« Le bûcher de Moorea » de Patrice Guirao

Je vous parle aujourd’hui d’un  polar noir azur avec :

 

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Résumé de l’éditeur :

 

Dans le lagon de Moorea, les eaux calmes et bleues bercent quelques voiliers tranquilles. Les cocotiers dansent au vent. Les tiarés exhalent leur parfum. Pourtant, à l’abri de la forêt, des flammes se fraient un chemin vers le ciel. Lilith Tereia, jeune photographe, tourne son appareil vers le bûcher. Devant son objectif, des bras, des jambes, des troncs se consument. Et quatre têtes. Pour quels dieux peut-on faire aujourd’hui de tels sacrifices ? Avec Maema, journaliste au quotidien de Tahiti, Lilith est happée dans le tourbillon de l’enquête. Les deux vahinés croiseront le chemin d’un homme venu de France chercher une autre vie. Un homme qui tutoie la mort.

 

Ce que j’en pense

 

J’ai choisi ce polar car j’avais flashé sur la couverture que je trouvais superbe. C’était à elle seule une promesse de dépaysement garanti. Bine m’en a pris.

D’un côté (côté tahitien biens-sûr) nous avons Lilith photographe qui s’est faire un étrange tatouage sur le visage et son amie Maema journaliste. Toutes les deux enquêtent sur un meurtre atroce et ô combien étrange : on a retrouvé quatre corps mutilés, et mis à mort sur un bûcher, évoquant d’étranges rituels. C’étaient des touristes, deux hommes d’âge mur qui passaient leurs vacances avec deux femmes beaucoup plus jeunes. L’enquête a été confiée à un jeune flic au corps de rêve…

Au même moment débarque Nael, un tueur en série, amoureux de la mort (c’est pour cela qu’il la donne !) dont le dernier carnage s’est déroulé moins bien que prévu, l’envoyant sur les traces de son ex-femme retrouvée égorgée sur les lieux de son dernier  crime… évidemment deux histoires qui n’ont rien à voir au départ et vont se retrouver intriquées, imbriquées…

On ne sait pas très bien où on va au départ, mais toujours est-il qu’on a envie d’y aller ! avec un beau voyage en Polynésie, les odeurs, les parfums plutôt, les paysages, on en prend plein les yeux, d’autant plus que Patrice Guirao pimente le récit en nous multipliant les noms, les mots tahitiens.

Voyage aussi dans les coutumes du pays, l’empreinte des Blancs, sur fond de colonisation, des vieux fantasmes de cannibalisme, avec un tueur en série complètement barge, qui parle avec un rat (qui dévore tous les livres qui lui à portée de museau, de Deleuze à l’annuaire téléphonique, en passant par Proust).

Parfois, on a l’impression d’être dans un rêve, tellement certains comportements ont une composante abracadabrantesque (et bien oui, je n’ai pas pu résister !)…

L’écriture est toute en couleurs, comme le récit, et l’auteur a donné des titres à tous ses chapitres et certains sont magnifiques comme par exemple :

Le silence est le meilleur écho de ce qu’on ne veut pas comprendre.

Ou

Les mots sont des bruits civilisés.

Ou encore

Les enfants ne peuvent bâtir leurs royaumes qu’avec la terre des hommes

Dépaysement garanti, une belle plume et une référence au passage, dans la postface au roman « Noir azur » qui désigne les polars ultramarins…

En faisant des recherches, j’ai appris que Patrice Guirao surnommé la perle noire de Polynésie » avait composé pour  Johnny Halliday, Pascal Obispo, Jane Birkin et participé aux « Dix commandements »  ou « Mozart, l’opéra rock » entre autres… Beaucoup de talents donc.

Un grand merci à NetGalley et aux éditions Robert Laffont collection « La bête noire » qui m’ont permis de découvrir ce polar et son auteur.

#LeBûcherDeMoorea #NetGalleyFrance

 

L’auteur

 

Patrice Guirao arrive à Tahiti en 1968. Il a quatorze ans. Depuis, il n’a plus quitté cette île qu’il aime tant. Aiguilleur du ciel, puis parolier, il collabore avec les plus grands et enchaîne en toute discrétion les tubes, avant de s’adonner à l’écriture de comédies musicales à succès et de romans policiers.

Il est l’auteur d’un manifeste dans lequel il définit un genre nouveau, le polar « noir azur ».

 

Extraits

 

Les îles sont les tambours de la mer et les hommes son tombeau.

 

Elle ne savait pas ce qu’il avait trouvé de si inspirant, Gauguin. Matisse, elle comprenait. Il était passé en coup de vent et leur avait piqué le bleu. Mais l’autre avait usé son temps à triturer les verts, les rouges et l’innocence des filles. Il était juste venu donner libre cours à ses névroses. Il avait bouffé l’oreille de son pote et ça lui avait refilé le goût de la chair humaine…

 

Son roman continuait à se construire avec la chair de ses victimes. A l’encre de leurs râles. Il sourit. Il savait qu’il ne l’écrirait jamais. Il n’en ressentait plus ni le besoin, ni l’envie. Il avait compris depuis longtemps que l’écriture n’avait été qu’un alibi. Le seul qu’il ait trouvé pour policer sa nature profonde.

 

Seules les vies sont des romans. Ce sont d’ailleurs les seules qui ont une fin. Les autres, celle d’encre et de papier, ne sont que des vies avortées. Non, tuer n’est pas un crime. C’est mettre le point final à un roman.

 

L’existence est faite de départs. Du crépuscule à l’aurore et des aurores aux crépuscules. Le jour devient cette mélancolie qu’on se traîne la nuit….

 

Le destin est un drôle de grimoire qui ne se laisse pas lire facilement.

 

On ne désaime pas sur commande. Il faut des raisons au désamour. Il a ses saisons. Et ce temps-là ne venait pas. Lilith l’aimait toujours…

 

Peut-on avancer en posant le fardeau du passé sur le bord du chemin sans que quelqu’un nous le rapporte un jour ? Avancer ? Peut-être pas. Mais fuir ? Cela devrait être possible…

 

Il constata une fois de plus que personne ne vient à Tahiti par hasard. Il y a toujours une histoire qui conduit ici et pas ailleurs. Un cheminement de vie. Nael, comme les autres, était en quête d’une vérité. C’est toute la différence entre les hommes qui arrivent quelque part et les hommes qui y grandissent.

 

C’est ce qui la sauvait. Elle avait fait de l’abandon la source. Pas le manque, pas le désamour : la source. Elle s’y désaltérait et y trouvait la délicieuse amertume des oranges et la douceur des pamplemousses.

 

Tous les hommes se battent pour leurs libertés. Mais, rappelle-toi bien une chose ma petite Lilith, il n’y a pas de liberté sans oppresseurs, sinon cela s’appelle la vie.

 

 

Lu en août 2019

16 réflexions sur “« Le bûcher de Moorea » de Patrice Guirao

    1. la couverture était prometteuse mais , et ce n’est pas toujours le cas c’est bien vrai) le livre vaut la peine l’histoire est originale et le dépaysement garanti. J’ai vu que les « aventures » de Lilith vont continuer 🙂

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    1. ce qui est le plus intéressant c’est la culture, les croyances à Tahiti, il faut les connaître un peu pour mieux comprendre le récit et l’auteur l’a bien fait… Le(s) crime(s) est secondaire en fait, c’est plus un roman noir qu’un polar 🙂
      en plus un serial-killer qui a des hallucinations et parle avec un rat !!!

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