« Les rites de l’eau » d’Eva Garcia Saenz de Urturi

Plongée dans le monde fabuleux de la mythologie celte et ses mystères avec le livre dont je vous parle aujourd’hui :

Résumé de l’éditeur :

Pays basque espagnol, 2016. Un tueur en série s’attaque aux femmes enceintes. Comble de l’horreur, l’individu semble s’inspirer d’un rite ancestral consistant à brûler les victimes avant de les pendre par les pieds pour les immerger dans un chaudron datant de l’âge de bronze.

L’affaire est aussitôt confiée à l’inspecteur et profiler Unai López de Ayala, dit Kraken. Appelé sur la première scène de crime, ce dernier découvre, horrifié, que la victime n’est autre qu’Ana Belén Liaño, son amour de jeunesse.

Une révélation qui va replonger l’inspecteur vingt-cinq ans en arrière, dans un passé qu’il croyait profondément enfoui…

Ce que j’en pense :

Pleins feux sur le Pays basque espagnol en 2016 où l’on vient de découvrir une jeune femme morte dans de curieuses circonstances : elle est pendue par les pieds ? la tête immergée dans un chaudron. Très vite, il s’avère que le chaudron qui date de l’âge de bronze a été dérobé quelques temps auparavant.

C’est un chaudron de type irlandais, caractéristique de la culture celte. Si ma mémoire est bonne, celui-là a été exhumé en 1912, dans le massif de Pena Cabarga. Il date de l’âge de bronze, final, autrement dit, il a entre 2600 et 2900 ans.

L’enquête est confiée à l’inspecteur Unai López de Ayala, profiler de son état, dont nous avons fait la connaissance dans le précédent livre. Notre inspecteur, que l’on surnomme Kraken, a reçu une balle dans la tête, tirée à bout portant et qui lui a occasionné des dégâts, une aphasie de Broca en plus du stress post traumatique.

En arrivant sur la scène de crime, il constate que la victime est une amie de longue date, un amour de jeunesse, même avec laquelle il a participé autrefois à un camp de vacances. Ils étaient cinq adolescents sous la houlette d’un jeune professeur, Saul Tovar en juin 1992 ?

Plus tard on découvre une autre victime, tuée selon un rituel analogue, les deux victimes ayant partagé l’expérience alors que s’est-il vraiment passé durant ce camp de vacances ?

Qu’est ce qui peut bien pousser le meurtrier à s’en prendre à des femmes enceintes, ou à des futurs pères ? Les juge-t-il indigne d’être digne d’être parent ? Et pour quelle raison ?

Ce récit nous permet de voir fonctionner notre profiler : le meurtrier est-il psychotique ou psychopathe, par exemple ?

Il y avait un aspect messianique dans ce meurtre, comme si l’assassin accomplissait une mission en tuant rituellement Annabel Lee.  Ce qui évoquait aussi la psychose, la maladie mentale, la perte de contact avec la réalité. Bref, la folie.

L’auteure nous entraîne dans une enquête passionnante, avec des rituels celtiques compliqués, bien approfondis, nous envoyant au passage sur des fausses pistes, avec notre ami Kraken qui se remet mal de sa terrible blessure, rechignant à faire sa rééducation car plus rien ne semble l’intéresser. Mais l’assiduité à ladite rééducation étant la condition sine qua non, pour enquêter, en compagnie de sa coéquipière Estibaliz, alias Esti, il n’a plus le choix et ne tarde pas à succomber au charme de son orthophoniste, donc pas au bout de ses surprises…

Un clin d’œil au passage à la relation très forte et pleine de tendresse qu’entretient Kraken avec son grand-père : on aimerait bien avoir le même !

Ce thriller sort complètement des sentiers battus et fait remonter des traumatismes du passé, en nous faisant découvrir l’importance de la mythologie celtique en Cantabrique, ce qui m’a passionnée illico.

J’ai retrouvé le même plaisir qu’à la lecture du précédent roman d’Eva Garcia Saenz de Urturi : « Le silence de la ville blanche », avec des personnages récurrents (mais il n’est pas nécessaire de l’avoir lu pour déguster celui-ci). Il est aussi passionnant, m’a autant tenu en haleine car je l’ai lu presque en apnée. Un coup de cœur ce qui m’arrive rarement avec un ce style de roman. Je guette avec impatience déjà la parution du suivant en français….

Un grand merci à NetGalley et aux éditions Fleuve noir qui m’ont permis de découvrir ce roman et de retrouver la plume de son auteure.

#LesRitesdeleau #NetGalleyFrance !

