sans jamais s’ennuyer mis à part les descriptions et symboles des sabres …
      une fois immergée, il a été difficile d’en sortir avant la dernière page 🙂

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    1. passionnant est le bon terme… je n’ai pas vu passer les 600 pages !
      maintenant il va falloir aller voir de plus près Sigismond Rodolphe et Vlad car le Moyen-Âge en France c’est OK à part certaines périodes mais en Europe de l’Est c’est ignorance pas abyssale mais quand même étendue 🙂

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    1. cet auteur est vraiment intéressant son livre fait faire un voyage dans le temps, l’espace, et il sait bien alterner des explications parfois très longues et une action à toute allure, cela permet de souffler…
      belle expérience… à découvrir c’est sûr 🙂

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    1. tout est intéressant dans ce roman, même pour suivre l’intrigue il faut être attentif, alors quand on va dans l’Histoire, les corporations c’est encore plus compliqué… J’ai des notes partout pour approfondir et pour mémoriser:-)

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    1. l’intrigue est haletante, et l’auteur aborde beaucoup de thèmes qui la constituent avec l’histoire, les organisations sectaires, les vampires via Dracula mais là, il ne s’étend pas beaucoup -)
      les sabres mis à part j’ai tout aimé même les raisonnements parfois longs 🙂

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