« Le mystère Mozart » de Frédérique Jourdaa

Je vous parle aujourd’hui d’un livre qui m’a accompagnée durant cette fin d’année 2019:

 

 

Résumé de l’éditeur :

 

Lorsque Jonas se voit proposer la mise en scène à l’opéra Bastille des Noces de Figaro, le chef-d’œuvre de Mozart, il ne peut refuser une opportunité qui pourrait s’avérer décisive pour sa carrière. Pourtant, il n’a plus mis les pieds à Paris depuis la mort accidentelle de son meilleur ami Tamino, dix ans auparavant. Cette nuit tragique, Tamino était sur le point de percer un mystère autour de Mozart et Jonas est bien décidé à profiter de son séjour pour reprendre l’enquête.
Obligé d’affronter les fantômes de son passé, Jonas court les rues dans les pas de Mozart à Paris et apprivoise les rouages de l’opéra Bastille, avec l’aide de Louisa, lumineuse cantatrice. Mais ambitions, intrigues et complots gangrènent l’immense vaisseau où art et pouvoir se rencontrent inexorablement, pour le meilleur et souvent le pire. Et les non-initiés ne franchissent pas impunément les portes de ce monde sacré… Car Jonas ne tarde pas à découvre que dans cet univers en vase-clos, tout n’est que vice, tromperie, secrets et trahisons. Bientôt, la course contre la montre avant la première représentation se transforme en course-poursuite à travers l’opéra Bastille et l’opéra Garnier. Car certains individus qui avancent masqués sont bien décidés à prendre la place de Jonas, et à l’empêcher de révéler le secret de Mozart…

 

 

Ce que j’en pense

 

Deux jeunes gens viennent jouer une partition au piano, Jonas et Tamino lors d’une soirée privée, costumée. Leur prestation est brillante, mais un homme leur demande de jouer une ouvre plus difficile et Tamino rate un peu un passage difficile. Il s’enfuit, sur sa moto, Jonas part à sa poursuite sur sa moto, mais la vitesse est de plus en plus grande et Tamino est projeté dans les airs et décède.

Parmi, les personnes ayant assisté à cette soirée, deux semblent comploter derrière leur masque.

Jonas va s’enfermer dans une maison ayant appartenu à sa grand-mère,  en bord de Loire. Il a hérité du piano de Tamino et d’un carnet sur lequel ce dernier notait toutes ses recherches : notamment le deuxième séjour de Mozart à Paris, où il a vécu dans des conditions misérables, sa mère y est d’ailleurs morte.

Tamino était à la recherche de partitions inédites, secrètes de Mozart, il voulait prouver que Beaumarchais et Mozart s’étaient rencontrés, et que l’inspiration des Noces de Figaro se trouvait là.

Dix ans plus tard, Jonas est choisi pour mettre en scène « Les noces de figaro ». Est-ce une bonne idée ?

Il décide d’un décor minimaliste, reposant sur une vidéo tournée dans Paris sur les lieux où a vécu Amadeus en 1778…  Mais, curieusement, les morts brutales s’accumulent, toujours accidentelles en apparence.

J’ai choisi ce roman car j’aime énormément Mozart alors monter « les noces de Figaro » avec une mise en scène plutôt originale, c’était tentant.

J’ai aimé l’idée que Beaumarchais et Mozart auraient pu se croiser lors du séjour à Paris de ce dernier. La description de l’Opéra Bastille est glaçante, elle ne donne pas du tout envie d’aller se promener dans les couloirs, les étages qui n’en finissent plus et les morts qui s’amoncellent. On s’attend toujours à voir surgir, « Le fantôme de l’Opéra », caché dans un recoin.

Les rivalités (le mot est trop faible, c’est encore pire que cela) sont toujours d’actualité ; on se souvient des rapports horribles et de la jalousie entre Salieri et le jeune Mozart, pour cela, je vous renvoie au sublime film « Amadéus », mais les rivalités contemporaines sont de la même violence, entre les directeurs d’opéra, les corps de métier… Jusqu’où peut-on aller pour garder ses privilèges et demeurer entre-soi, entre initiés ! sectaire, ni plus ni moins.

