« Par deux fois, tu mourras » par Eric Fouassier

Je partage aujourd’hui un roman historique, découvert sur NetGalley :

 

 

 

Résumé de l’éditeur :

 

Palais de Rouen, 569. Galswinthe, la jeune épouse de Chilpéric, l’un des trois petits-fils de Clovis, meurt étouffée dans sa chambre. Juste après, son assassin est retrouvé poignardé… Quatre ans plus tard, la sœur de Galswinthe, la reine Brunehilde d’Austrasie, est persuadée que toute la lumière n’a pas été faite sur cette tragique affaire. Elle charge Arsenius Pontius, un jeune lettré gallo-roman, de se rendre à Rouen pour enquêter en toute discrétion.

Sur place, Wintrude, une ancienne princesse thuringienne devenue esclave des Francs, lui apporte des informations essentielles. La jeune femme, indirectement mêlée au meurtre de Galwsinthe, a dû se placer sous la protection de l’Église pour échapper à des proches de Chilpéric, qui cherchent à la réduire au silence… Victime lui-même d’une tentative de meurtre, Arsenius apprend qu’un conflit est sur le point d’éclater entre Neustrie et Austrasie. Dès lors, Wintrude et lui n’ont plus le choix : ils doivent faire éclater la vérité avant que le jeu des trônes n’embrase toute la Gaule mérovingienne.

Ressuscitant avec brio cet âge sombre qui fonda la France, où le meurtre, le sexe et la vengeance sont autant d’instrument de pouvoir, Éric Fouassier allie rigueur historique et inventivité romanesque pour emporter le lecteur dans une enquête trépidante.

 

Ce que j’en pense

 

Ce roman propose une immersion complète au royaume des Francs, dans les conflits qui opposent les fils de Clotaire (dernier fils survivant de Clovis) : Chilpéric qui règne sur la Neustrie, Sigebert roi d’Austrasie et Guntramn, roi de Burgondie.

Galswinthe, la femme de Chilpéric a été assassinée, ce qui arrange bien ce dernier car il va pouvoir épouser Frédégonde, sa concubine. Seulement, Brunehilde, la sœur de Galswinthe   et épouse de Sigebert, ne l’entend pas de cette oreille et veut élucider ce meurtre, tâche qu’elle confie à un jeune aristocrate gallo-romain du nom d’Arsenius Pontius, fin lettré filleul de Grégoire évêque de Tours. Officiellement il est chargé d’écrire un long poème pour rapprocher les trois frères.

Quoi qu’il en soit la mission sera compliquée, car tout sera mis en œuvre pour le mettre en échec, chacun avançant ses pions sur l’échiquier, car il doit trouver qui avait intérêt à maquiller la mort de Galswinthe : certes elle a été poignardée mais ses blessures n’ont as saigné donc elle était déjà morte avant. Frédégonde a pris soin de faire constater le décès par un druide gaulois tout acquis à sa cause : Crixegatos qui contredit les premières constatations faites par le médecin officiel Marileif.

Arsenius part donc pour la Neustrie, chevauchant en compagnie de Gontran-Boson qui cherche à savoir quelle est vraiment la mission.

Arsenius rencontre chez l’évêque de Rouen, Pretextat une jeune fille, Wintrude : princesse thuringienne, esclave de la cour de Neustrie, qui pourchassée par des sbires du palais, a trouvé refuge chez lui. C’est le frère de celle-ci, Arrbald, retrouvé mort quelques jours plus tôt, qui avait été chargé du meurtre de la reine, en échange de leur liberté à tous les deux.

Tous les deux vont s’entraider pour tenter d’élucider le « double meurtre ». Pour simplifier, j’ai écrit les noms des personnages réels en caractères gras et les héros fictifs en caractères normaux.

Nous avons d’un côté le récit des luttes acharnées que se livrent Chilpéric et Sigebert pour s’emparer chacun des terres de l’autre, tandis que Guntramn laisse ses frères se déchirer, comme par exemple à la mort de Charibert qui possédait Paris, il préfère les compromis, la discussion, car il sait qu’il dispose de moins de troupes qu’eux. Il complote en douce avec le clergé pour s’imposer. Il préfère s’occuper de sa terre burgonde.

« A presque quarante et un ans, l’aîné des fils survivants du roi Clotaire était loin de partager le caractère belliqueux de ses frères Sigebert et Chilpéric. Il ne se résolvait à faire appel à son armée que lorsqu’il s’y trouvait contraint. »

Les ravages des guerres sur les terres et les populations sont bien évoqués, ainsi que la lourdeur des combats, les haines fratricides, ou le rôle du haut clergé, chacun ayant son évêque, et ceux-ci ne sont pas en reste pour peser de tout leur poids sur les évènements. Trois royaumes c’est forcément deux de trop ! les épouses ont aussi de fortes personnalités et se détestent cordialement, chacune voulant jouer un rôle important. Ce sont des amantes fougueuses qui ne reculent devant rien…

Parmi les personnages fictifs, plus ou moins « mouillés » dans l’affaire, on rencontre Timoléon, un prêtre, fou de Dieu, auto-flagellant qui veut à tout prix se débarrasser de la belle Thuringienne, suppôt de Satan, le druide gaulois, Crixegatos qui anime des cérémonies païennes en compagnie de Frédégonde, dans la forêt, ou encore Holgunn : palefrenier, ami d’Arrbald…

