« Du côté des Indiens » : Isabelle Carré

Après moultes hésitations, je me suis décidée à lire le roman dont je vous parle aujourd’hui, car je ne voulais pas avoir de regrets :  

Résumé de l’éditeur :

« Il s’est trompé, il a appuyé sur la mauvaise touche, pensa aussitôt Ziad. Il ne va pas tarder à redescendre… Il se retint de crier : “Papa, tu fais quoi ? Papa ! Je suis là, je t’attends…” Pourquoi son père tardait-il à réapparaître ? Les courroies élastiques de l’ascenseur s’étirèrent encore un peu, imitant de gigantesques chewing-gums. Puis une porte s’ouvrit là-haut, avec des rires étranges, chargés d’excitation, qu’on étouffait. Il va comprendre son erreur, se répéta Ziad, osant seulement grimper quelques marches, sans parvenir à capter d’autre son que celui des gosses qui jouaient encore dans la cour malgré l’heure tardive, et la voix exaspérée de la gardienne qui criait sur son chat.


Son père s’était volatilisé dans les derniers étages de l’immeuble, et ne semblait pas pressé d’en revenir.  »
 
Ziad, 10 ans, ses parents, Anne et Bertrand, la voisine, Muriel, grandissent, chutent, traversent des tempêtes, s’éloignent pour mieux se retrouver. Comme les Indiens, ils se sont laissé surprendre ; comme eux, ils n’ont pas les bonnes armes. Leur imagination saura-t-elle changer le cours des choses ? La ronde vertigineuse d’êtres qui cherchent désespérément la lumière, saisie par l’œil sensible et poétique d’Isabelle Carré.

Ce que j’en pense :

Ziad est un petit garçon de dix ans, qui a hâte de montrer son bulletin scolaire à son père, car ses résultats se sont nettement améliorés. Il guette l’arrivée de l’ascenseur, pour le lui montrer et bizarrement celui-ci ne s’arrête pas, et son père disparaît dans un appartement du cinquième étage… Il se rend compte, très vite, que son père a une maîtresse et sa petite vie bien réglée ou presque va se mettre à vaciller.

Que faire ? il décide d’aller voir la dame du cinquième, Muriel pour lui demander de ne plus voir son père, ce qu’elle fait… Hélas, le père est victime de ce qui ressemble à une rupture d’anévrisme et bizarrement, Ziad se rapproche de Muriel…

Le roman démarre bien, mais ça s’enraye très vite : l’auteure en voulant creuser la vie la personnalité des protagonistes, s’égare : on part dans le viol des jeunes actrices pour accéder à un rôle, avec des références à #me-too et finalement on enfourche un autre cheval de bataille avec la dérive de la mère de Ziad qui se lance dans des rencontres hasardeuses, la maladie du père, et ses consultations à l’hôpital, et c’est très dommage et irritant pour le lecteur qui s’attend à une histoire plus centrée sur Ziad, sa vie qui vole en éclat, du fait de la trahison du père, et du côté taiseux de la famille…

Il faut quand même remarquer que, dans ce roman, les rôles sont souvent inversés : ce gamin est plus adulte que ses parents et essaie constamment et lucidement de « les porter sur ses épaules ».

J’avais choisi de ne pas lire le premier roman d’Isabelle Carré, car elle ne m’avait pas convaincue lors de ses passages à la télé, et ces actrices qui se mettent à l’écriture, ça me gêne parfois et je savais que c’était une autofiction teintée de romance. Avec un deuxième roman je me suis laissée tenter et grosse déception…

L’écriture est relativement agréable, les références au cinéma (on a droit à des répliques par exemple des « Tontons flingueurs » ou à la littérature, qui confirment sa culture artistique, mais cela ne suffit pas à faire un bon livre. Je suis contente d’être allée au bout car je voulais savoir ce qui allait arriver à Ziad que j’ai bien aimé et la fin est particulière…

Visiblement tout le monde ne pense pas comme moi car, dans la newsletter annonçant le programme de « La Grande Librairie » du 09/09/2020, on peut lire: « L’actrice et romancière Isabelle Carré signe un roman magnifique sur l’enfance saccagée et sur la vulnérabilité, Du côté des Indiens (Grasset). Elle raconte, elle aussi, le moment où une jeune actrice, harcelée par un réalisateur prestigieux, ne peut pas dire non. »…

Un grand merci à NetGalley et aux éditions Grasset qui m’ont permis de découvrir ce roman et son auteure que j’aime beaucoup en tant que comédienne….