En gros, il n’est pas permis de venir jouer dans la cour des grands, de nos jours, comme à l’époque de Mozart.

J’ai aimé les personnages : Jonas, mais aussi Louisa, la cantatrice lumineuse, qui l’aide dans ses recherches, et l’ombre de Tamino qui est omniprésente, le piano   est un être vivant qui transporte le lecteur, et tout au long de ma lecture, j’ai baigné dans les trois sonates pour piano, plus que dans « Les noces de Figaro » d’ailleurs.

On croise Beaumarchais, mais aussi d’autres « gens de lettres » comme Claris de Florian, romancier, poète, fabuliste à qui on attribue « Plaisir d’amour » …

Il y a une deuxième raison qui m’a fait choisir ce roman, c’est l’auteure :  Frédérique Jourdaa que j’ai découverte avec « Le soleil et la cendre », il y a quelques années, en 2013 exactement, où elle racontait le mariage arrangé de Louis XIV, les manœuvres de Mazarin, Marie Mancini, et même Nostradamus et je m’étais régalée. Ce roman était le premier que je recevais via « Masse critique » de Babelio, donc une de mes premières critiques sur mon site préféré et m’a donné envie de faire un blog…

L’écriture de l’auteure est belle, elle se répand en croches, doubles-croches, ralentit parfois, pour laisser respirer le lecteur. La couverture du roman est très belle et la citation en guise d’avant-propos magique, comme l’était son auteur :

« Divine musique, délivrez-nous aussi des profondeurs lacustres ; et que vos anges mélodieux nous enlèvent dans la paix et la tranquillité de toute l’âme. » Vladimir Jankélévitch

J’ai beaucoup apprécié, « Le mystère Mozart », car Amadeus est quand même la vedette dans ce roman, et j’ai parfois eu l’impression que la statue du Commandeur venait réclamer des comptes… clin d’œil au superbe film « Don Giovanni »

J’ai pensé, au passage, à « La petite sonneuse de cloches » qui nous entraînait sur les pas de Chateaubriand mais, ici l’exercice est vraiment réussi.

Un immense merci à NetGalley et aux éditions J.C. Lattes qui m’ont permis de découvrir ce roman et de retrouver avec plaisir la plume de son auteur.

#LeMystèreMozart #NetGalleyFrance

 

J’éprouve une véritable fascination pour Mozart, depuis l’enfance alors je vous propose mes deux sonates préférées parmi le trio cité par Frédérique Jourdaa.

 

❤️ ❤️ ❤️ ❤️ ❤️

J’avoue un amour immense pour la sonate N°11 (et son si célèbre troisième mouvement) dite « Alla Turca »

 

Sonate N°11:

 

 

sonate N°12:

 

 

 

Extraits

 

Ils se connaissent par cœur. Jonas, le beau gosse aux boucles blondes et aux yeux turquoise. Tamino, le prince de la nuit à la chevelure d’ébène et au regard fiévreux.

 

Soirée privée. On enfile nos beaux costumes. On vient nous chercher, on fait notre petit numéro au piano, ils applaudissent. Discours. Courbettes. Congratulations.

 

Ils se retrouvent en pleine lumière, perçant une forêt de robes à paniers et de perruques pour rejoindre les pianos. Sous le ciel de la coupole, deux dragons menaçants fendent un ciel de mercure. Le silence s’installe. Tamino respire profondément. C’est leur signal. Il commence. Une simple comptine dont les notes tintinnabulent avec innocence. Ah ! vous dirai-je, maman. Il reprend l’air, l’accélère, l’ornemente, le déroule, le suspend l’espace d’une seconde, s’immobilise. Jonas récupère le thème qui bourgeonne et volute sous ses doigts.

Les notes sœurs rebondissent. Les pianos sont des bêtes de course. Ils ont préparé leur duo, se sont réparti les variations en fonction de leur caractère, le mode mineur et le ternaire pour Tamino, funambule sur les touches, le binaire et ses triolets cavaleurs pour les grandes mains de Jonas. Ils galopent et se retrouvent, à l’unisson, pour la douzième, la plus brillante, avec ses cascades de doubles croches, ses glissandi virtuoses et sa cadence finale en ut majeur. La foule s’est figée, au plus près de l’estrade et des pianistes dans leurs habits or et argent.

