« Le roi et l’horloger » d’Arnaldur Indridason

Aujourd’hui, je vous propose un petit voyage à travers le temps et l’espace : direction l’Islande (et le Danemark) au XVIIIe siècle avec ce roman :

Résumé de l’éditeur :

Arnaldur Indridason met tous ses talents d’auteur de roman noir mondialement reconnu, sa maîtrise de l’intrigue, du découpage, du rythme de l’action ainsi que du suspense, au service d’un grand roman historique et d’une œuvre littéraire magnifique sur la paternité et sur les relations des hommes qui ne savent pas se parler. 

Au XVIIIe siècle, l’Islande est une colonie danoise, gérée par les représentants de la Couronne qui souvent usent de leur autorité pour s’approprier des biens, en profitant en particulier des lois qui condamnent les adultères à la peine de mort. Le roi Christian VII, considéré comme fou et écarté du pouvoir, traîne sa mélancolie à travers son palais jusqu’au jour où il rencontre un horloger islandais auquel a été confié un travail délicat. Une amitié insolite va naître entre les deux hommes. À travers la terrible histoire du père de l’horloger, le souverain va découvrir la réalité islandaise et se sentir remis en cause par la cruauté qui s’exerce en son nom.

Des ateliers du palais aux intrigues de la cour et aux bas-fonds des bordels de Copenhague, nous accompagnons ces héros dans leur recherche tragique et vitale.

Un grand roman captivant et violent qui émeut le lecteur et le trouble en un crescendo qui va le laisser ébloui et inquiet devant la complexité du monde des sentiments que nous révèle Arnaldur Indridason. 

Ce que j’en pense :

On fait la connaissance de Jon Siversten, horloger de son métier, au talent reconnu, qui a décidé de réparer, à ses heures perdues, une horloge très ancienne et qui est abandonnée sous la poussière dans le palais. Un soir, il voit arriver un homme en bonnet de nuit, une bouteille de madère à la main, déjà bien entamée et la « conversation » s’engage.

On assiste à une rencontre surprenante entre cet horloger qui a fui l’Islande, alors colonie danoise, pour se réfugier dans la capitale, fuyant ainsi un drame familial, et un souverain que l’on dit fou, car il a des crises d’agitation alternant avec des périodes de prostration qui ont permis à sa famille de le tenir à distance du pouvoir.

A la demande de Christian VII, Jon raconte son histoire, tout en démontant les pièces de l’horloge, pour les restaurer, retrouver celles qui ont été vendues, restaurer celles qui ont été abimées. Mais, il n’est pas toujours facile de raconter le passé, répondre aux questions d’un monarque qui veut savoir mais n’admet pas vraiment la contestation et ce d’autant plus que la famille royale ne voit pas cela d’un bon œil.

Cette rencontre permet une réflexion sur le temps, sa nature, ce qu’il signifie, ce qu’il dit de nous, ou encore la vérité, ce qu’on en fait, comment on l’interprète mais aussi sir la vie en général, le roi est-il plus heureux, plus épargné que notre horloger ?

Une nouvelle fois, Arnaldur Indridason nous propose un roman, totalement différent des polars dans lesquels il excelle avec un style bien à lui, lenteur oblige, pour nous parler d’Histoire, de politique, du sort terrible que l’on réservait aux couples adultères, autrefois, avec des sanctions prises par un bailli lui-même débauché, soumis au Roi du Danemark avare en « absolution » …

Ce roman est très intéressant, riche, bien écrit et les talents de conteur de l’auteur m’ont entraînée avec lui dans cette aventure et captivée car j’aime particulièrement ce genre de réflexion existentielle, mêlée d’Histoire… j’ai retrouvé ce qui m’avait plu dans « Le livre du roi »

Un grand merci à NetGalley et aux éditions Métailié qui m’ont permis de découvrir ce roman et de retrouver la plume de son auteur qui me plaît toujours autant.

Sortie le 03/02/2023

#LeRoietlhorloger #NetGalleyFrance !

9/10

Extraits :

Le temps s’était arrêté. Le chef-d’œuvre façonné à la gloire de Dieu et de la Vierge Marie deux cents ans plus tôt n’avait, de mémoire d’homme jamais sonné les heures du jour et de la nuit, ni indiqué les phases de la lune ou la course des planètes. Ce butin de guerre acquis lors d’un conflit oublié depuis longtemps reposait sous une épaisse couche de poussière dans une remise du palais royal de Christiansborg, les monarques et leurs règnes avaient passé sans que le temps reprenne sa course.

Dès que cette idée lui fut venue, il lui sembla vivre une expérience mystique, son cœur s’emplit d’une allégresse qui faisait tressaillir tout son corps, c’était là une joie qu’il éprouvait pour la première fois et qu’il ne pouvait interpréter autrement que comme une révélation.

Est-ce autre chose qu’une accumulation de souvenirs ? poursuivit tristement Christian VII en regardant les pièces du chef-d’œuvre éparpillées devant lui. Comme tous ces morceaux qui sont à l’intérieur de cette horloge ? Un passé que nous ne retrouverons jamais ? Maudit temps qui nous projette dans l’oubli !

Y a-t-il des moments où il ne nous échappe pas ? demanda le monarque. Il passe, nous en saisissons quelques fragments épars avant qu’il ne sombre dans le passé puis ne disparaisse avec nous sans épargner rien ni personne. Absolument rien. Tout cela ne sert à rien…

Evidemment, l’humanité progressait avec le temps ? Il en avait fait l’expérience avec sa profession. Il y avait toujours des évolutions… Il avait alors compris que chaque pas qu’il faisait vers son domicile et vers sa boutique le ramenait un peu plus vers le passé…

Mais, dans ce cas, de quel genre de vérité s’agit-il ? N’y a-t-il qu’une seule et unique vérité, extérieure à ceux qui pensent le mieux la connaître ?

Monsieur l’horloger promet de dire la vérité, mais la vérité, qu’est-ce que c’est ? Est-ce que tu le sais ? Y a-t-il quelqu’un qui sache ?

Jon connaissait d’autres histoires de gens qui avaient refusé d’écouter ceux qui les avaient mis en garde face aux éléments, mais ces derniers avaient poursuivi leur route, ignorant les voix de la raison, et on ne les avait jamais retrouvés. On disait d’eux qu’ils étaient voués à une mort certaine et qu’aucun pouvoir humain n’aurait pu les sauver. C’était là une piètre consolation pour ceux qui les avaient perdus et qui pensaient peut-être n’avoir pas agi assez vigoureusement pour les arrêter…

Lu en janvier 2023

14 réflexions sur “« Le roi et l’horloger » d’Arnaldur Indridason

  1. J’adore cet auteur et je lirai forcément ce titre quand je le trouverai à la médiathèque. C’est intéressant de découvrir comment il écrit en dehors des polars car pour l’instant c’est tout ce que je connais de lui. Merci pour ton enthousiasme !

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    1. j’avais déjà apprécié « Le livre du roi » c’était la 1e fois qu’il tentait l’aventure et il est doué, on sent son amour de l’histoire notamment de l’Islande, j’apprends toujours des choses sur ce pays dans ses livres et là en plus on flirte avec la réflexion philosophique 🙂

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