Née à Vitoria-Gasteiz, Eva García Sáenz de Urturi est une romancière espagnole. En 1988, elle s’installe avec sa famille à Alicante, Communauté valencienne, où elle étudie plus tard l’optométrie à l’université d’Alicante. En 2012, elle publie son premier roman via Amazon.com « La saga de los longevos ».

Extraits :

Cette mise en scène était bien trop complexe pour un meurtre classique. C’était une drôle de façon de tuer quelqu’un. Comme si le tunnel de San Adrian était une faille temporelle menant à une époque où le rituel était aussi important que la mort elle-même. Il y avait quelque chose de totalement anachronique, hors du temps dans cette scène.

Le chaudron était un fétiche, un objet détourné de son usage pour devenir une arme. L’ensemble donnait une impression de contrôle ; les mains liées dans le dos pouvaient signifier la crainte que la victime se défende et bousille sa mise en scène sophistiquée.

En fait, reprit-elle après quelques instants de réflexion, je crois que même si tu nais avec une forte personnalité, un fort instinct de survie, que tu refuses d’être abusé… La réalité, c’est que quand tu es gosse, tu as un corps de vingt kilos, et que si un adulte décide de te faire du mal, tu ne peux pas l’en empêcher. Ça se passe tous les jours. Je veux dire, la violence intrafamiliale, les abus qui ne sont pas détectés, voire acceptés par des mères qui ferment les yeux…

J’étais troublé par les souvenirs qui affluaient en masse, de retour sur cette côte qui avait été si importante pour moi des années plus tôt. J’avais un compte à régler avec le dieu de cette mer, où j’évitais de me baigner depuis des décennies. La mer Cantabrique était pour moi synonyme de menace et de trahison…

C’est atavique, depuis des temps immémoriaux. Il y a toujours eu des rituels, des cérémonies, des prières… Trop de cultures et de religions successives pour que je vous les énumère, mais les lieux de culte, certains, en tout cas, les plus importants, subsistent, s’adaptent, demeurent. La Triple Mort s’inscrit dans un fond mythique indo-européen très ancien, dans l’origine est antérieure à l’âge de bronze. On la retrouve dans l’imaginaire celte du pourtour atlantique, jusqu’en Hispanie, et dans les traditions littéraires populaires d’origine celte en Galicie, dans les Asturies et en Cantabrie, mais pas seulement.

Si on regarde le Moyen-âge, un tiers de la population mourrait des mains d’un tiers… Nous sommes tous les descendants de ceux qui ont survécu à la période de l’enfance et qui ont peu se reproduire avant de mourir. Dans notre ADN, nous portons à la fois les gênes des victimes et ceux des assassins.

Toutes nos célébrations, toutes nos fêtes, toutes les traditions de vos villes et de vos villages sont issues de traditions bien plus anciennes. Depuis le Samhain celtique que les immigrants irlandais ont importé aux États Unis sous le nom d’Halloween et qui correspond à la nuit de Samain en Galice, mais aussi à la fête des moissons des Romains, jusqu’à la fête de la Saint-Jean qui célèbre le solstice d’été, et Noël qui correspond au solstice d’hiver. Les moments clés de l’année, dans la culture de nos aïeux – les solstices et les équinoxes – coïncident avec les grandes fêtes de l’Église catholique.

Lu en mai 2022

6 réflexions sur “« Les rites de l’eau » d’Eva Garcia Saenz de Urturi

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  2. Je n’ai pas encore noté cet auteur de polar mais ses romans me semblent très intéressants, en plus tu fais de celui-ci un coup de coeur. J’aime quand un polar nous permet d’apprendre des choses sur une région, un pays, des traditions…Merci pour ta chronique et tes extraits choisis

    Aimé par 1 personne

    1. je l’ai découverte l’an dernier car son premier livre était proposé sue NetGalley « à la demande express de nombreux lecteurs » et j’ai adoré ce « silence de la ville blanche » donc j’étais en alerte pour les autres romans sortis en français…
      J’adore tout chez cette auteure,je suis devenue une groupie!!!! elle a un univers complètement à part, et elle creuse chaque fois énormément pour étayer son énigme, son enquête…
      j’avais peur que le 2e soit moins bien et absolument pas …
      J’ignorais totalement l’importance de la mythologie des rites celtes dans cette région donc curiosité en éveil, et envie d’en savoir plus 🙂
      le livre ne se limite pas à cela, je ne voulais pas divulgâcher 🙂

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    1. je suis complétement conquise! tout m’a passionnée dans ce livre, de l’enquête et ses mobiles, aux rituels, en passant par les personnages 🙂
      aussi captivant que « Le silence de la ville blanche »

      J’aime

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