— Beaux comme des princes, glisse un convive perruqué.

— Ou comme des pages, rétorque une mitre d’évêque. Les artistes quittent leurs tabourets et s’inclinent, ballottés par la salve d’applaudissements,

 

Le piano est un animal. Tant qu’on l’apprivoise, il se laisse maîtriser, mais au premier signe de faiblesse, c’est lui qui vous dompte. Tamino devient l’esclave du clavier réfractaire. Des rires et des sifflets narquois ponctuent ses maladresses. Son cœur s’affole, ses doigts brisent le rythme, ses mains tombent. Il est assommé par la violence du silence. Au premier rang, la fille rit. Derrière son Steinway, Jonas fixe droit la partition, hésitant à poursuivre. L’assistance s’amuse. Les hennissements de joie suspendent les deux musiciens sur un fil invisible. Tamino lâche. Avec une violence inattendue, il renverse le tabouret, fait face au public qui le jauge. Un calme hypocrite pèse sur la salle tandis qu’il se précipite vers la sortie. On le retient par la manche. Il se dégage en déchirant le beau revers en dentelle. Jonas veut le suivre, mais la foule se referme.

 

Vous savez, on meurt beaucoup à l’Opéra, mais pas toujours de ce qu’on croit.

 

Promesse ou menace ? Pourquoi ce bâtiment ressemble-t-il à une prison ? se demande Jonas en remontant les marches à la raideur périlleuse.

 

Autant un théâtre de province réserve des respirations, des indulgences, des espaces propices au rêve et à l’imagination, autant cette Bastille paraît difficile à prendre. Aucune place à l’erreur. L’immensité l’oblige à chronométrer chacune de ses interventions, afin de ne rien oublier des multiples acteurs en lice. Quelle liberté gardera-t-il ?

 

Ils les ont si souvent enchaînées ensemble, ces « sonates parisiennes », Tamino les lisait à livre ouvert. La musique infusait en lui, comme une évidence, l’héritage ancestral d’un lointain aïeul homme de lettres, le poète Claris de Florian…

 

Lu en décembre 2019

12 réflexions sur “« Le mystère Mozart » de Frédérique Jourdaa

  1. Ah ça me plairait, j’aime le choix des prénoms :Jonas, Tamino, franchement on s’amuse!
    A part ça, Bastille j’espère y retourner fin janvier, mais les grèves SNCF et personnel opéra, ça dure… Des frais déjà engagés, par ailleurs…

    Aimé par 1 personne

    1. l’auteure entretient le doute tout au long du roman, sur la rencontre éventuelle sur les 3 sonates dites « parisiennes » : composées lors du séjour parisien ou plus tard à Vienne (les recherches se sont poursuivies jusqu’à une période assez récente…
      L’histoire elle-même est captivante 🙂
      « Le soleil et la cendre » m’avait déjà beaucoup plu 🙂

      J’aime

    1. j’aime particulièrement ces 3 sonates, et l’auteure leur rend un bel hommage en entretenant le mystère qui a été élucidé depuis peu… L’histoire des deux amis s’intègre bien dans le contexte historique et on retrouve les mêmes luttes de pouvoir.
      1er séjour à Paris, il rencontre la Cour, la Reine le faste, alors que pour le 2e c’est la misère (la Cour est à Versailles) et sa mère y meurt…
      je suis trop fan,ça va finir par se voir 🙂
      en plus, pas de trémolo dans ce roman, juste les doubles-croches 🙂

      Aimé par 1 personne

    1. l’auteure écrit très bien… j’avais beaucoup aimé « Le soleil et la cendre » alors quand j’ai vu que c’était elle, et ne plus autour de Mozart, impossible de résister 🙂
      je vais essayer de lire d’autres ouvrages d’elle , l’écriture en elle-seule est un tel plaisir, une gourmandise, ce qui n’est pas toujours le cas actuellement 🙂

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