« Pasakukoo » de Roy Braverman

Ayant passé un bon moment avec « Manhatan sunset » il y a une semaine ou deux, j’avais envie de retourner dans l’univers de Roy Braverman avec ce au livre au titre aussi évocateur que sa couverture :

Résumé de l’éditeur :

Rhode Island, l’été indien, un manuscrit disparu, deux écrivains rivaux, une histoire d’amour : le page-turner d’été, lumineux et divertissant !

Lac Pasakukoo, dans le Rhode Island des étés indiens. Le corps noyé d’une jeune romancière prometteuse, égérie annoncée d’une nouvelle génération d’écrivains.

De chaque côté du lac, la résidence de deux auteurs à succès, meilleurs ennemis du monde. Un shérif qui ne les aime pas et un village où aucun secret ne résiste à la douceur de vivre apparente.

Un avocat noir et théâtral qui débarque.

Une secrétaire à faire pâlir Vénus en personne.

Un assistant littéraire appliqué et ambitieux.

Un manuscrit dont la seule existence fait frémir les familles les plus puissantes de la région. Des mots qui deviennent des armes, et des pages blanches des linceuls.

Et soudain, une série de violences qui se déchainent entre les rancœurs d’hier et les menaces de demain.

Ce que j’en pense :

Cette fois, immersion à Rhode Island avec ses lodges majestueux d’écrivains milliardaires auxquels tout semble réussir :

Nous avons, d’un côté Benjamin Dempsey, auteur sérieux et reconnu et de l’autre côté du lac Pasakukoo. Le lodge de Akerman, auteur de best-sellers dont les fêtes sont somptueuses et dont le talent laisse plus à désirer. Tous les deux ont été amis, autrefois, mais actuellement il semblerait que tous les coups soient bons pour se dénigrer mutuellement. Chacun a affublé l’autre d’un surnom moqueur : Gasby le petit pour Akerman, versus Emile pour Dempsey

Dempsey est en train de rédiger son dernier roman, et il est assisté d’un stagiaire, Matthew, chargé de faire les corrections, avant de mettre le manuscrit dans le coffre, le soir, tout en discutant philosophiquement sur la vie, l’amour, voire le talent de manière cynique le plus souvent.

Un soir, alors qu’ils sont installés confortablement, débarquent trois jeunes femmes, champagne à la main, décolletés plongeants, invitées à la fête d’Akerman. Dempsey les expédie en face, plus ou moins vexé qu’on ait pu confondre les deux propriétés, la sienne étant quand même la plus belle !

Une des jeunes femmes, Esther, va revenir dans la soirée, traversant le lac en barque avec l’envie d’accrocher Dempsey à son tableau de chasse, mais il préfère s’abstenir et demande à son stagiaire de la raccompagner, étant donné qu’elle a déjà beaucoup bu !

Le lendemain le corps de la belle est retrouvé flottant sur le lac. Meurtre, suicide ? Toujours est -il que Blansky, le shérif débarque. Or, il y a un vieux contentieux entre eux : Dempsey a séduit l’épouse puis la fille du shérif, et la vengeance est un plat que se mange froid.

La belle était en train d’écrire un roman sur sa vie et celle de sa famille, les familles paternelle et maternelle sont richissimes, magouilleuse et n’hésite pas à proposer une grosse somme pour être prévenue des moindres avancées de l’enquête… Et curieusement, intervient Douglas Dwayne, un tueur à gages au casier judiciaire long comme le bras ainsi que sa sœur Abigail.

Un crime en entraînant un autre, je me suis laissée happer par ce roman addictif (je lui dois deux nuits d’insomnie car je ne voulais pas le lâcher !) et cette histoire m’a beaucoup plu , car Roy Braverman nous entraîne dans les coulisses du monde littéraire, les bons écrivaines et les moins bons, les arrivistes qui veulent devenir calife à la place du calife, les vies sexuelles débridées, Dempsey et Akerman font les mêmes conquêtes, se piquant leurs amourettes, leur animosité n’est pas seulement littéraire !