#DucôtédesIndiens #NetGalleyFrance

6/10

Extraits :

L’année de ses dix ans a sonné la fin d’une autre récréation, celle de l’insouciance. La page s’est définitivement tournée, et il n’aime pas le nouveau chapitre qui est en train de s’écrire.

Pourtant, Ziad en était convaincu, les conflits des cours d’histoire, les guerres qu’on apprenait à l’école ne se déclaraient pas que dans le passé ou le dimanche soir à la télé, elles ne se déroulaient pas uniquement à l’autre bout du monde, à l’occasion d’affrontements ethniques, séparatistes ou intégristes, elles se livraient aussi dans de jolis appartements, entre frères et sœurs, maris et femmes, avec ceux qu’on avait pourtant coutume d’appeler affectueusement « les Proches ».

Le visage de Ziad s’éclaira d’un grand sourire en demi-lune, aussi large et élastique que celui d’un personnage de manga, même s’il avait encore du mal à y croire. En grandissant, il avait appris à se méfier des promesses des adultes. Leur sempiternel « on ira », qui n’arrivait jamais. « Tu avais bien dit cette semaine ! »

Mais qu’on soit pâtissier, gardien d’immeuble ou employé de bureau, n’était-ce pas la vie elle-même qui s’efforçait tôt ou tard d’enseigner à chacun l’art du compromis ? Malgré son jeune âge, il savait déjà qu’un bonheur sans tâche, ça n’existe pas, pour personne.

On n’enregistre pas les choses « normales » au feutre indélébile, on ne grave pas la vie de tous les jours, le monde tel qu’il est, ou tel qu’il devrait être, de cette façon, on répertorie ainsi les images qu’on n’a pas su lire.

Parfois, quand il découvrait ses parents devant la télé, les yeux cernés, fixant les images comme s’ils cherchaient désespérément à capter autre chose derrière l’écran, il se disait que son rôle était de les rassurer, s’il le pouvait. De ne pas peser en plus sur les épaules fatiguées, de les porter même, s’il en était capable.

Lu en août-septembre 2020

42 réflexions sur “« Du côté des Indiens » : Isabelle Carré

  1. Comme toi je n’ai pas lu son précédent roman car je me méfie de ces célébrités qui se « mettent à la plume »… (je n’ai fait qu’une exception pour Bernard Giraudeau, qui ne m’a pas déçue…). Et je suis bien contente de ne pas avoir à noter celui-là non plus !

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  2. Je n’ai pas encore lu son livre mais comme je suis un fan absolu d’Isabelle Carré je compte bien le lire. Ce n’est pas très étonnant qu’elle reprenne des thèmes du premier « Les Rêveurs » – livre que j’avais beaucoup aimé – beaucoup d’écrivains sont dans ce cas. J’espère que je ne serais pas déçu et si c’est le cas je le garderai pour moi pour ne pas perdre la face… ! Non, je plaisante car je ne peux pas être déçu. Quand on est fan !

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    1. je l’adore entant que comédienne, cela ne changera pas! mais pas convaincue par son style,dommage, il y a des idées 🙂
      j’ai adoré « se souvenir des belles choses » de Zabou Breitman avec Bernard Campan elle y est magnifique 🙂

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    1. situ dois en lire il vaut mieux choisir « Les rêveurs » a priori…
      Trop bouillon pour moi et superficiel au final, car à force de courir derrière des thèmes multiples et coller à l’actu avec le harcèlement, on reste vraiment sur sa faim (ou sa fin comme tu veux!!!
      en tout cas pas pour moi, mais je suis fixée maintenant 🙂

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    1. elle avait un bon thème de base elle a voulu coller à l’actu et résultat peu concluant…
      J’avais choisi de ne pas lire « La commode aux tiroirs de couleurs » et a priori c’était une erreur (à rattraper donc!) donc je ne voulais pas passer à côté mais bof 🙂

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      1. Sur Louis XV, tu as un excellent Chantal Thomas, L’échange des princesses, mais ce n’est pas du tout la même période, puisque c’est l’histoire de son « mariage » avec l’infante d’Espagne, et de la même auteure, Le testament d’Olympe, l’histoire d’une rivale éphémère de La Pompadour. Il doit y en avoir beaucoup d’autres !

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      2. je l’ai lu il y a longtemps et il m’avait plu …
        Par contre je n’ai toujours pas lu « Le testament d’Olympe » qui est dans ma PAL depuis un… certain temps, donc je vais essayer d’y penser 🙂

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