Arsenius et Wintrude sont deux héros, très sympathiques, même s’ils sont un peu trop des gentils par rapport à tous les autres, et la manière dont ils mènent leur enquête est très intéressantes. Comment résister à cette fille impétueuse, qui refuse de se laisser faire ou à ce jeune homme, un lettré qui cite Terence, « La fortune sourit aux audacieux » ou encore

« Comme l’affirme Terence, « il n’est rien qu’une fausse interprétation ne puisse détourner du droit sens »

Eric Fouassier se base sur tous les travaux consacrés à la mort de Galswinthe, avec une bibliographie intéressante et propose au début la liste des personnages réels ou fictifs de chaque royaume.

Je suis férue de romans historiques, je suis tombée dans la marmite (de potion magique) avec « Les Rois maudits », il y a fort longtemps et ce livre m’a beaucoup plu. Il est un peu de la même veine, en ce qui concerne les personnages historiques. Je ne connaissais pas l’auteur, je vais m’empresser de découvrir son œuvre.

Très bon moment de lecture pour les amateurs d’Histoire et d’histoires…

Un grand merci à NetGalley et aux éditions Lattès qui m’ont permis de le découvrir.

 

#ParDeuxFoisTuMourras #NetGalleyFrance

 

 

Extraits

 

Au nombre des spectateurs, mais s’abstenant de toute manifestation, figurait une jeune femme aux traits altiers, affichant un air de dignité qui tranchait avec ses vêtements de laine grossière. Grande, blonde, les cheveux noués en une longue queue de cheval. Des yeux couleur de miel, étirés vers les tempes comme ceux des félins, des pommettes hautes, des attaches solides et une silhouette nerveuse.

 

Il était son aîné, sa seule famille. L’unique soutien sur lequel elle avait pu compter depuis qu’ils avaient été enlevés par les Francs, encore enfants. Cela s’était passé à l’issue d’une campagne particulièrement meurtrière contre les Saxons et les Thuringes. En 560, sous le règne de Clotaire, le dernier fils survivant du grand roi Clovis.

 

Mais Arsenius avait passé le plus clair de sa jeunesse dans la riche province d’Arverne, pour partie épargnée par de tels fléaux. Ce voyage à travers le nord de la Gaule lui permettait de constater l’état de désolation dans lequel se trouvait plongé le pays, naguère si florissant, de ses ancêtres. Et cet amer constat ajoutait à son affliction.

 

Si on vous demandait quelle est la situation actuelle de la « Francia », que répondriez-vous, mon frère ?

Trois rois, trois royaumes, probablement deux de trop.

Parfaitement résumé et si cruellement vrai ! approuva Sapaudus en branlant du chef. La paix actuelle ne saurait durer. Chilpéric, Sigebert et Guntramn sont aussi éloignés l’un de l’autre que le sont désormais leurs capitales respectives.

Chacun cherche à étendre son pouvoir au détriment des deux autres.

 

J’ignore comment il s’y est pris pour tuer la reine, mais il s’est débrouillé pour que nul ne puisse soupçonner une mort violente.

 

Les seules blessures que Marileif a relevées sur le cadavre correspondaient aux coups de poignards portés post mortem. C’est donc que Galswinthe avait été exécutée de façon beaucoup plus discrète.

 

Seule femme au sein de cette assemblée des hommes les plus influents du royaume, Brunehilde avait pu mesurer l’étendue de son pouvoir tout neuf à l’admiration ou à la méfiance qu’elle avait lu dans leurs regards.

 

Un amant réjoui est un allié qui ne s’appartient plus…  Dixit Brunehilde

 

Ainsi, c’était donc cela qu’on appelait « régner » ! cela passait nécessairement par le mensonge, la duplicité et le reniement de la parole donnée. La circonstance qu’un homme d’Église aussi respecté que l’évêque Grégoire apportât son concours actif à d’aussi basses manigances ne faisait que rendre la chose encore plus détestable.

 

Le poète Térence avait écrit : « La vie des hommes est comme le jeu de dés : si ce qu’on obtient en les lançant n’est pas exactement ce dont on aurait eu besoin, il faut y remédier par son habilité à jouer ». Pour une fois, il se sentait en désaccord avec l’un de ses auteurs favoris. Lui avait fait un autre choix, celui de se retirer purement et simplement du jeu, et il entendait bien dorénavant s’y tenir.

 

Il était capable, d’un jour sur l’autre, voire d’un instant à l’autre, de passer du plus profond désespoir au plus fol enthousiasme… pense Wintrude à propos de Chilpéric

 

 

Lu en mars 2019

17 réflexions sur “« Par deux fois, tu mourras » par Eric Fouassier

  1. Je lis très peu de romans historiques sauf ceux concernant les deux dernières guerres…Mais tu en fais une critique tellement positive que tu me donnes envie ! Merci pour la découverte de cet auteur dont je n’ai jamais entendu parler

    Aimé par 2 personnes

Laisser un commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur la façon dont les données de vos commentaires sont traitées.