On aborde aussi les maisons d’éditions aux procédés pas toujours corrects (cf. le duo d’avocats : Tom Whitaker, le beau Noir musclé et la belle hispanique, Melinda Mendes qui choisit ses tenues en fonction de l’effet recherché pour troubler l’adversaire… ou encore des émissionsTV truquées pour faire le buzz et booster les ventes…

Et bien-sûr, on a encore et toujours, les flics intègres et les ripoux… ce qui confère de nombreux rebondissements, au cours de la lecture, avec une idée intéressante : Roy Braverman donne la parole à un des protagoniste, censé être mort, au moment il livre ses réflexions en nous laissant le soin de deviner de qui il s’agit en prenant un malin plaisir à nous induire en erreur. Ses cogitations étant écrites en italiques.

Bien-sûr, on ne peut pas, ne pas penser à « La vérité du l’affaire Harry Québert » de Joël Dicker, où il est question également de la relation de maître à élève. J’ai lu les deux mais j’ai préféré « Pasakukoo », car l’intrigue est bien plus aboutie.

J’ai retrouvé avec plaisir la plume, le style, la créativité de Roy Braverman, alias Ian Manook et il me reste encore quelques opus ) découvrir sous les deux (et probablement plus)  pseudos !

Un grand merci à NetGalley et aux éditions Hugo publishing poche qui m’ont permis de découvrir ce roman addictif et de retrouver la plume d’un auteur qui me plaît bien décidément…

#Pasakukoo #NetGalleyFrance

9/10

Extraits :

Peu importe qui je suis pour l’instant, puisque je suis mort maintenant, mais voilà ce que je sais de cette curieuse affaire. Tout commence par un malentendu, du côté de Notchbridge, Rhode Island, où l’écrivain Benjamin Dempsey possède un lodge sur les rives du lac Pasakukoo. Un havre de paix que j’ai bien connu, moi aussi…

Matthew, le grand amour, le mariage, la fidélité sont des artifices sociétaux. Le véritable amour, c’est une attirance reptilienne pour la survie. La sienne, égoïste, pas celle de l’autre. J’aime, donc je vis.

Ce colosse noir a pris l’ascendant sur les deux policiers en quelques minutes à peine et moi, comme Dempsey, je me serais aussi laissé piéger par sa colère. Pourtant je sais qu’une colère, ça se construit et ça se maîtrise. Une colère, ça ne trébuche pas comme un élan de hargne ou de haine. Une belle colère, c’est fait pour avancer en bon ordre, ça ne part pas dans tous les sens, c’est comme une tortue de centurions romains, ça suit son plan.

Pou r ceux qui ont eu le bonheur d’avoir une enfance, tout se décide à vingt ans. Nous avons, à cet âge-là la capacité d’envisager toutes sortes d’avenirs, sans mettre en balance le prix à payer pour qu’ils se réalisent.

Nous ne détruirons jamais la nature, elle reprendra toujours ses droits, d’une façon ou d’une autre. Tout ce que nous détruisons, c’est-ce que nous avons construit. Les choses comme les vies, c’est-à-dire nous.

Pas étonnant que cette puissance de destruction fascine les auteurs. Je me sens depuis le début de ce roman comme un gladiateur dans une arène. Est-ce un hasard si, au temps des jeux du cirque, celui qui avait le pouvoir d’arrêter le combat ou d’exiger qu’il se poursuive jusqu’à la mort s’appelait « l’éditeur ».

Les auteurs mentent. Ils n’ont pas vécu ce qu’ils racontent. Raconter, c’est déjà mentir un peu. Écrire, c’est mentir beaucoup. L’auteur de ce roman n’a jamais tué personne. A ma connaissance. Et pourtant, voyez comment il tue. On pourrait même croire qu’il y prend plaisir…

Chaque roseau est différent, mais le vent couche toutes les herbes dans le même sens. Je suppose que l’auteur est fier de cette métaphore, puisque lui-même se prend pour le vent qui nous courbe tous selon son désir.

Lu en mai 2021

27 réflexions sur “« Pasakukoo » de Roy Braverman

    1. j’ai parlé de Dicker car c’est le milieu des écrivains mais les 2 livres ne sont pas du même niveau! (et encore j’avais relativement apprécié le 1er opus de l’auteur) ici c’est un authentique thriller avec des rebondissements et des choses drôles au passage 🙂

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    1. c’est bien construit, efficace, l’auteur nous emmène où il veut et on se laisse guider….
      J’avais déjà bien aimé « Manhattan sunset » je n’ai même pas essayé de résister à la tentation quand je l’ai vu sur NG 🙂

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